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20 novembre 2010 6 20 /11 /novembre /2010 14:14

      Il y a 74 ans, José Antonio Primo de Rivera était exécuté à Alicante, après un procès expéditif durant lequel il avait émis le souhait que « que tous les peuples d'Espagne, aussi divers soient-ils, se sentent en harmonie dans une irrévocable union de destin » .

      José Antonio, l'une des plus grande figure du nationalisme, avait 33 ans.


      Nous reproduisons la suite du chapitre consacré à José Antonio dans le livre de Jacques Ploncard d'Assac, Doctrines du nationalisme. La première partie se trouve ici.




 

5

 

      Cette nécessaire et difficile révolution, qui donc la fera ? et com­ment ? Et qui la justifiera ?

      Le « qui » et le « comment » sont étroitement liés. José Antonio ne raisonne pas dans le vide, mais dans la situation concrète de l'Espagne de 1934.

      Il n'est pas partisan systématique de la violence. Il constate même qu'il est faux, historiquement, de considérer que la violence est « l'unique moyen » de faire triompher la révolution et il donne l'exemple de l'Allemagne où le national-socialisme s'est emparé légalement du pouvoir, par les élections, mais il ajoute aussitôt : « S’il n' y avait pas d'autre moyen que la violence qu'est-ce que cela ferait ? » Le libéralisme ne s'est-il pas imposé par la guillotine de 1793 qui a fait plus de victimes que la Marche sur Rome ? Et il invoque saint Thomas qui admet la révolte contre le tyran. On peut donc admettre la violence « contre une secte triomphante » néga­trice de la continuité nationale et qui obéit à des consignes étran­gères: Internationale d'Amsterdam, franc-maçonnerie, etc... (31).

 

 

      Dès le début de son action politique, au cours du procès des mi­nistres de la Dictature, défendant Gallo Ponte, José Antonio avait soutenu que l'unité de l'ordre juridique exige que l'on accepte comme fond originaire d'un nouveau droit l'événement qui a mis fin à l'ordre antérieur.

      Il est vain, disait-il, de rechercher « les antécédents généalogiques d'un système politique triomphant ; les systèmes politiques, comme les grands hommes, sont leurs propres ancêtres » (32).

      Plus tard, devant les Cortès, revenant sur cette idée, il disait :

 

« Ni la Dictature, ni la République. ni aucun fait révolutionnaire ne se justifient, ni ne se sont jamais justifiés par rapport à l'ordre juridique antérieur. Tout système politique qui existe dans le monde, sans aucune exception, est né d'une lutte ouverte avec l'ordre politique préexistant parce qu'une des choses qui ne sont pas inclues dans les facultés des ordres politiques est celle de tester » (33).

 

      Le triomphe de la Révolution est-il donc à lui-même sa propre justification morale ? Non, répond José Antonio, mais sa justification ne relève pas de l'ordre juridique :

 

« Le problème de la justice n'est pas un problème juridique, mais métaphysique. Les fondements absolus qui justifient le contenu d'une législation s'expliquent par des raisons éthiques, sociologiques, etc... situées hors du Droit ; Le Droit ne fait qu'étudier, avec une méthode logique, les normes » (34).

 

      C'est sur sa finalité qu'on devra donc juger la Révolution et les institutions qui en naîtront, et non par référence à l'ancien système qui est mort sans tester.



http://img513.imageshack.us/img513/5457/falange1alasarmasoo8.jpg

 

      Et maintenant, quel sera l'instrument de la révolution ? L'armée, répond José Antonio qui raisonne par rapport à l'Es­pagne, dans la conjoncture de 1934. Mais l'armée a-t-elle le droit de faire la révolution ? N'est-elle pas au-dessus de la politique, au service de l'État ?

      La dialectique de José Antonio est extrêmement serrée. Il recon­naît que l'armée, « sauvegardedu permanent », n'a pas à se mêler aux « luttes accidentelles ». Mais :

 

« quand c'est le permanent lui-même qui est en péril, quand est en danger la permanence même de la patrie – qui peut jusqu'à perdre son unité –, l'armée n'a pas d'autre solu­tion que délibérer et choisir. Si elle s'abstient par une interprétation purement externe de son devoir, elle s'expose à se trouver,du jour au lendemain, sans plus rien à servir. Devant les effondrements décisifs, l'armée ne peut servir le permanent que d'une manière : en le recouvrant de ses propres armes. Et il en a toujours été ainsi depuis que le monde est monde ; comme l'a dit Spengler, c'est toujours un peloton de soldats qui, à la dernière heure, a finalement sauvé la civilisation » (30).

 

      On retrouve les accents de Barrès : L'Appel au soldat, seule incarnation de la patrie lorsque tout s'effondre. Mais José Antonio voit au-delà de l'intervention militaire, ce qui se passera le lendemain de la victoire. Il fait ressortir qu'en cas de prise du pou Voir par l'armée, il y a deux périls : l'un provenant d'un excès d'humilité, l'autre d'un excès d'ambition.

      Humilité excessive serait celle d'une armée qui s'empresserait de déposer le pouvoir dans d'autres mains ce qui conduirait à deux erreurs possibles :

 

      1) « Le gouvernement des notables », c'est-à-dire de personnalités choisies en raison de leur éminence ou de leur réputation « sans tenir compte des principes politiques qu'elles professent ». Ce qui constituerait une erreur grave car « un État est davantage qu'un ensemble de techniques ou qu'une bonne gérance, c'est l'instrument historique d'exécution du destin d'un peuple. On ne peut conduire un peuple sans la claire conscience de ce destin ». Or, justement, ce qui constitue la politique, c'est « l'interprétation de ce destin » et les chemins qu'il doit prendre sont « les positions politiques ». L'équipe des notables (los ilustres senores) non animés d'une même foi poli­tique conduirait à une simple gérance, meilleure ou pire, appelée à languir, sans appui populaire autour d'elle.

      2) La seconde erreur serait celle d'un gouvernement de concen­tration, c'est-à-dire l'union de différents partis. Ce serait, en fait, revenir à la politique des partis.

 

      A ces deux erreurs possibles nées d'un excès d'humilité de l'armée s'oppose un autre danger né d'un possible excès d'ambition, « non d'ambition personnelle, mais d'ambition historique. »

      Il manque à l'armée la formation politique voulue et, là, José Antonio a l'exemple de son père. Il a porté sur lui un jugement politique affectueux, mais impartial : « N'oublions pas le cas du général Primo de Rivera, dit-il. Plein de patriotisme, de valeur et d'intelligence naturelle, il n'arriva pas à susciter des enthousiasmes durables faute d'une vision suggestive de l' Histoire. L'Union Patrio­tique manqua de substance doctrinale et tourna en généralités candides et bien intentionnées » (36).

      Au fond, ce que José Antonio demande à l'armée, c'est d'employer ses armes contre l'ennemi intérieur, comme elle le ferait contre l'ennemi extérieur, mais de laisser à la révolution le soin de pour­suivre son chemin politique. L'esprit de la révolution est dans la Falange, il demande l’appui du bras de l’armée pour résoudre une situation de force, mais l’esprit reste supérieur au bras dans l’ordre des finalités politiques.

 

 

6

 

      Mort sans tester, l'ancien régime fait place à un ordre nouveau. Un ordre, c'est toujours une définition des rapports de l'individu et de l'État. C'est la définition de ces rapports qui détermine la classification des régimes politiques.

      Pour José Antonio, l'individu est « une unité fondamentale » (87), il reconnaît que « la dignité humaine, l'intégrité de l'homme et sa liberté sont des valeurs éternelles et intangibles », mais, ajoute-t-il, « il n'existe de liberté que dans un ordre » (88).

      Cet ordre, peut-il être l'ordre libéral ? Non, car l'État libéral est « une manière de se moquer du destin » (89). Pour le libéral, « la loi – le droit –ne se justifie pas par sa fin, mais par son origine... le juste pour le libéralisme n'est pas une catégorie de la raison, mais un produit de la volonté... Il n'y a rien de juste en soi. » Aussi le libé­ralisme n'apporte-t-il pas la liberté, car « lorsque les principes changent avec les fluctuations de l'opinion, il n'y a de liberté que pour ceux qui sont d'accord avec la majorité. Les minorités sont des­tinées à souffrir et à se taire (40) ».

      On aboutit, en fait, à l'absolutisme démocratique. Et, comble de paradoxe, un État « pour lequel rien n'est vrai », érigeant comme seule vérité indiscutab1e cette « position de doute », crée « le dogme de l'antidogme », en vertu duquel les libéraux « sont prêts à se faire tuer pour soutenir qu'aucune idée ne vaut la peine que les hommes se fassent tuer pour elle » (41).

      Les rapports de l'individu et de l'État ne peuvent donc s'articuler raisonnablement dans le non-ordre libéral.

      L'erreur fondamentale du libéralisme. est d'avoir estimé qu'il existait une opposition obligatoire entre l'individu et l'État, déten­teurs de deux « souverainetés »antagoniques,·et qu'il importait de donner la prédominance à celle de l'individu sur celle de l’État, mieux : d'identifier l'État avec la volonté de l'individu.

 

      José-Antonio aborde le problème autrement. Il faut considérer, dit-il, le problème de l'individu en face de l’État :

 

« non comme une compétition de pouvoirs et de droits, mais comme un accomplissement de fins, de destins. La Patrie est une unité de destin dans l'universel et l'individu le porteur d'une mission particulière dans l'harmonie de l'État... L'idée de destin, justification de l'existence d'une cons­truction (État ou système) remplit l'époque la plus haute qu'ait connue l'Europe : le XIIIe siècle, le siècle de saint Thomas. Elle naquit dans l'esprit des moines. Les moines affrontèrent le pouvoir des rois et leur nièrent ce pouvoir tant qu'il n'était pas justifié par l'accomplissement d'une grande fin : le bien de tous les sujets. Une fois acceptée cette définition de l'être – porteur d'une mission, unité chargée d'un destin – fleurit la noble, grande et robuste conception de « service ». Si personne n'existe sinon comme exécuteur d'une tâche, on atteint précisé­ment la personnalité, l'unité et la liberté propre servant dans l'harmonie totale. Une ère d'infinie fécondité s'ouvre dès qu'on arrive à l'harmonie et à l'unité des êtres ! Personne ne se sent plus double, dispersé, contradictoire entre ce qu'il est réellement et ce qu'il représente dans la vie publique. L'individu intervient alors dans l'État comme celui qui accomplit une fonction et non par le moyen des partis poli­tiques, non comme le représentant d'une fausse souveraineté, mais comme possesseur d'un métier, comme chef de famille, comme membre d'une municipalité. Il est ainsi à la fois ouvrier laborieux et déposi­taire du pouvoir »(42).

 


      José Antonio dépasse donc l'antagonisme individu-État en introduisant les notions de service et de mission. L'État n'est plus qu'un « système de hiérarchies »(Mussolini) au service d'une mission.

      L'antagonisme a bien disparu : chaque individu a sa place dans le système des hiérarchies et y exerce sa part de souveraineté, dans sa fonction réelle, selon son destin.

      Le peuple et son Chef forment alors une Communauté, et Chateau­briand ne pourrait plus écrire : « Que faisait à l'esclave présent à la bataille d'Arbelles, la chute de Darius (43) ? » parce que la communauté tout entière se trouve engagée dans la réalisation de sa mission qui est le bien commun.

      C'est par le même raisonnement dialectique que José Antonio va résoudre le faux antagonisme des classes :

 

« La lutte des classes ignore l'unité de la patrie parce qu'elle rompt l'idée de la production nationale comme un tout ( ... ) Ni les ouvriers, ni les patrons ne se rendent compte de cette vérité : les uns et les autres sont coopérateurs dans l'œuvre d'ensemble de la production nationale. En ne pensant point dans la production nationale, mais dans l'intérêt ou l'ambition de chaque classe, patrons et ouvriers finissent par se détruire et se ruiner. »

 

      La critique joséantonienne s'adresse aussi bien au capitalisme qu'au marxisme. José Antonio a parlé de la nécessité de « démonter le capitalisme » (45). Démonter ne veut pas dire détruire. Il s'agit seule­ment de remettre, après, les pièces dans un « ordre nouveau ».

 

« Nous devons commencer par l'homme, et passer par ses unités organiques et ainsi nous monterons de l'homme à la famille, de la famille à la municipalité et au syndicat et nous terminerons dans l’État qui sera l'harmonie du tout. De telle manière que dans cette conception politico·historico-morale avec laquelle nous envisageons le monde, nous avons implicitement la solution écono­mique : nous démonterons l'appareil économique de la propriété capitaliste qui absorbe tous les bénéfices pour le remplacer par la propriété individuelle, familiale, communale et syndicale (46). »

 

 

7

 

      José ne croyait pas aux programmes détaillés, préétablis. Ce qu'il cherchait à définir, ce qu'il exigeait des phalangistes, c'est ce qu'il appelait« un sentiment permanent devant l'Histoire et la vie ». C'est ce sentiment, disait-il, qui nous donne les solutions devant les cas concrets, « comme l'amour nous dit quand nous devons bouder ou embrasser, sans qu'un véritable amour ait jamais établi le moindre programme de bouderies ou de baisers (47). »


http://img391.imageshack.us/img391/6393/falange3symboleokhb3.jpg


      L'idée fondamentale de la Falange, c'est l'unité essentielle de la nation rassemblant en un faisceau toutes ses énergies, à quelque classe de la société qu'elles appartiennent, pour réaliser le bien commun.

      Si l'on fixe bien cette idée de « faisceau », on a la synthèse même de la doctrine de José Antonio.

      Est-ce donc du fascisme ? A cette question il faut répondre par une autre question. Comment José Antonio a-t-il vu le fascisme ? Voici sa réponse :

 

« Le fascisme n'est pas une tactique – la violence –. C'est une idée, – l'unité – (48). »

 

      Voilà ce qu'il retient du fascisme : l'idée d'unité. Mais là s’arrête la coïncidence.

 

« La Falange possède avec le fascisme quelques coïncidences sur des points essentiels de valeur universelle ; mais elle se développe chaque jour. Avec des caractères particuliers et est ·sûre, précisément, de rencontrer dans cette direction ses possibilités les plus fécondes (49) »

 

      Si l'Allemagne et l'Italie se sont cherchées elles-mêmes dans leurs mouvements national-socialiste et fasciste, peut-on dire que l'Es­pagne les imite si elle se cherche elle-même à travers le phalangisme ?

      Non, car :

 

« ces pays ont fait retour à leur propre authenticité et en le faisant nous-mêmes, l' authenticité que nous rencontrerons sera la nôtre, et non celle de l' Allemagne ou de l’Italie. Ainsi, à faire ce qu'ont fait les Italiens. et les Allemands nous serons plus Espagnols que nous ne l'avons jamais été. (50) ».


      « Être plus Espagnols que nous ne l'avons jamais été. » Telle est bien la phrase qui convient pour résumer la doctrine de José Antonio et la vision qu'il a de l'Espagne future, et c'est très exactement du nationalisme au sens barrésien du mot.

 

      Si la rigueur doctrinale de José Antonio se prête à l'analyse, le sens poétique de sa conception de la Révolution est plus difficile à rendre. Nous avons déjà cité l'incantation, pourrait-on dire, à la garde phalangiste sous les étoiles, l'arme au bras. Il est dans l'œuvre de José Antonio d'autres images puissamment évocatrices, sortes de mythes poétiques qui ont certainement eu sur la jeunesse espa­gnole une prise plus directe que la rigueur du raisonnement.

      Ce sont d'abord les images du chant de la Falange, ce Cara al sol qui est né comme les chansons de geste médiévales sans qu'on en connaisse exactement l'auteur, sorte de création spontanée à laquelle on sait seulement que participèrent Augustin de Foxa, José Maria Alfaro et José Antonio lui-même :

 

Face au soleil, avec la chemise neuve

Que tu brodas de rouge hier,

La mort me trouvera si elle m'emporte,

Et que je ne te revois plus.

 

      José Antonio avait voulu un « chant de guerre et d'amour ». Il en avait défini les strophes qui devaient le composer. On y évoquerait la fiancée, le héros tombé,la foi en la victoire.

      La chemise brodée de rouge, c'est la chemise bleue des phalan­gistes, brodée des flèches rouges d'Isabelle de Castille, et la main qui a tenu l'aiguille, c'est celle de la fiancée.

 

      Et le chant poursuit :

 

Je serai à côté des camarades

Qui montent la garde sous les étoiles,

L'attitude impassible,

Et qui sont présents dans notre effort.

Si on te dit que je suis tombé,

C'est que je m'en serai allé

Au poste qui m'attend dans l'au-delà.

 

      On retrouve ici l'inspiration de la péroraison du discours de la Comédie qui évoquait déjà la « garde sous les étoiles ».

      Et maintenant le chant s'achève sur le salut à la victoire :

 

Ils reviendront victorieux, les drapeaux,

Au pas allègre de la paix,

Et cinq roses seront attachées

Aux flèches de mon faisceau.

Il rira de nouveau, le printemps

Que les cieux, la terre, la mer espèrent.

Debout légions, courez à la victoire.

Une aube nouvelle se lève sur l'Espagne.

 

      Mais la page la plus belle de José Antonio, celle qui porte le plus de profondeur, dans laquelle il y a comme une sorte de mystérieuse consigne et une prémonition aussi, fut prononcée en mai 1935 et si là grandiose simplicité de ces deux noms : José Antonio n'avait suffi sur la dalle de l'Escorial, c'est cette page qui devrait y figurer :

 

 

« Nous autres, sans ressources, avec notre pauvreté et nos difficultés, nous allons, recueillant ce qu'il y a de fécond et d'utilisable dans notre Espagne. Et nous voulons que perdure cette difficulté jusqu'à la fin et après la fin ; que la vie nous soit difficile avant le triomphe et après le triomphe. Il y a quelques jours j'évoquais dans un petit cercle un vers romantique qui dit : « Je ne veux pas le Paradis, mais le repos. » C'est un vers romantique plein de sensualité; c'est un blasphème, mais un blasphème qui repose sur une antithèse juste ; c'est certain ; le Paradis n'est pas le repos. Le Paradis est contre le repos. Au Paradis on ne peut pas être couché. On est debout comme les anges. Nous qui avons déjà conduit sur le chemin du Paradis les vies de nos meilleurs, nous voulons un Paradis difficile, dressé, implacable; un Paradis où l'on ne se repose jamais et qui ait dans l’embrasure des portes des anges avec des épées (51). »

 



http://img233.imageshack.us/img233/6412/copiedealegoriadelafalaqi7.jpg



31. José Antonio, Textos de Doctrina politica, p. 50.
32. Ibid., p. 19.
33.
Ibid., p. 240.
34.
Ibid., p. 697.
35.  Ibid., p. 317.
36. 
Ibid., p. 319.
37. Ibid., p. 336.
38. Ibid., p. 421.
39. Ibid., p. 37.
40. Ibid., p. 38.
41. Ibid., p. 44.
42. Ibid., p. 471.
43. Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,  t. IV, p. 2
44. José Antonio, Textos de Doctrina politica, p. 87.
45. Ibid., p. 870.
46. Ibid., p. 559.
47. Ibid., p. 66.
48. Ibid., p. 43.
49. Ibid., p. 391.
50. Ibid., p. 194.
51. Ibid., p. 566.

 

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19 novembre 2010 5 19 /11 /novembre /2010 16:16

Chapitre consacré à celui qui est le véritable fondateur du nationalisme moderne dans Doctrines du nationalisme de Jacques Ploncard d'Assac. Nous retrouvons dans son oeuvre les raisons qui expliquent la nécessité de défendre son identité, la dénonciation du système financier et ouvrait la voie à un nationalisme déjà social et qui n'avait pas attendu pour être radical.





 

La formule nationaliste est née presque entière de lui ; et Daudet, Barrès, nous tous, avons commencé noter ouvrage sur sa lumière.

 

Charles Maurras; L’Action française, 6 février 1937.

 

 



      Sur la fin du XXe siècle, les institutions démocratiques commen­cèrent, un peu partout en Europe, à entrer en décadence. En trente ans, les souverains de la Sainte Alliance avaient abandonné le pou­voir aux Assemblées, en trente autres années les puissances occultes et financières s'emparèrent des Assemblées.

      En France les idées de 1789 avaient déroulé leurs conséquences néfastes plus vite que dans le reste de l'Europe. Il était donc dans l’ordre des choses que la réaction s'y manifestât plus tôt qu'ailleurs.

      Mais il fallait d'abord que le pays prît conscience des périls qui le menaçaient dans l'ordre intellectuel, dans l'ordre économique et dans l'ordre politique.

 

« Quelquefois, les peuples s'éteignent dans une agonie insensible, qu'ils aiment comme un repos doux et agréable; quelquefois ils périssent au milieu des fêtes, en chantant des hymnes de victoire et en s'appelant immortels. »

 

dit Lacordaire.

      Or, la France au lieu « de rentrer en elle-même, d'essayer de guérir puisque Dieu, dit l'Écriture, a fait les nations guérissables », semblait pouvoir « finir dans l'apothéose théâtrale ».

      Tel était le jugement d'Édouard Drumont (1) qui, en cinq gros volumes intitulés Études psychologiques et sociales (2) bourrés de faits et de passion, allait dresser le bilan de la IIIe République à la fin du XIXesiècle et susciter un puissant courant d'opinion d'où sortirait le Nationalisme.

      L'intensité du mouvement provoqué par Édouard Drumont fut considérable. Tout entière axée sur un sursaut passionnel devant ce qu'il a appelé lui-même « la fin d'un monde », son action devait affecter en partie, pour des raisons historiques qui n'entrent pas dans le cadre de cette étude, la forme d'un mouvement antisémite, spontané et populaire. Mais derrière sa façade antisémite, la réaction que provoque l'auteur de la France Juive, en 1886, visait plus loin que la dénonciation de quelques banquiers internationaux juifs, et non juifs aussi d'ailleurs. En réalité, ce que Drumont avait observé, c'étaient les premiers symptômes de la malfaisance du libéralisme économique dans le sein d'une démocratie libérale.

      Dans une société politique inorganique, une économie inorganique engendrait tous les excès du capitalisme de spéculation et boule­versait profondément la société traditionnelle.

 

 

      Édouard Drumont se fit l'historien de cette « fin d'un monde ».

      Il le fit sans grand espoir, avec un pessimisme foncier, mais en apportant une méthode juste qui, à travers Barrès, Bourget et Maurras prendra sa forme définitive sous le nom d’« empirisme organisateur ».

      Drumont avait fait observer que « la Mort est un aussi grand débat que la Vie. L'Agonie est un combat comme la Naissance. La décomposition de l'être est aussi compliquée que sa formation et il faut envisager la terminaison de l’existence comme un tableau aussi coloré, aussi complexe, aussi varié, aussi mouvementé que l'existence elle­-même ».

      Et il en tirait cette conclusion :

 

« Pour savoir bien quelles conditions sont nécessaires pour que vive une Patrie, il faut regarder attentivement comment meurt un monde qui a formé peu à peu dans cette Patrie comme une agglomération de bacilles. Pour bien connaître les nécessités primordiales de l'être, il faut apprendre comment on arrive au non-être et demander à ce qui expire "ce secret de la vie" que saint Antoine, selon l'expression de Flaubert, "tâchait de surprendre, à la lueur des flambeaux sur la face des morts" ».

 

Plus tard, Barrès, Bourget surtout et Maurras mettront en termes, scientifiques cette analogie du corps social et du corps humain. Ils en tireront cette notion essentielle de la doctrine nationaliste : que la société est soumise non à la fantaisie de ses volontés, mais à des lois qu'il ne s'agit pas d'inventer, mais de découvrir.

L'essentiel de cette théorie est déjà tout entier dans Drumont :

 

« Rien n'est instructif comme de rechercher l'origine pre­mière des maladies qui lentement, mais sûrement, usent, dégradent et ruinent peu à peu l'organisme. Le terme de mort subite, en 'effet, ne peut rien dire et l'on ignore trop les élaborations énormes qu'il faut pour faire ce qu'on appelle une catastrophe soudaine. La désagrégation s'opère progressivement, mais sans hâte et dans la société, confédé­ration de tissus, les débuts du mal sont toujours lointains, Ignorés et obscurs. On tombe par où l'on penche, voilà la loi ; c'est un rien d'abord, une perturbation presque insensible, un grain de sable dans l'engre­nage puis le désordre partiel, puis les ressorts brisés et l'arrêt définitif...

« Lecadavre social est naturellement plus récalcitrant et moins aisé à enterrer que le cadavre humain. Le cadavre humain va pourrir seul au ventre du cercueil, image régressive de la gestation ; le cadavre social continue à marcher sans qu'on s'aperçoive qu'il est cadavre, jusqu'au jour où le plus léger heurt brise cette survivance factice et montre la cendre au lieu du sang. L'union des hommes crée le men­songe et l'entretient : une société peut cacher longtemps ses lésions mortelles, masquer son agonie, faire croire qu'elle est vivante encore alors qu'elle est morte déjà et qu'il ne reste plus qu'à l'inhumer ». (3)

 

      Chercher ce qui fait « pencher » la société française en ces der­nières années du XIXesiècle, tel fut l'objet de la recherche de Dru­mont. Il en trouvera la raison dans ce qu'il appellera « le faux chemin pris en 1789, un chemin au bout duquel on croyait trouver Salente et dans lequel on s'est obstiné, après n'y avoir rencontré que des désillusions, des catastrophes et des doutes » (4).

      Au « moi », à l'individualisme, il oppose les lois de l'hérédité :

 

« Un être n'est pas si simple qu'on le croirait : c'est un ensemble ; il se compose de traditions qui le rattachent à ceux qui ont vécu avant lui, de sentiments qui l'attachent aux gens qui sont du même pays que lui. Dès qu'il est dépouillé de tout cela, qu'il s'est mis hors de sa religion, hors de sa race, hors de sa patrie, il n'a plus de rapports, plus de racines, plus de place à lui dans l'organisation sociale » (5).

 

      Ce sont à peu près les termes dont se servira Barrès : « les déra­cinés », « la Terre et les Morts », Édouard Drumont mourut le 5 février 1917, en pleine guerre, à demi oublié, à demi aveugle, pauvre, probablement plus misan­thrope que jamais...

      Il avait publié six gros volumes d'études sociales et psychologiques et dirigé un quotidien: La Libre Parole. Il avait été député, exilé, emprisonné. Il avait été la figure centrale de l'Affaire Dreyfus. Il avait agité tout le petit peuple d'ouvriers, de curés de village, de petits actionnaires ruinés, d'officiers, de nobles de province restés fidèles à la terre. Il avait aidé à exprimer la révolte spontanée de ce petit peuple qui constitue le fond même des nations et où le nationalisme, dans tous les pays, ira recruter le meilleur de ses militants. C'est lui encore qui employa le premier dans son journal La Libre Parole, en 1892, l' expression national-socialisme et dans son œuvre se dessine déjà cette synthèse du national et du social qui va être la grande caractéristique des révolutions nationales du XXe siècle. Il avait fort bien distingué que la Bourgeoisie jacobine de 1793 en détruisant les Corporations avait « mis ceux qui n'allaient rien à la merci de ceux qui allaient quelque chose ».

      Il fut le photographe de la « fin d'un monde ». Il vint avec son appareil se placer au bon endroit sans souci de déranger les gens. Il choisit bien son éclairage, ne se trompa jamais sur le personnage à qui donner le gros plan.

      Il avait d'ailleurs une tête de photographe avec ses longs cheveux et ses petits yeux de myope derrière ses lunettes.

 

http://img163.imageshack.us/img163/5504/edouarddrumont2.jpg


1. La Fin d'un Monde, p. 111.
2. La France juive, La Fin d'un Monde, La Dernière Bataille, Le Testament d'un Antisémite, Sur le Chemin de la Vie, etc.
3. La Fin d'un Monde, p. 11.
4. Ibid. p. 259.
5. La Dernière Bataille, p. 142.

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6 novembre 2010 6 06 /11 /novembre /2010 08:14

Voici la première partie du chapitre consacré à José Antonio Primo de Rivera dans le livre de référence de Jacques Ploncard d'Assac, Doctrines du nationalisme.




 

Nous voulons un Paradis difficile, dressé, implacable. Un Paradis où l'on ne se repose jamais, et qui ait dans l'embrasure des portes des anges avec des épées.

 

José Antonio, 19 mai 1935.



 

 

 

1

 

      José Antonio Primo de Rivera a dominé de très haut le groupe des novateurs de la Révolution nationale espagnole. La Providence lui a fait la grâce de mourir jeune, martyr de ses idées. Il n'est pas un de ceux qui ont connu le fondateur de la Falange qui puisse l'imaginer grisonnant et une ardeur éteinte dans le regard. José Antonio, c'est d'abord une idée incarnée dans une jeunesse . Il s'est en quelque sorte dépersonnalisé. Il est resté de lui « ce nom d'empe­reur romain » gravé sur la dalle nue de sa tombe à l'Escorial et un millier de pages de doctrine et de combat.

      C'est assez pour enflammer les imaginations, émouvoir les cœurs et conquérir les esprits, indéfiniment.

 

      Vers 1920, fils aîné d'un officier général, Grand d'Espagne, étu­diant en droit, doué d'une prestance personnelle incontestable, possédant une tête « extrêmement ordonnée, dans laquelle toute chose tombait couverte ou incluse dans un système » (1), il doit normalement devenir un grand magistrat ou un maître du barreau. Sa vie paraît admirablement tracée et pourtant l'aventure est à deux pas qui entraînera le père et le fils dans une même tourmente en deux phases.

      On connaît l'histoire : le général appelé le 13 septembre 1923 par le roi Alphonse XIII qui lui confie la dictature, comme venait de le faire Victor-Emmanuel III d'Italie avec Mussolini. Ainsi les dynasties fatiguées cherchent des tribuns ou des soldats pour étayer les trônes menacés. Mais bientôt elles s'effraient de leur audace, écartent le bras qui les soutenait et s'effondrent sans gloire.

      Le 13 septembre 1923, au soir, José Antonio, soldat aux dragons de Santiago, à Barcelone, fait cadeau à ses camarades d'une guitare pour qu'ils puissent chanter allégrement « les espérances de la Patrie renaissante » (2).

      Le 22 janvier 1930, abandonné par le Roi, le général-dictateur part pour l'exil, victime de son libéralisme, sans avoir jamais songé à s'attaquer aux causes profondes du mal espagnol. Deux mois après, il meurt à Paris, rue du Bac, dans un modeste hôtel.


« Cet homme qui, s'il était fort comme un grand soldat, était sensible comme un enfant... un matin, à Paris, avec les journaux d'Espagne à la main, inclina la tête... et nous quitta pour toujours. » (3)

 

 

      C'est une des caractéristiques de la mentalité démocratique que de chercher à salir et à rabaisser ses adversaires. On dirait qu'elle a profondément assimilé l'horrible conseil de Voltaire : « Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose. »

      Et la calomnie s'abat sur la mémoire du général, sur son œuvre, sur ses anciens collaborateurs.

      Sans le savoir, par sa haine imbécile, la démocratie marquait le point exact de sa chute. Si José Antonio n'avait pas eu à défendre la mémoire de son père, il ne se fût point certainement lancé dans la politique et le cours des choses eût été autre.

      Ses frères et lui commencèrent par distribuer des paires de gifles aux calomniateurs qu'il leur arrivait de rencontrer ; ce n'est qu'en 1931, après la chute d'Alphonse XIII que José Antonio décide de poser sa candidature aux Cortès (A). Encore limite-t-il son ambition à relever les attaques de la République triomphante contre l'œuvre de son père.


« Je ne me présente pas aux élections, dira-t-il dans l'A.B.C. (B), par goût de la politique qui m'attire de moins en moins. Parce qu'elle ne m'attirai pas, j'ai passé les six ans de la dictature sans me montrer dans un ministère, sans agir en public d'aucune façon. Dieu sait que ma vocation est au milieu de mes livres ; me séparer d'eux pour me lancer dans le vertige violent de la politique me cause une véritable douleur. Mais je serais lâche et insensible si je dormais tranquille tandis qu'aux Cortès, devant le peuple, on continue à lancer des accu­sations contre la mémoire sacrée de mon père. »


      C'est le même homme qui, quatre ans plus tard, me dira dans son salon de la calle Serrano : « Monsieur, la Falange, c'est une Révo­lution ! » (4)

      Que s'est-il donc passé ?

      José Antonio, telle qu'il la conçoit, avec l'application qu'il mettait en tout, a reconnu que la politique était une chose sérieuse. L'amour filial peut arracher de beaux cris d'indignation, mais l'Espagne n'a pas besoin de discours, l'Espagne a besoin de quelqu'un qui vienne lui dire la cause de ses maux et lui indique le remède.

      L'Europe vit d'ailleurs un prodigieux moment d'activité poli­tique. Voilà dix ans que Mussolini forge dans la réalité quotidienne la doctrine fasciste, et ses œuvres, qu'on réunit en volume, cons­tituent le premier livre doctrinal du fascisme. Le Mein Kampf d'Hitler commence à courir le monde. Rosenberg, Farinacci, Mala­parte et, à gauche, Lénine, Trotsky apportent de nouvelles théories de l'État et une commune critique de la démocratie libérale.

      Tous ces ouvrages sont sur la table de travail de José Antonio comme, à la même époque, ils furent sur la table de bien des jeunes gens un peu partout. José Antonio lit aussi les traditionalistes espagnols. Balmès, Donoso Cortès, Meneildez y Pelayo et Vasquez Molla.

      II étudie les théories politiques comme il étudierait un dossier.

      Parce qu'il a l'esprit prodigieusement clair, il écarte le sophisme d'instinct et, au fond, toute l'orientation politique de José Antonio va provenir de sa rencontre avec le grand sophiste du XVIIIe siècle; Jean-Jacques Rousseau. La racine, l'élément vital, essentiel, du falangismo, c'est,la critique « joséantonienne » de Rousseau. Enlevez tout le reste, laissez seulement cela. A partir de cette critique, vous reconstruirez tout l'édifice falangiste tel que José Antonio, en quatre ans, l'a construit.

 

 

      C'est le 29 octobre 1933 qu'il prononce le discours de fondation de la Falange au théâtre de la Comédie à Madrid et ses premières paroles sont celles-ci :


« Quand en mars 1762 un homme néfaste appelé Jean-Jacques Rousseau publia le Contrat social, la vérité politique cessa d'être une entité permanente. Auparavant, en d'autres époques plus profondes, les États qui étaient exécuteurs de missions historiques, avaient inscrit sur leurs fronts et aussi sur les astres, la justice et la vérité. Jean-­Jacques Rousseau vint nous dire que la justice et la vérité n'étaient pas des catégories permanentes de la raison, mais, à, chaque instant, des décisions de la volonté.

Jean-Jacques Rousseau supposait que l'ensemble des êtres vivants en un peuple ont une âme supérieure, d'une hiérarchie différente de chacune de nos âmes et que ce moi supérieur était doté d'une volonté infaillible, capable de définir, à chaque instant, le juste et l'injuste, le bien et le mal. Et comme cette volonté collective, cette volonté souveraine, s'exprime seulement par le moyen du suffrage – conception de la majorité qui triomphe sur celle de la minorité en devinant la volonté supérieure – il en résultait que le suffrage, cette farce de petits papiers jetés dans une urne de verre, avait la vertu de nous dire à chaque instant si Dieu existait ou non, si la vérité était la vérité ou n'était pas la vérité, si la Patrie devait demeurer ou s'il était préférable, à un moment donné, qu'elle se suicide. »



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L'État libéral a été le serviteur de·cette doctrine. Pour lui la seule chose qui importait c'était que les élections « aient commencé à huit heures et fini à quatre ». Il n'y avait plus qu'à respecter ce qui était sorti des urnes « comme si rien ne l'intéressait ».

      Ce système « est le plus ruineux système de destruction d'énergies ».

      Il entraîne « la perte de l'unité spirituelle des peuples » et engendre « l'esclavage économique ». Il promit la liberté aux travailleurs, mais laissa les riches libres d'offrir les conditions qui leur plaisaient et c'est ainsi, de la nécessité d'autodéfense de la classe ouvrière que naquit le socialisme et sa naissance « fut justifiée », car il fut une « réaction légitime contre l'esclavage libéral ». Il dérailla cependant pour trois raisons : parce qu'il adopta « l'interprétation matérialiste de la vie et de l' Histoire » ; parce qu'il agit dans un sentiment de « représailles » ; parce qu'il proclama le « dogme de la lutte des classes ». Né comme « une critique juste du libéralisme économique, il nous amena, par un autre chemin, les mêmes résultats que le libéralisme économique : la désagrégation, la haine, la séparation, l'oubli de tout lien de fraternité et de solidarité entre les hommes » (5).

      Tel est l'essentiel de la critique joséantonienne. Nous verrons comment il la développa, sans jamais s'écarter de sa répudiation essentielle du rousseauisme.

 

 

2

 

      Dans son discours du théâtre de la Comédie, José Antonio tire déjà les premières conclusions de sa répudiation du sophiste de Genève :


« Les Partis doivent disparaître. Personne n’est jamais né membred'un parti politique ; par contre, nous sommes nés membres d'une famille; nous sommes tous voisins dans une municipalité ; nous pei­nons tous dans l'exercice d'un travail. Or, si ce sont là nos unités naturelles, si la famille, la municipalité et la. corporation sont les cadres dans lesquels nous vivons, pourquoi aurions-nous besoin de l'instrument intermédiaire et pernicieux des partis qui, pour nous unir en des groupements artificiels, commencent par nous désunir dans nos réalités authentiques ? » (6)


      La Falange ne sera pas seulement « une manière de penser », mais « une manière d'être ». Elle aura conscience du « sens ascétique et militaire de la vie ». Elle marchera « allégrement, poétiquement » parce que « seuls les poètes ont entraîné les peuples ». Mais les falan­gistas seront des poètes rudes, ils utiliseront la dialectique « comme premier instrument de communication », mais ils auront toujours présent à l'esprit qu'il n'y a « pas d'autre dialectique possible que celle des poings et des pistolets quand on s'attaque à la justice ou à la Patrie ».

      Et ce discours qui était un discours de candidature aux Cortès finit par cette phrase ironique : « Je crois que je suis candidat, oui, mais je le suis sans foi ni respect. » C'est que la place des falangistas est « à l'air libre, dans la nuit claire, l'arme au bras, avec au-dessus d'eux les étoiles », en train d'attendre l'aube nouvelle.

 

      La plus grande partie de l'œuvre de José Antonio Primo de Rivera est composée de discours. Ce qui caractérise son style, c'est un mé­lange d'extrême rigueur, de raisonnement et de poésie. On part en pleine dialectique et on monte dans les étoiles, on rencontre des archanges. L'imagination reçoit autant que la raison. Il n'y a aucun apprêt dans cette manière de s'exprimer. En Espagne, la poésie est un moyen d'expression presque aussi habituel que la prose et – oserai-je le dire ? – peut-être plus accessible que le raisonnement.

      Donc, le 29 octobre 1933, José Antonio Primo de Rivera s'est adressé à l'Espagne. Mais qu'est-ce que l'Espagne ?

 

      Un des apports, peut-être le plus important, de José Antonio au grand mouvement d'idées de cette première moitié du XXe siècle, c'est sa définition de l'idée de Patrie.

      Qu'est-ce donc que la Nation pour José Antonio ?

      Ce n'est pas seulement « l'attraction de la terre où nous sommes nés », ni « l'émotion directe et sentimentale que nous sentons à l'ap­proche de notre terroir », mais, dit-il une première fois aux Cortès, en 1934, « une unité dans l'universel » (7). Il complètera plus tard sa pensée sous cette forme définitive : « Une unité de destin dans l'uni­versel » (8).

 

      Si José Antonio a tellement insisté sur la définition de la Nation, c'est que c'était, en Espagne, à ce moment-là, une notion contro­versée.


« Aucun air ne nous paraît si pur que celui de notre terre, écrit-il dans une très belle page, aucune motte de gazon plus tendre que la sienne ; aucune musique comparable à celle de ses ruisseaux... Mais ... n'y a-t-il pas dans cette succion de ta terre, une sensualité empoisonnée ? »

« Elle a quelque chose d'un fluide physique, quasi de qualité végé­tale, comme si de subtiles racines nous prenaient à la terre. C'est la sorte d'amour qui invite à se dissoudre, à s'amollir, à pleurer. Celui qui se dissout en mélancolie quand pleure la gaita (le hautbois).

« Amour qui s'abrite et se replie chaque fois jusqu'à la plus secrète intimité de la région à la vallée natale ; de la vallée à l'étang où se reflète la maison ancestrale ; de l'étang à la maison ; de la maison au recoin des souvenirs...

« Tout cela est très doux, comme un vin doux. Mais il s'y cache, comme dans le vin, douce ivresse et indolence. Pouvons-nous appeler patriotisme une telle manière d'aimer ? Si le patriotisme était cette tendance affective, il ne serait pas le meilleur des amours humains. Les hommes le céderaient en patriotisme aux plantes qui le dépassent en attachement à la terre. »

Le Patriotisme doit se fixer « non dans le sensible, mais dans l'in­tellectuel », car « ce qui est sensuel dure peu ». « Ainsi, nous ne voyons pas dans la patrie le ruisseau et le gazon, la chanson et la gaita ; nous y voyons un destin, une entreprise. La patrie est ce qui, dans le monde, configure une entreprise collective. Sans entreprise, il n'y a pas de patrie ; sans la présence de la foi en un destin commun, tout se dissout en provinces natales, en saveurs et couleurs locales ». (9)

 

      Aucun doute ne reste permis. Le nationalisme que José Antonio condamne, c'est le régionalisme à tendances séparatistes, le « coin aux souvenirs » qui s'hypertrophie au détriment de la nation vraie qui est la terre et les hommes qui ont eu et ont un destin commun.

      C'est qu'il faut les trois éléments pour constituer une nation.

      Elle n’est pas « une réalité géographique, ni ethnique, ni linguis­tique ; elle est essentiellement une unité historique. Un agrégat d'hommes sur un morceau de terre n'est une nation que si elle l'est en fonction de l'universalité, si elle accomplit un destin propre dans l'Histoire ; un destin qui n'est pas celui des autres. Ce sont toujours les autres qui nous disent que nous sommes un. Dans la coexistence des hommes, je suis celui qui n'est aucun des autres. Dans la coexistence universelle, chaque nation est ce que ne sont pas les autres. C'est pourquoi les nations se déterminent de l'extérieur, on les reconnaît par les contours dans lesquels elles accomplissent un destin universel, personnel, différent ». (10)

      Et José Antonio avertit les séparatistes que s'ils se détachent de l'entité Espagne, ils ne seront pas des nations pour autant, mais « des peuples sans destin dans l'Histoire » (11).

      Il croit profondément que « la vie de tous les peuples est une lutte tragique entre le spontané et l'historique ». Vienne l'époque de la déca­dence du « sens de la mission universelle », et voilà les séparatismes qui refleurissent ; « les gens reviennent à leur sol, à leur terre, à leur musique, à leur patois », et c'en est fini de l’« Espagne des grandes époques » (12).

      L'unité de l'Espagne allait peut-être se rompre à l'époque de José Antonio. Et cette menace remettait en cause la notion même de l'Espagne. Était-elle une association de provinces, répudiable avec ou sans préavis ? Ou constituait-elle un fait historique irrévocable ?

      « L'Espagne est irrévocable », répond José Antonio. On pourra discuter au sujet de choses secondaires, mais « sur l'essence même de l'Espagne il n'y a rien à décider ». Pourquoi ? Mais « parce que l'Espagne n'est pas à nous ». « Les nations ne sont pas des contrats répudiables par la volonté de ceux qui les ont conclus : elles sont des fondations avec une substantialité. propre et ne dépendent ni de la volonté de quelques-uns, ni de beaucoup ». (13).

 

 

3

 

      José-Antonio Primo de Rivera n’a pas écrit de livre. Il a parlé, il a plaidé, mais le seul essai qu’il ait composé, c’est précisément un Essai sur le nationalisme. C’est dire l’importance qu’il attachait à la définition de l'idée nationale. Or, dès les premières pages, avec qui le trouvons-nous aux prises ? Avec Jean-Jacques Rousseau. Il montre comment « la thèse romantique des nationalités » est née de « la foi en la bonté naturelle de l'homme » prêchée par Rousseau : « De même que la société était une chaîne d'individus libres et bons, les architectures historiques étaient l'oppression des peuples spontanés et libres. Il importait donc de libérer les peuples comme les individus. »

      Or, le danger de cette thèse romantique était de conduire à la « déqualification », c'est-à-dire « à la suppression de tout ce qui avait été ajouté par l'effort (Droit et Histoire) aux entités primaires, indi­vidu et peuple. Le Droit avait transformé l'individu en personne ; l’Histoire avait transformé le peuple en polis, en régime d’État ».

      De même que « la véritable unité juridique est la personne, c'est-­à-dire l'individu considéré non dans sa qualité vitale, mais comme porteur actif ou passif des relations sociales que le Droit règle », de même « le peuple dans sa forme spontanée n'est rien d'autre que le substratum de la société politique. Il convient déjà d'user pour se comprendre du mot nation qui veut dire justement : la société politique capable de trouver dans l'État sa machine opérante. » Et l'Essai rejette les nationalismes qui ont conçu la nation « sans référence à un pro­cessus historique » comme déterminée par le seul «« spontané » et José Antonio revient à son image de la « sensualité » d’une telle concep­tion. Il y voit « un appel sensuel, qui se perçoit jusque dans l'odeur du sol : un courant physique, primitif, et éblouissant, semblable à l'ivresse et à la plénitude des plantes à l'époque de la fécondation ».

      Il s'interroge alors : « Comment donc revivifier le patriotisme dans les grandes unités hétérogènes ? »

      Il revient à la différence qu'il a soulignée entre individu et per­sonne. De même, écrit-il, que la personne est l'individu considéré en fonction de société, la nation est le peuple considéré en fonction d'universalité.

« La personne – et nous arrivons au centre même de la conception joséantonienne de la Nation – n’existe pas en tant que blonde ou brune, grande ou petite, parlant cette langue ou telle autre, mais en tant que porteuse de telles ou telles relations sociales déterminées. On n'est personne que dans la mesure où l'on est autre ; c'est-à-dire : un en face des autres, possible créancier du débiteur vis-à-vis des autres, titulaire de positions qui ne sont pas celles des autres. La per­sonnalité ne se détermine donc pas du dedans, mais du dehors comme porteuse de relations. De la même manière, un peuple n'est pas une nation par aucune sorte de justifications physiques, couleurs ou particularités locales, mais pour être autre dans l'universel ; c'est-à-dire pour posséder un destin qui n'est pas celui des autres nations. Ainsi, tout peuple, ou tout agrégat de peuples, n'est pas une nation, mais seulement ceux qui accomplissent un destin historique différencié dans l'universel. Il est donc superflu de savoir si une nation correspond à une unité géographique, raciale ou linguistique ; l'important est d'établir s'il existe pour elle, dans l'universel, une unité de destin historique. »

      Et il se réfère à l'Histoire : les « temps classiques » ont parfaitement eu conscience de cela, c'est pourquoi ils emploient, de préférence à « patrie » ou « nation », les expressions « Empire » ou « service du roi », « c'est-à-dire des expressions allusives à l'instrument historique ». Le mot « Espagne » est « par lui-même l'énoncé d'une entreprise ».

 

 

      L'Essai arrive maintenant à sa conclusion. C'est l'exposé de la lutte entre « le spontané et le difficile », et il conseille de « donner pour support au patriotisme non l'affectif, mais l'intellectuel » et de faire du patriotisme « une vérité aussi indiscutable que les vérités mathématiques ». L’Essai s'achève sur ces mots : « Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît pas, mais l'intelligence a aussi sa manière d'aimer comme parfois ne sait pas le faire le cœur » (14).

      José Antonio d'ailleurs ne voit pas d'objection à la « diversité législative » suivant les provinces, mais il exige qu'elle soit « bien assise sur la base sans équivoque de la conscience de l'unité de destin » (15).

 

 

      De cette conception de la nation comme un peuple et un destin vont sortir des conséquences importantes pour la conception de l’État. Structure de la Nation, il ne saurait être considéré comme « l'exécuteur de la simple volonté populaire », mais comme celui du « destin du peuple » (16).

      Ce « destin du peuple », c'est « l'idéal héréditaire » dont parlait Barrès (17). Une nation qui en a perdu le sens, cesse de persévérer dans son « existence propre ». Ce destin, cet idéal sont donc au-dessus de la volonté des individus composant la nation à un moment déterminé de son histoire et c'est en référence à ce destin et à cet idéal que doit s'ordonner l'État.

      Cette notion, il se peut que la nation l'ait perdue ou qu'elle se soit plus ou moins obscurcie. L'important, c'est qu'elle ait « subsisté dans un certain nombre de cerveaux » (18). Ce sont eux, alors, qui représentent vraiment la nation à ces moments d'éclipse du sens national.

      C'est que l'homme a reçu sa nation – donc sa tâche, sa mission – dès l'instant de sa naissance. Il l'a reçue comme « un héritage et une grâce de la nature et de Dieu » (19). « Dieu nous a fait fils d'un certain peuple » (20) comme il nous a donné des grâces en plus ou moins grandi nombre que nous devons utiliser pour l'accomplissement de notre destin éternel et dans l'économie générale de ce monde.

      D'où l'extrême importance de l'État, car c'est lui qui, agissant dans l'Histoire, est le réalisateur du destin du peuple. On pourrait dire avec Gentile ( 21) que c'est lui qui fait la nationalité dans le sens où la vie étant lutte, le simple maintien de la nation consiste à la « faire » chaque jour contre tout ce qui tend à la défaire.

      C’est, en définitive, une longue nécessité historique réalisée par l'État qui crée la nation et détermine sa mission. Il s'agit d'un grand dessein conçu par une dynastie rassembleuse de peuples qui ont fini par former une nation. C'est-à-dire une pensée et une réali­sation historique en action. Aussi les nations ne se maintiennent-­elles que tant qu'elles maintiennent les principes qui les ont fait naître.

      Quant au substratum racial de la Nation, il se produit généralement ceci : que le rassemblement de peuples opéré par une dynastie aboutit à créer une ethnie et qu'ainsi l'ethnos qui n'était pas la raison de l'existence de la nation, devient un puissant argument pour sa conservation. Mais la conception raciste de la nation aboutit en fait à une congélation de l'Histoire à un moment donné de l'évolution politico-historique des États.

 

 

4

 

      Ainsi envisagée, la Nation ne saurait se contenter d'un État représentatif. Il lui faut un État-guide.

      L'opposition Peuple-État est d'ailleurs fictive selon la conception phalangiste : « Un peuple complet est toujours un peuple et son chef » (22). Et selon la très belle image de Luis de Arrese, « quand dans l'Histoire coïncident un peuple et un héros capable de le comprendre et de le féconder, ils se cherchent – parfois, comme en Espagne, à travers le sang – et finissent toujours par se rencontrer et s'étreindre » (23).

      Le peuple est un merveilleux instrument de sa propre grandeur, mais José Antonio estime que « l'idée ne peut surgir du peuple », car « le système, c'est l'homme ». C'est là, estime-t-il, « une des pro­fondes vérités humaines que le Fascisme a remis en valeur : Le XIXe siècle a passé son temps à imaginer des machines à bien gou­verner. Autant se proposer de fabriquer des machines à penser ou à aimer. Rien d'authentique, d'éternel, de difficile comme gouverner, n'a pu se faire à la machine ; toujours il a fallu avoir recours en der­nière analyse à celui qui, depuis l'origine du monde, est l'unique appareil capable de diriger les hommes : l'homme. C'est-à-dire le Chef. Le Héros. » (24).

 

 

      La notion de chef est essentielle dans la doctrine de José Antonio.

      Un peuple ne saurait s'en passer. « Le Chef ne doit pas obéir au peuple, il doit le servir, ce qui est différent ; le servir, c'est ordonner l'exercice du commandement pour le bien du peuple... même si le peuple méconnaissait quel est son bien, c'est-à-dire se sentir d'accord avec le destin historique du peuple, même s'il diffère de ce que la masse désire » (26).

      José Antonio a achevé la courbe de son raisonnement antirous­seauiste. L'addition – d'ailleurs truquée – des volontés indivi­duelles ne constitue pas le destin d'un peuple. Il est au-delà de ces vues individuelles, fragmentaires, impressionnées par l'intérêt individuel immédiat ou l'image qu'elles s'en font. Le destin du peuple préexiste à l'individu et lui survit. Le Chef doit en être l'interprète et l'exécuteur. Il n'est pas plus indépendant d'ailleurs vis-à-vis du destin du peuple que l'individu lui-même, c'est pourquoi José Antonio se refuse à « diviniser l'État ». Au contraire, il lui assigne le rôle « d'instrument au service d'une mission historique d'unité » (28).


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      Définie la Nation, défini l'État, reste à définir la révolution qui rétablira la Nation et l'État dans leurs normes traditionnelles.

      José Antonio est un révolutionnaire. J'entends : ce n'est pas un réformiste, il ne croit ni à la lente conquête du pays par la propa­gande électorale, ni aux alliances politiques. Quand les « démocrates-chrétiens » de Gil Roblès ont remporté la victoire électorale de 1933, José Antonio l'a appelée « la victoire sans ailes ». Elle fut, dit-il, « la fille de la peur ». Les partis ne se sont groupés que par peur de l'ennemi commun, « ils n'ont pas vu que face à une foi attaquante, il faut opposer une autre foi combattante et active et non un dessein inerte de résistance » (27).

      Les événements devait lui donner totalement raison et les exemples historiques sont nombreux de ces « victoires sans ailes ».

      Mais une difficulté se présente pour le révolutionnaire, c'est que « la masse d'un peuple qui a besoin d'une révolution, ne peut faire la révolution ». On ne peut éviter l'objection et José Antonio, loin de l'éluder, pose parfaitement le problème : « A la fin d'une période historique stérile, quand un peuple, par sa faute ou celle d'autrui, a laissé rouiller tous les grands ressorts, comment va-t-il mener par lui-même l'immense tâche de se régénérer ? »

 

« Pour être féconde, une révolution exige la conscience claire d'une règle nouvelle et une volonté résolue pour l'appliquer, mais cette capa­cité de voir et d'appliquer la règle est justement le signe de la per­fection. Un peuple effondré est incapable de percevoir et d'appliquer la règle : son désastre réside justement là. Avoir les ressorts nécessaires pour mener à bien une révolution féconde est le signe inéquivoque que la révolution n'est pas nécessaire. Et, au contraire, avoir besoin de la révolution, c'est manquer de la clarté et de l'élan nécessaires pour l'aimer et la réaliser. En un mot, les peuples ne peuvent se sauver en masse eux-mêmes parce que le fait d'être apte à réaliser le sauvetage est la preuve qu'on est sauf. Pascal imaginait que le Christ lui disait : « Tu ne me chercherais pas si tu ne m'avais déjà trouvé. » Le génie des révolutions pourrait dire la même chose aux peuples » (28).

 

      D'où il résulte que dans les moments prérévolutionnaires, jamais le peuple n'a paru si bas, si désespéré, si enclin au suicide comme s'il trouvait dans son propre effondrement une réponse apaisante à l'insoluble dilemme. Il est évident que dans un tel état moral, « la masse ne peut deviner sa forme future ni l'aimer d'avance ». « désespoir de la multitude » peut tout au plus renverser ce qui existe et ouvrir le chemin de l'état prérévolutionnaire au révolutionnaire. C'est-à-dire, offrir une occasion. « Si en cette occasion n'apparaît pas l’homme, la révolution est perdue » (29).

 

 

      Quand on étudie les grands mouvements révolutionnaires de l'Histoire, on mesure toute la profondeur de cette analyse de José Antonio. L'effondrement de l'empire russe ne· se produisit que le jour où se rencontrèrent l'occasion et l'homme. Vingt autres occasions s'étaient présentées depuis 1905. La rencontre ne s'était pas produite avec l'homme. César Borgia, le « Prince » de Machiavel, fut au contraire, lui, l'exemple de l'homme à la recherche des circonstances et qui les manqua toutes.

      Cette liaison entre la politique et lei facteur « temps » a très vive­ment frappé José Antonio. « La politique, dit-il, est une partie avec le temps dans laquelle il n'est pas permis de retarder le jeu. En poli­tique, il est obligatoire d'arriver à l'heure juste. Le binôme de Newton représenterait la même chose pour les mathématiques s'il avait été formulé dix siècles plus tôt ou un siècle plus tard. Par contre, les eaux du Rubicon devaient mouiller les sabots du cheval de César à une minute exacte de l'Histoire » (30).

 

 


 

 

1. Serrano Surrer in Felipe Ximenez de Sandoval, José Antonio, p. 36.
2. Op. cit. p. 51.
3. José Antonio Primo de Rivera, Textos de doctrina politica, p. 36.
(A) La chambre des Députés en Espagne.
(B) Quotidien espagnol de droite.
4. Sandoval, op. cit., p. 101.
5. José Antonio, op. cit., p. 61 à 66.

6. Ibid., p. 66.
7.  Ibid., p. 110.
8.  Ibid., p. 789.

9. Ibid., p. 111.
10. Ibid., p. 99.
11. Ibid., p. 100.
12. Ibid., p. 190.
13. Ibid., p. 282.
14. Revue J.O.N.S., 16 avril 1934.
15.José Antonio, op. cit.,  p. 380
16. José Luis de Arrese, Escritos y discursos, p. 221.
17. Maurice Barrès, L'Appel au soldat, t. II, p. 146.
18. Maurice Barrès, Scènes et doctrines du nationalisme, p. 120.
19. Pierre Boutang, Aspects de la France, 3 avril 1954.
20. Pierre Debray, Aspect de la France, 24 décembre 1954.

21. Giovani Gentile, Struittura delle Societa, p. 57.
22. Luis de Arrese, op. cit., p. 64.
23. Ibid.
24. José Antonio, préface à l'édition espagnole d'Il Fascismo de Benito Mussolini.
25. José Antonio, Textos de Doctrina politica, p. 659.
26. Ibid. p. 105.
27. Ibid. p. 840.

28. Ibid. p. 657.
29. Ibid. p. 666.
30. Ibid. p.743.

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19 octobre 2010 2 19 /10 /octobre /2010 14:14

La pensée nationaliste transcende les idéologies

      Désigner le nationalisme comme une idéologie de droite, ou plus à droite que libéralisme réputé de droite parce que défendant la propriété par opposition au socialisme qui serait de gauche parce que collectiviste, est simplificateur et sans objet. Le nationalisme est d’abord une pensée droite, qui recherche la droiture, en ce sens que la pensée nationaliste s’efforce de s’ancrer sur le socle stable du réel, de le serrer au plus près, recherchant la roche dure au lieu de se contenter de quelque sol incertain mais porteur de mirages. D’ailleurs, dans nombre de métiers manuels, à commencer par la menuiserie, on recherche l’ordre, la droiture : le premier souci d’un menuisier n’est-il pas de dresser une planche, de la dégauchir, autrement dit de la rendre droite, utilisable?
      Certains éléments des idéologies de droite paraissent se retrouver dans le nationalisme, comme le respect de la liberté d’entreprendre, du droit de propriété ; mais d’autres éléments réputés de gauche, comme le souci de la solidarité, autre appellation de la nécessaire cohésion communautaire, sont aussi des éléments de la pensée nationaliste. A cela, rien d’étonnant : le nationalisme les transcende dans la recherche du bien commun national et du renforcement de la puissance de la nation ; il donne un contenu autrement plus riche que celui communément développé par les tenants de ces idéologies. Les notions de droite et de gauche n’ont en effet de sens qu’autant qu’elles sont issues de l’éclatement de la société droite, traditionnelle, informée par la Révélation chrétienne, à la suite de son incapacité, à partir de la Renaissance des XVe et XVIe siècles, à actualiser son principe au fil du développement de la société chrétienne d’Europe. La gauche est en effet l’expression dévoyée des carences de la pensée et de la société européennes traditionnelles à un moment de leur développement ( notamment aux XVIIe et XVIIIe siècles), la droite n’étant ensuite que la continuation toujours plus altérée de cette tradition dans la mesure où elle s’est construite défensivement en réaction à la pensée de gauche.

      Explicitons ce caractère partiel des idées dites de droite et dites de gauche. Par exemple, le droit de propriété libéral, tel qu’il fut dès le XIXe siècle théorisé entre autre par le juriste Daunou, n’est plus qu’un droit, celui de faire ce que l’on veut de son bien. La pensée nationaliste, soucieuse du tout national, reprenant en cela la pensée traditionnelle, telle que l’a énoncée Saint Thomas d’Aquin après Aristote, reconnaît le droit de propriété mais grevé des devoirs qui incombent au propriétaire. Comme le rappelait encore Quesnay, le physiocrate bien connu au XVIIIe siècle, un propriétaire foncier qui laisse en friche son bien, ne concourant donc pas à la richesse commune, n’est plus fondé à faire valoir son droit de propriété.
      Dans le domaine de la solidarité, de la prise en compte de la cohésion sociale, le nationalisme, là encore, dit tout autre chose que les intellectuels gauchistes : il se réfère à la notion de caritas, théorisée par St Thomas d’Aquin notamment, cette charité au contenu bien plus riche que la simple distribution d’aumônes à laquelle on l’a réduite. Il ne s’agit pas de dépouiller l’un d’une manière vengeresse pour habiller l’autre, d’ériger l’envie et la jalousie comme moteur d’action, mais d’avoir le souci de bienveillance envers son prochain, envers ses concitoyens. Il suit que la préoccupation sociale vise avant tout le bien commun lequel passe, outre le souci de cohésion sociale par la volonté de faire bénéficier chaque membre de la communauté nationale des fruits de l’effort et de l’enrichissement de la nation. Elle respecte la personnalité de chacun dans sa totalité. Se fondant sur l’observation expérimentale de l’ordre universel et non pas sur des postulats idéels intellectualisés, la pensée nationaliste prend en compte à ce titre le fait national mais aussi ce phénomène réel qu’est la lutte inévitable entre chaque nation, entre chaque peuple, lutte qui n’est pas nécessairement militaire mais qui s’exprime en termes de rapports de forces, constituant un équilibre dynamique, remis en cause à chaque instant, de manière imperceptible mais produisant de grands effets sur le long terme, faisant que, inévitablement celui qui s’affaiblit est dominé par plus fort que lui.

      Dans le contexte contemporain, le nationalisme vise à instruire les citoyens de leur histoire, à redonner la fierté d’être à chaque peuple, à lui faire refuser toute abdication de sa personnalité et de sa souveraineté qui mettrait son existence en péril. Pour cela il rejette et combat sous toutes leurs formes, les entreprises de subversion des fondements de sa personnalité et de son être : ainsi, à notre époque, il dénonce et combat la permissivité illimitée en matière de morale et de mœurs qui dégénère en une culture de mort avec pour emblème l’avortement, crime qui délégitime à lui seul tous les régimes qui le légalisent et même l’encouragent comme c’est le cas de l’État républicain français. Il prône et œuvre à la restauration des piliers sans lesquels aucune société saine ne peut être établie solidement et durablement.


L’intemporalité du nationalisme

      En fait, s’il revêt des formes propres à chaque époque de l’histoire, le nationalisme n’a pas d’âge. Il n’est pas une « troisième voie », expression typiquement fabienne et maçonnique : il est la voie du réalisme, la seule voie qui tienne en politique et plus généralement dans la conduite de la vie. Même s’il n’apparaissait pas en tant que tel, en tant que concept parfaitement identifié et dénommé, ce que nous appelons à la suite de Maurice Barrès le nationalisme a été le souci de tous les chefs d’Etat dignes de ce nom, à commencer par nos rois de France, même si les dernières décennies de l’Ancien régime ont souffert d’une ossification sociale terreau de la funeste Révolution française ; le souci d’assurer le bien commun, de veiller à la cohésion et à la bonne marche de la société et du peuple à la tête desquels ils se plaçaient et dont ils incarnaient l’être n’est ni libéral, ni socialiste : il est par essence nationaliste. Leur tâche était de maintenir en état de fonctionnement et améliorer si besoin était ce que nous pouvons désigner sous l’appellation de système immunitaire de la nation et de l’Etat, à savoir, assure l’ordre public, la sécurité des frontières par toute mesure appropriée, développer l’identité de la communauté nationale en encourageant les arts et la culture se développant à partir du tronc d’une tradition civilisationnelle immémoriale et unique qui en constitue la substance de la personnalité.
Pour ce faire, selon la terminologie usuelle, il fallait être conservateur dans certains domaines, être révolutionnaire ou réformateur dans d’autres. Ainsi, en économie, il fallait tantôt encourager ce que d’aucuns appelleraient le libéralisme en dissolvant les scléroses qui tendaient à paralyser la vie sociale et l’activité économique, tantôt prendre des mesures interventionnistes et sociales pour éviter que ne se déchire le tissu social. Tel est le souci des nationalistes que nous sommes pour les temps présents et futurs. Le nationalisme et la tradition Intemporel dans sa nature, le nationalisme se réfère à la tradition, plus encore s’inscrit dans la tradition ; il est d’essence traditionnelle.
      Toutefois, devant les différentes interprétations du concept de tradition, il paraît indispensable d’en préciser le sens.

      Bien souvent, les traditionalistes rapportent le présent au passé. Ce n’est pas sans raison : comment comprendre le présent et envisager l’avenir si l’on fait abstraction du passé ? Le nationaliste ne fait pas table rase du passé : il construit l’avenir en s‘appuyant sur le socle ainsi formé. Or la tradition n’est pas circonscrite au passé. Elle est bien plus que cela. La tradition est atemporelle ; elle ne s’identifie pas à ce qui est ancien mais à ce qui est permanent. Elle n’est pas le contraire de la nouveauté, de la modernité ; elle est le cadre dans lequel doivent se réaliser les « novations » pour être bénéfiques et constructives. La tradition n’est pas un état mais un processus créateur, une réalité vivante. Il ne s’agit pas de restaurer quelque état antérieur disparu corps et bien comme les hommes qui l’ont produit mais de donner une forme s’inscrivant dans l’époque qui est la nôtre, à ce qui est de toujours.
      Par exemple, ce n’est pas être traditionaliste mais passéiste que de vouloir conserver ou rétablir des usages, des modes de vie caractéristiques d’une époque donnée, telle celle du second empire, ou plus près de nous ce qu’on a appelé la Belle époque, au motif que cette époque était moins décadente que la nôtre et qu’on l’idéalise à l’aide de quelques cartes postales. Il ne faut pas confondre la tradition et la nostalgie d’un temps révolu et les principes éternels qui sous-tendent une société saine et insufflent l’âme caractéristique et unique d’un peuple au travers des âges.

      On peut comparer un peuple, une nation à un édifice corallien qui n’est grand que par la conjonction de la grandeur du travail accompli par les générations coralliennes disparues et du labeur de la couche supérieure, vivante qui continue à en édifier les structures selon des aspects qui leur sont propres mais en respectant la structure inhérente à leur construction sans laquelle le récif meurt, devient fossile.
      C’est de cette référence à ce qui a été accompli, aux règles éternelles sans lesquelles aucune société saine et durable ne peut exister que les esprits malveillants ou aveuglés usent pour discréditer les nationalistes, ceux qui veulent poursuivre la construction de l’édifice culturel et civilisationnel en dignes héritiers de leurs plus grands prédécesseurs. C’est s’appuyer sur les épaules des géants qui nous ont précédé pour s’élever plus haut encore. « Du passé faisons table rase » n’est pas un principe novateur et constructif ; c’est une maxime de néantification du réel, de régression, de refus du savoir accumulé expérimentalement au cours des âges ; c’est l’expression de l’orgueil de l’homme se prenant pour un Dieu alors qu’il n’est qu’un élément de l’ordre universel aux lois duquel il est soumis.


Rétablir l’ordre naturel de la vie

      Le nationalisme n’est pas, comme on le laisse accroire complaisamment, l’individualisme des peuples. Il est une conception privilégiée de l’homme à l’univers. Tout nationaliste sait que la nation dont il est membre est constitutive de l’ordre universel et notamment de l’humanité faite d’une pluralité de peuples et de nations. Chacun doit aimer la nation dont il est le fils et par l’intermédiaire de laquelle il atteint à l’universel. De même que naturellement on aime ses parents plus que ceux des autres sans pour autant les mépriser et les haïr, il est dans l’ordre du monde d’aimer sa nation plus que toute autre nation étrangère, sans pour autant la mépriser et la haïr. Aimer sa nation, l’aider à grandir ne signifie pas adopter une attitude arrogante envers les autres peuples, refuser a priori toute relation pacifique avec eux.
      Affirmer sa personnalité ne veut pas dire que l’on nie ou abaisse celle des autres. Mais cela implique que l’on sache la promouvoir légitimement ,la faire respecter par tout moyen approprié, sans oublier ses droits et ses devoirs vis à vis de l’ordre créé.

      Aujourd’hui, on fustige le nationalisme comme étant un extrémisme. Là encore, il s’agit d’un faux débat, d’une présentation erronée du nationalisme, volontaire ou involontaire. Le nationalisme n’est ni extrême ni modéré : parce qu’il est réaliste, il est rigoureux. De même qu’un travailleur ne peut réussir dans sa tâche qu’en étant respectueux ne serait-ce que des règles élémentaires sans lesquelles rien de bien n’est réalisable, une nation ne peut être forte et souveraine qu’autant que ses dirigeants et ses membres agissent avec droiture, rigueur et sérieux. Toute critique du nationalisme n’est rien d’autre que le refus de ces valeurs, de ces vertus, quand il ne s’agit pas de faire, par quelque côté que ce soit, si faiblement soit-il, l’éloge du laxisme rebaptisé libéralisme ou tolérance. Tout cela s’entend relativement aux faiblesses propres à la nature humaine et à l’imperfection de nos constructions humaines, car il ne s’agit pas non plus de verser dans le puritanisme pervers qui est le contraire du pragmatisme inséparable de toute attitude concernant le règne du vivant. Être nationaliste n’est rien d‘autre qu’agir de manière pragmatique et sans dogmatisme pour maintenir ou rétablir l’ordre des choses tel qu’il doit être.
      Aussi, les nationalistes se trouvent aujourd’hui à la pointe du combat pour la survie de la civilisation, à commencer par la civilisation européenne et chrétienne. Les nationalistes français, en œuvrant à la défense et à la renaissance de la France si gravement menacée, concourent à cette action salutaire.

André Gandillon.

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16 octobre 2010 6 16 /10 /octobre /2010 14:14

       La seule manière d’appréhender et de comprendre le réel est de s’en tenir aux faits. Nous devons toujours nous efforcer de voir le monde tel qu’il est en évitant d’en déformer la perception à travers le prisme de nos rêves ou de nos fantasmes. C’est à partir de ce seul réalisme que nous serons en mesure d’établir une connaissance solide du monde qui nous entoure, des multiples et complexes phénomènes qui l’animent et en modifient sans cesse le visage et le contenu.


Le fait national, réalité incontournable

       Dans l’ordre du réel, relativement à l’être humain, il existe un fait incontournable, sans lequel aucune pensée sociologique et politique sérieuse ne peut être construite : le fait national, qui s’identifie sous différentes formes selon les âges et les lieux.
       Aussi loin que l’on remonte dans l’histoire, nous constatons l’existence de groupes humains, de sociétés humaines, ayant chacun et chacune une identité propre, distincte et unique, développant une culture et une civilisation inimitables. Dès la plus haute antiquité, on distingue les pôles civilisationnels sumérien en Mésopotamie, chinois avec la vallée de la Wei, égyptien, indien avec la civilisation de Mohendjo Daro, indo-européen, pour ne citer que les plus importants et les plus connus. Plus nous avançons dans le temps, plus nous observons une diversification des sociétés humaines affirmant une personnalité spécifique, phénomène qui n’est rien d’autre que la manifestation saine de la force vitale propre au monde animé. Il n’est que de considérer le nombre immense de peuples cités par les auteurs de l’Antiquité gréco-romaine, depuis les Hyperboréens au nord jusqu’aux « faces brûlées », les Aetiopes, au sud, ou encore des tribus celtes d’Irlande aux peuplades d’Asie centrale, Alains et autres Gépides ou Huns Hephtaliques.
      De cette multitude de peuplades et de peuples ont émergé et continuent d’émerger des entités plus solidement et durablement constituées. Elles alimentent au fil du temps et des événements une conscience de plus en plus développée et aiguë de leur spécificité identitaire, laquelle atteint son développement maximum et sa perfection lorsque le peuple ainsi formé, organisé en une société structurée et inévitablement hiérarchisée se constitue en Etat, autrement dit existe par elle-même, se suffit à elle-même, en toute indépendance par rapport aux peuples et populations qui le voisinent.


Qu’est-ce que la nation ?

      Ainsi se constitue une Nation ; elle unit des hommes sentant dans leur coeur qu’ils sont un même peuple parce qu’ils ont une communauté d’idées, d’intérêts, d’affections de souvenirs et d’expérience. Réalité historique, la nation est une unité historique différenciée dans l’universel par ses propres identité et unité de destin. Communauté de destin dans l’universel, selon la formule de José Antonio Primo de Rivera, la nation existe comme une entité organique dont la vie et la santé de chacune des parties complémentaires et indispensables les unes aux autres, dépend de la totalité, l’existence de cette dernière étant réciproquement tributaire de la vie de chacune de ces parties constitutives. Dans une nation, on se sauve ensemble ou on périt ensemble.
      Toute nation s’est animée dans le passé en sachant accomplir des missions universelles, dans la mesure où la culture qu’elle développe est une expression particulière réfléchie, pensée de l’ordre universel ; elle vivra dans l’avenir en en accomplissant d’autres, animée par la foi et la légitimité de son existence et de  ses actes. Détruire la mission d’une nation, affaiblir la foi en sa légitimité, vouloir n’en faire qu’un fait relatif et contingent, c’est-à-dire refuser le devoir qui naît aujourd’hui de l’oeuvre d’hier, revient à la détruire. Synthétisée dans le sentiment de patrie, la nation est une unité totale, organique où s’intègrent tous les individus et tous les corps intermédiaires, tant des générations présentes que passées, le patrimoine spirituel et culturel de ses membres. Elle ne peut être confondue avec cette idée de nation artificielle, constructiviste, nominaliste et individualiste issue des principes de 1789.
      Cette réalité nous l’éprouvons en nous-mêmes. Lorsque nous naissons, nous ne sommes pas seulement un être humain ; nous naissons comme Français, comme Allemand, comme Espagnol... selon l’origine de nos parents. Même âgés de quelques secondes, en poussant notre premier vagissement, nous sommes vieux de siècles de culture, de civilisation. Nous avons l’âge de la civilisation que nos aïeux ont édifié à force d’intelligence, d’efforts, de sueur et de sang. Au-delà de l’hérédité génétique qui est propre à chacun de nous, notre personnalité ne peut s’épanouir pleinement et harmonieusement qu’à l’intérieur de l’ensemble communautaire national dont nous sommes issus. Plus encore, nous ne pouvons atteindre à l’Universel que par la médiation de la nation, de notre culture nationale, incarnation particulière en quelques sorte de l’Universel.

      Face aux étrangers, face à ceux qui ne sont pas membres de notre communauté nationale, nous existons certes en tant que personne, mais nous existons aussi en tant que membre de notre communauté civilisationnelle.
      Nous constituons et représentons aux yeux des étrangers à la fois une parcelle et la totalité de la nation dont nous sommes membres. Notre sort, notre destin, la souveraineté de notre personne, autrement dit de notre liberté d’être et d’agir, sont liés au sort, au destin et à la souveraineté de la nation dont nous sommes les enfants : que cette nation soit asservie et notre personnalité sera brimée, privée de son total épanouissement en tant que telle. Et renierions-nous nos origines qu’il nous faudrait adopter aussitôt une autre culture, nous affilier à d’autres origines : nous ne pouvons échapper au fait identitaire, au fait national. Personne ne peut faire abstraction de son identité culturelle et civilisationnelle.
      De toutes les libertés humaines, la plus précieuse est l’indépendance de la patrie écrivait Maurras. En effet, c’est seulement à travers cette indépendance que peuvent être garanties : la sécurité des biens et des personnes, le développement et l’accomplissement total de la personnalité de chacun, la préservation du patrimoine moral et intellectuel qu’il nous appartient de faire fructifier.

      Que l’on détruise les nations, comme certaines organisations apatrides et mondialistes tentent de le faire, - l’Euroland maastrichien en étant objectivement le relais pour l’Europe : du magma informe qui en résulterait, surgiraient de ce chaos de nouvelles différenciations culturelles civilisationnelles, selon le lieu, l’histoire spécifique de chaque groupe humain vivant en un lieu et dans des conditions déterminées.
      Le fait national, même s’il n’a pas toujours revêtu la même forme et la même appellation qui sont les siennes depuis le XIXe siècle, est donc une réalité dont on ne peut faire abstraction, de même que l’on ne peut dans l’ordre des sciences physiques ignorer la réalité de la pesanteur ou de l’attraction universelle. Pour sa part, le christianisme considère les nations comme faisant partie de la condition de l’humanité et la Bible, dès le récit de la Genèse évoque l’histoire de la Tour de Babel, symbole d’une humanité mélangée, comme une malédiction pesant sur les hommes et dont un célèbre tableau de Breughel l’Ancien nous donne l’image.


Qu’est-ce que le nationalisme ?

      Dès lors, le nationalisme est une ligne de conduite s’efforçant en permanence de résoudre chaque question, chaque problème, par rapport à la nation.
      Cela consiste à traiter chaque sujet en fonction d‘un seul critère : assurer le bien commun de la nation sous tous les aspects que celui-ci peut revêtir. Le nationaliste est celui qui conduit sa réflexion en se demandant à chaque instant : est-ce que telle décision, telle attitude est bonne pour une nation ? Si d’un point de vue mystique et poétique, transcendantal, le nationalisme est l’amour de l’éternelle et inébranlable métaphysique d’une nation, de son être intime, sous une acception personnelle, le nationalisme se rapporte à la volonté de se donner les moyens de maintenir ou de créer les conditions permettant d’assurer la pleine souveraineté et l’entier développement de notre personne aux fins de la réalisation de ce en vue de quoi nous avons été créés, d’assurer la sécurité et l’épanouissement de notre famille et en premier lieu de nos enfants, de se soucier de leur devenir, en ayant conscience de n’être que l’usufruitier d’une richesse dont nous sommes les dépositaires et les continuateurs le temps de notre vie.

      Il est cette pensée, cette philosophie qui affirme l’intégrité de notre personne, physiquement et spirituellement, et par conséquent œuvre par tous les moyens appropriés à assurer la pérennité de la nation dont nous sommes membres, celle-ci étant le cadre, l’écrin sans lequel l’intégrité de notre personne est menacée. Autrement dit, le nationalisme apparaît comme une pensée prônant la volonté de défendre l’être de son pays, la volonté de lui donner les moyens de renforcer sa puissance et sa grandeur afin de transmettre à nos descendants l’héritage que nous avons reçu en usufruit, plus grand, plus beau, plus solide que nous l’avons reçu. Le nationalisme est l’expression même de la force vitale de chaque citoyen conscient de son identité et de toute nation désireuse de se propulser dans l’avenir en s’appuyant sur les fondements solides du passé qui l’ont amené à être ce qu’elle est présentement. Le nationalisme est l’ensemble des forces de vie qui s’opposent à celles qui visent à détruire la nation.
      Dès lors, être nationaliste c’est être réaliste. Et le nationalisme, la pensée nationaliste sont éminemment réalistes, ne peuvent être que réalistes, ne prenant en compte que les seuls faits et expériences avérés. Par conséquent, la vérité étant selon la définition traditionnelle l’adéquation de la pensée au réel, la pensée nationaliste est éminemment vraie, elle est la pensée de la vérité, relativement à la dimension immanente de la Création, mais tout autant dans sa dimension transcendante sans laquelle elle serait incomplète, désinformée.


Le nationalisme n’est pas qu’une idéologie

      Lorsque l’on qualifie le nationalisme d’idéologie, c’est l’amoindrir, le ravaler au rang des idéologies matérialistes, utilitaristes qui dominent le monde, et en particulier le monde européen depuis deux siècles.
      Prenons l’exemple du libéralisme et son opposé, le socialisme, comme de leur dernier avatar en date, le mondialisme. Ce sont des systèmes intellectuels construits à partir d’idées purement abstraites, à partir d’une certaine conceptualisation du réel, réalisé en projetant des idées préconçues et des fantasmes dans un contexte historique donné. Les communistes ont toujours parlé d’utopie sociale en voulant réaliser le paradis sur terre et les libéraux, par la voix de l’un de leurs porte-parole autorisé, Pascal Salin, a déclaré dans son ouvrage « Libéralisme » publié cette année, que le vrai libéralisme est une utopie. Quant au mondialisme, c’est l’utopie du marché mondialisé avec son corollaire, la prolétarisation généralisée de l’humanité.

      Le libéralisme, au contenu des plus flous, il s’est essentiellement soucié d’efficacité économique, au point de réduire la société à sa seule dimension économique et à aboutir à la penser en terme d’un ensemble de marchés, omettant la cohésion sociale. Oubliant, sinon refusant de considérer chaque société, chaque peuple autrement que sous forme d’une addition arithmétique d’individus mus par leur seul intérêt égoïste, ignorant la dimension relationnelle et humaine de la notion chrétienne de personne, évacuant la notion de bien commun (en tant que meilleur de chaque bien particulier) au profit de celle d’intérêt général, le libéralisme fait passer par pertes et profits le fait national, de même que le caractère organique des communautés humaines identitairement constituées qui forment l’humanité. Il ne connaît que la matière, ignore l’âme.

      A contrario, le socialisme, dans son acception dominante, voulant remédier à l’individualisme et à ses conséquences, envisage la cohésion sociale, sans pour autant considérer les liens organiques qui constituent précisément la substance de la société. Partant de l’individu isolé, considéré comme un objet arithmétique, il reconstitue une société sans personnalité et identité culturelle, une addition d’individus. Le contrat social qu’il propose n’a plus de spécificité ethno-culturelle : il occulte le caractère identitaire présent au sein de tout être humain et de toute communauté humaine. Ces deux idéologies ont pour point commun et tare congénitale d’être des constructions géométriques, idéalistes, sans rapport avec la réalité complexe de la vie. Tout au plus, ils en constituent une mauvaise modélisation. Niant ou occultant la réalité de l’être de chair, ils ont enfanté le mondialisme qui généralise leurs prémisses en envisageant une nation-monde, unifiée dans un marché mondialisé composé d’individus supposés interchangeables qu’ils soient Scandinaves ou Aborigènes. La pensée nationaliste, à leur différence, considère non pas l’individu, mais la personne dans son tissu relationnel communautaire, imprégné d’une identité unique et inassimilable à toute autre et créé en vue d’une fin, n’ignore en rien les corps intermédiaires qui constituent une société humaine et plus encore une nation. Il les prend en compte et les considère comme des éléments complémentaires et indispensables à la bonne marche de la nation et se préoccupe de leur assurer les meilleures conditions de fonctionnement et de développement. Le nationalisme est donc d’une autre nature que ces idéologies, filles de circonstances historiques fugitives.


[A suivre]

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20 novembre 2009 5 20 /11 /novembre /2009 14:35

Les 27 points de la Phalange, énoncés en octobre 1934.


Nation - Unité - Empire

1 - Nous croyons en la réalité suprême de l'Espagne. La fortifier, l'exalter et l'étendre est la tâche collective urgente de tous les Espagnols. A la réalisation de cette tâche, devront se subordonner inexorablement les intérêts des individus, des groupes et des classes.


2 - L'Espagne est une dans son destin universel. Toute inspiration contre cette unité, doit être repoussée. Tout séparatisme est un crime que nous ne pardonnerons pas.
La constitution en vigueur, en ce qu’elle incite aux désagrégations, attente contre l’unité de destin de l'Espagne. C’est pourquoi nous exigeons son abrogation immédiate.


3 - Nous avons la volonté d'Empire. Nous affirmons que la plénitude historique de l'Espagne est l'Empire. Nous réclamons pour l'Espagne un poste important en Europe. Nous ne supportons ni l'isolement international, ni l'immixtion étrangère.
Quant aux pays de l'Amérique latine, nous tendons à l’unification de culture, d'intérêts économiques et de pouvoir. L’Espagne revendique son statut de centre spirituel du monde hispanique, comme titre de prééminence dans les entreprises universelles.


4 - Nos forces armées - sur terre, sur mer et dans les airs - devront être aussi capables et nombreuses qu'il sera nécessaire pour assurer à l'Espagne, à tout instant, la complète indépendance et la hiérarchie mondiale qui lui correspond. Nous rendrons aux armées de terre, de mer et de l'air toute la dignité publique qu'elles méritent, et nous ferons, à leur image, qu'un sens militaire imprègne toute l'existence espagnole.


5 - De nouveau l'Espagne cherchera sa gloire et sa richesse sur les routes de la mer. L'Espagne doit aspirer à être une grande puissance maritime pour le danger et pour le commerce. Nous exigeons pour la Patrie la même hiérarchie pour les flottes martimes et pour les flottes aériennes.



Etat - Individu - Liberté

6 - Notre Etat sera un instrument totalitaire, au service de l'intégrité de la Patrie. Tous les Espagnols y participeront à travers leur fonction familiale, municipale et syndicale. Personne ne participera à travers les partis politiques. Le système des partis politiques sera aboli implacablement, avec ses conséquences : suffrage inorganique, représentation par des bandes en lutte, et Parlement du type connu.


7 - La dignité humaine, l'intégrité de l'homme et sa liberté sont des valeurs éternelles et intangibles. Mais seul est vraiment libre celui qui forme partie d'une nation forte et libre. Il ne sera licite à personne d'user de sa liberté contre l'union, la force et la liberté de la Patrie. Une discipline rigoureuse empêchera toute tentative d'envenimement, de désunion ou de rébellion des Espagnols contre le destin de la Patrie.


8 - L'Etat national-syndicaliste permettra toute initiative privée compatible avec l'intérêt collectif. Plus encore, il protégera et stimulera les initiatives profitables.



Economie - Travail - Lutte de classes

9 - Dans l'économie, nous concevons l'Espagne comme un gigantesque syndicat de producteurs. Nous organiserons corporativement la société espagnole au moyen d'un système de syndicats verticaux, par branches de production, au service de l'intégrité économique nationale.


10 - Nous répudions le système capitaliste qui méconnaît les nécessités populaires, déshumanise la propriété privée, et agglomère les travailleurs en masses informes, propices à la misère et au désespoir. Notre sens spirituel et national répudie également le marxisme. Nous orienterons l'impétuosité des classes laborieuses, aujourd'hui déviées par le marxisme, vers leur participation à la grande tâche de l'Etat national.


11 - L'Etat national-syndicaliste ne s'abstiendra pas cruellement dans les luttes économiques entre les hommes, ni assistera impassible à la domination de la classe la plus faible par la classe la plus forte.
Notre régime rendra radicalement impossible la lutte de classes, puisque tous ceux qui coopèrent à la production constituent en lui une totalité organique.
Nous réprouvons et nous empêcherons à n'importe quel prix les abus d'un intérêt partiel sur un autre, ainsi que l'anarchie dans le régime du travail.


12 - La richesse a comme première fonction - et ainsi l'affirmera notre Etat - celle d'améliorer les conditions de vie de tous ceux qui forment partie intégrante du peuple. Il n'est pas tolérable que des masses énormes vivent misérablement, tandis que quelques-uns jouissent de tous les luxes.


13 - L'Etat reconnaîtra la propriété privée comme moyen licite pour l'accomplissement des fins individuelles, familiales et sociales, et il la protégera contre les abus du grand capital financier, des spéculateurs et des prêteurs.


14 - Nous défendons la tendance à la nationalisation des services bancaires et, au moyen des corporations, de celles des grands services publics.


15 - Tous les Espagnols ont droit au travail. Les entités publiques soutiendront nécessairement ceux qui se trouveraient en chômage forcé.
En attendant l'avénement de la nouvelle structure totale, nous maintiendrons et intensifierons tous les avantages concédés à l'ouvrier par les lois sociales en vigueur.


16 - Tous les Espagnols non impotents ont le devoir travailler. L'Etat national-syndicaliste n'accordera aucune considération à ceux qui n'accomplissent aucune fonction et qui aspirent à vivre en parasites de l'effort des autres.



Terre

17 - Il faut coûte que coûte élever le niveau de vie des campagnes, réserve permanente de l'Espagne. Pour cela nous nous promettons à mener à bonne fin, sans tergiversations, la réforme économique et la réforme sociale de l'agriculture.

18 - Nous enrichirons la production agricole (réforme économique) par les moyens suivants :

-En assurant à tous les producteurs de la terre un prix minimum rémunérateur.

-En exigeant qu'il soit restitué à la terre, pour la doter suffisamment, une grande part de ce que la ville absorbe aujourd'hui en paiement de ses services intellectuels et commerciaux.

-En organisant un véritable Crédit agricole national, qui, en prêtant de l'argent aux laboureurs, à base d'intérêt, contre la garantie de ses biens et de ses récoltes, le rachète de l'usure et du caciquisme.

-En développant l'enseignement de l'agriculture et de l'élevage.

-En ordonnant l'utilisation des terres selon leurs conditions et le possible placement des produits.

-En orientant la politique fiscale en un sens protecteur de l'agriculture et de l'élevage.

-En accélérant les travaux d'irrigation.

-En rationalisant les unités de culture pour supprimer aussi bien la latifundia inexploités que les minifundia trop exigus pour donner un bon rendement.



19 - Nous organiserons socialement l'agriculture par les moyens suivants : en distribuant de nouveau la terre cultivable pour instituer la propriété familiale et stimuler énergiquement la syndicalisation des laboureurs.
En rachetant de la misère dans laquelle elles végètent, les masses humaines qui, aujourd'hui, s’exténuent à égratigner des champs stériles et qui seront établies sur les nouvelles terres cultivables.


20 - Nous entreprendrons une campagne infatigable de reconstitution du cheptel et de reboisement, en châtiant sévèrement ceux qui l'entraveraient, et en recourant, s'il le faut, à la mobilisation obligatoire temporaire de toute la jeunesse espagnole pour cette tâche historique de reconstruction de la richesse de la Patrie.



21 - L'Etat pourra exproprier, sans indemnité, les terres dont la propriété aurait été acquise ou exploitée illégitimement.



22 - L'Etat national-syndicaliste aura à coeur la reconstruction des patrimoines communaux des villages.



Education nationale - Religion

23 - La mission essentielle de l'Etat, grâce à une discipline rigoureuse de l'éducation, est de forger un esprit national fort et uni, et d'infuser dans l'âme des générations futures la joie et l'orgueil de la Patrie.
Tous les hommes recevront une éducation prémilitaire, qui les préparera à l'honneur de s'incorporer à l'armée nationale et populaire de l'Espagne.



24 - Les études seront organisées de telle sorte qu'aucun talent ne reste en friche, faute de ressources économiques. Tous ceux qui le méritent auront un accès facile aux études même supérieures.



25 - Notre mouvement incorpore le sens catholique, de glorieuse tradition et prédominant en Espagne, à la reconstruction nationale.
L'Eglise et l'Etat concorderont dans leurs domaines respectifs, sans que soit admise l'intromission ou une activité quelconque portant atteinte à la dignité de l'Etat ou à l'intégrité nationale.



Révolution nationale

26 - La Phalange espagnole des jeunesses offensives nationales syndicalistes veut un ordre nouveau, tel que l'énoncent les principes précédents. Pour l’implanter, et en lutte avec les résistances de l'ordre en vigueur, elle aspire à la révolution nationale.
Son style préférera l'action ardente et combative. La vie est milice, et elle doit être vécue avec un esprit épuré de service et de sacrifice.



27 - Nous nous efforcerons de triompher dans cette lutte avec les seules forces soumises à notre discipline. Nous pactiserons très peu. Uniquement lors de l'assaut final pour la conquête de l'Etat, le Commandement s'assurera les collaborations nécessaires à condition que soit toujours assurée notre prédominance,

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13 mai 2009 3 13 /05 /mai /2009 14:48

    On range généralement le nationalisme social parmi les mouvements spiritualistes, parce qu'il refuse de ne voir dans l'homme que matière. En réalité, sa position, qui regarde l'homme comme un être complexe chez lequel les diverses sortes d'activité se complètent, n'est ni spiritualiste ni matérialiste, ou elle est les deux à la fois. Elle constitue en fait une troisième position que le justicialisme a été le premier à définir comme telle.

« Le justicialisme n'est évidemment pas matérialiste,  écrit Raul Mende, puisqu'il recherche la libération de l'esprit par son perfectionnement et lui donne la possibilité de remplir la mission qui lui est dévolue selon l'ordre des valeurs humaines. Mais le justicialisme n'est pas non plus absolument spiritualiste puisqu'il donne également à la matière la possibilité de remplir la mission qu'elle a en fonction de la nature de l'homme et qu'en outre, il reconnaît que l'esprit ne peut davantage remplir sa mission sans l'aide de la matière. »

 


    Il se différencie de l'extrême spiritualiste en ce qu'il ne rejette pas la valeur de la matière, parce qu'il sait que ce serait aller à l'encontre du perfectionnement de l'esprit... Il  vise à la libération relative de l'esprit..., libération compatible avec la nature de l'homme, qui est également matière.

« Le justicialisme recherche la libération de l'homme par sa perfection comme unité humaine. »

« Mais il se différencie de l'individualisme en ce qu'il ne laisse pas d'estimer la collectivité à sa juste valeur... parce qu'il sait que ce serait aller à l'encontre du perfectionnement de l'unité humaine... Il ne vise pas à l'absolue libération de l'unité humaine recherchée par l'individualisme qui livra l'homme aux forces esclavagistes de la féodalité, de l'absolutisme et du capitalisme. Le justicialisme vise à une libération relative, compatible avec la structure sociale de l'humanité. »

 


    Et Raul Mende conclut : « Le justicialisme consiste à donner à chacune des valeurs fondamentales de l'humanité, la possibilité – le droit – de se livrer à une manifestation maxima compatible avec la manifestation maxima de la force opposée », pour arriver ainsi au point d'équilibre. « En face du problème de l'homme, la solution justicialiste n'est ni spiritualiste ni matérialiste. Elle est simplement l'harmonie de l'esprit et de la matière ».
    Complexe comme la nature humaine, le justicialisme est une position intermédiaire entre des extrêmes, le point d'équilibre entre spiritualisme et matérialisme, entre individualisme et collectivisme. Les forces opposées étant constantes, la position intermédiaire d'équilibre ne peut varier, elle est unique et constante.
    Ce point est la troisième position qui n'est pas une quelconque position entre des extrêmes opposés, mais le point unique d'équilibre qui réalise l'harmonie des forces.
    Troisième position d'équilibre entre l'esprit et la matière, elle est aussi une troisième position politique qui s'oppose à la fois au capitalisme et au bolchevisme.
    Perón la définit ainsi dans son message au Congrès du 1er mai 1952 :

« La troisième position est un système philosophique qui donne naissance à une doctrine et à une théorie politique, sociale et économique ; elle est, par essence, distincte de l'individualisme capitaliste comme du collectivisme sous toutes ses formes. Le peronisme est la doctrine de cette troisième position et on peut l'appliquer à la solution des problèmes politiques, sociaux et économiques du monde moderne. »

 


    Si on veut absolument orienter la troisième position par rapport aux autres forces, il faut regarder l'équilibre qu'elle réalise comme plus proche du spiritualisme et de l'individualisme que leurs termes opposés.

« La troisième position justicialiste n'est pas à égale distance des extrêmes, écrit encore Raul Mende. Dans le problème de l'homme, elle est plus proche du spirituel que du matériel. Dans celui de la société, elle est plus voisine de l'unité humaine que de la totalité humaine. Parce que, pour la doctrine justicialiste, la valeur absolue ou intrinsèque de l'esprit est plus grande que celle de la matière. Et celle de l'homme supérieure à celle de la collectivité. »

 


    En résumé, le justicialisme est beaucoup plus proche du spiritualisme que du matérialisme, mais ne sacrifie, ni l'un, ni l'autre.
    En conséquence de son caractère complet, en tant qu'il constitue l'antiparti de la nation argentine, en tant que troisième position hostile à toutes les oppressions, le justicialisme est l'adversaire de toutes les factions : libéraux, marxistes, bolchevistes et s'oppose foncièrement a leurs doctrines.
    La position du justicialisme à l'égard du marxisme est sans équivoque : le marxisme n'est pas le socialisme et poursuit de toutes autres fins que la justice sociale, il faut le démasquer et montrer au peuple son véritable caractère d'entreprise antisociale et esclavagiste. De plus, le justicialisme le répudie à cause de son internationalisme.
    Mais passons la plume à Eva Perón :

« L'idée même qu'une doctrine commune à tous les pays soit susceptible de résoudre le problème de l'injustice sociale en Argentine me heurtait vivement. Il m'était impossible de comprendre que, pour faire disparaître cette terrible plaie, il fût nécessaire de supprimer la notion si grande et si naturelle de patrie... Lorsqu'une chose est internationale, elle perd en effet toute nationalité, même – et peut-être surtout – celle de son pays d'origine... Je ne pouvais accepter l'idée d'une révolution internationale, venue du dehors et dirigée par des hommes étrangers à notre manière d'être et de voir... Je les soupçonnai de travailler à l'affaiblissement moral du pays bien plus qu'au bien-être des travailleurs. »

 


    Perón, dont une des maximes favorites est « L'amour seul est constructif », ne pouvait par ailleurs que réprouver le bolchevisme, doctrine de haine qui porte bien apparente sa marque de fabrique.
    En ce qui concerne le capitalisme, la position du justicialisme est tout aussi nette. Son amour de la justice ne pouvait que rejeter les théories du libéralisme qui conduisent à une féroce exploitation de l'homme par l'homme.
    Réalisant l'harmonieuse synthèse de toutes les aspirations humaines, appuyé sur un point d'équilibre autour duquel s'ordonnent les diverses forces spirituelles et physiques qui s'exercent autour de l'homme et à l'intérieur de l'homme, le justicialisme est une conception morale de l'existence de l'homme et de ses activités.

« Le justicialisme est une conception morale du politique, du social et de l'économique en vue de garantir la paix, la liberté et le bien-être communs, écrit Democracia le 12 juillet 1950. La coexistence du pays politique, c'est-à-dire du pays des puissants et vieux partis bureaucratiques, indifférents devant le sort du pays réel qui travaille, qui crée et souffre et qui finit par se soulever pour retomber dans l'orbite du pays politique, cette coexistence n'est possible que par l'absence ou la précarité des fondements moraux ».

 


Perón déclare la même année :

    « L'évolution humaine a été caractérisée, entre autres, par le fait qu'elle a projeté l'homme hors de lui-même, sans le pourvoir préalablement d'une pleine conscience de soi ».

 


    Faire de l'homme un être moral en lui donnant cette conscience, voilà à quoi tend l'esprit du justicialisme.



    Tout en étant opposé à une éventuelle immixtion cléricale dans le domaine politique, le justicialisme allie le spiritualisme religieux à sa doctrine.

« La valeur justicialiste des forces humaines fondamentales, matérielles et spirituelles, individuelles et collectives, est tout simplement chrétienne »

 


    expose Raul Mende. Mais cette valeur chrétienne du justicialisme s'appuie surtout sur le sens social de l'enseignement du Christ qu'on a vu ancré si fortement dans l'esprit de Perón et d'Evita. Le christianisme sur lequel fait fond le peronisme n'est pas cette caricature du christianisme que montrent certaines églises, et il prend bien soin de le préciser. Il veut faire « du vrai christianisme », « le vrai christianisme que l'humanité n'a pas encore connu ». Le christianisme justicialiste est un « christianisme de l'esprit, qui considère l'homme, magnifique création de Dieu, et ne met pas obstacle à sa perfectibilité », un « christianisme d'hommes et non de purs esprits », un « christianisme de la personne humaine dans la société humaine ».
    Ce véritable christianisme « dont le sens social est encore inconnu des hommes », paraît bien éloigné du christianisme traditionnel, d'autant plus que Mende écrit que la société justicialiste est « chrétienne non tant par le nom que par le christianisme de ses vertus fondamentales, même si celles-ci ont leur origine en d'autres systèmes qui ne soient pas chrétiens ».
    L'État chrétien justicialiste n'est pas un État clérical, et ici comme ailleurs, il faut bien faire la distinction entre christianisme et cléricalisme. Il se contente de mettre en pratique les vertus enseignées par le Christ. Il ne demande même pas que tous les membres de cet État soient chrétiens, les athées comme les autres y trouvent leur place. Il suffit que tous acceptent les principes humains de l'Évangile de Christ.



    Le justicialisme n'est pas totalitaire et admet l'existence d'une opposition qui conserve en Argentine tous ses droits légaux.
    Il verrait d'un assez bon œil la collaboration d'une opposition loyale, ni marxiste ni capitaliste, qui exercerait une utile critique sur les initiatives gouvernementales. Mais on est actuellement fort loin d'une telle possibilité de travail en commun, l'opposition en Argentine n'est composée que des nostalgiques de l'oligarchie, des profiteurs, des ennemis du peuple et des agents de l'étranger. Il n'est pas de collaboration possible avec ces gens-là, il ne faut pas être d'accord avec une telle opposition, et Eva Perón l'exprime avec virulence et un saint sectarisme :

« Qu'importe s'ils aboient !... Le pire serait qu'ils nous applaudissent !... Si ceux-là sont d'accord : attention ! Cela signifie que le peuple, lui, ne doit pas être d'accord. Je voudrais que chaque peroniste grave cette idée au plus profond de son esprit. Elle est essentielle pour le mouvement ».

 


    Perón, en termes plus nuancés, regarde comme impossible une collaboration avec l'opposition incivique qui existe actuellement en Argentine. Tout en laissant à cette opposition la liberté que lui garantit la Constitution, Perón ne peut que souhaiter le jour où elle disparaîtra pour faire place à une opposition loyale. Il déclare à ce sujet, le 9 décembre 1949 :

« Je ne considère pas le mouvement peroniste, étant donné ses caractéristiques, comme un mouvement politique. Il est beaucoup plus un mouvement national. C'est tellement vrai que l'on voit l'opposition se restreindre chaque jour, jusqu'au moment où elle disparaîtra. Puisse ce moment se produire, afin que des milieux qui ne pensent pas encore comme nous surgisse, face au nôtre, un autre grand parti, décidé à une lutte loyale ! »

 


    Une des particularités du justicialisme est son pacifisme qui contraste avec le militarisme souvent pénible d'autres partis nationalistes. Il se montre, dans ce secteur, nettement en avance sur d'autres. Le fait est d'autant plus digne d'être relevé que le justicialisme est l'œuvre d'un militaire, Perón, et que les militaires d'habitude ne font pas profession d'aimer la paix. Mais nous avons déjà dit que Perón n'était pas un général comme les autres.
    Le pacifisme est un des traits marquants du peuple argentin, qui a derrière lui une tradition élevée de justice internationale. A l'aube de sa destinée, il a libéré deux peuples frères. L'orientation pacifiste du justicialisme est donc profondément conforme aux aspirations argentines.
    Perón précise en ces termes son pacifisme, dans son allocution du 20 décembre 1947 :

« Éminemment pacifistes... nous réprouvons la conquête et nous repoussons la force sous tous ses aspects en nous attachant à observer fidèlement les pactes et les traités, et en nous refusant à bâtir sur l'arbitraire et sur l'abus de la puissance. Nous respectons autant le plus faible que le plus fort et nous exigeons, à bon droit, une juste réciprocité »

 


    Il proclame :

« L'Argentine ne reconnaît que le droit qui procède de la justice. Elle repousse la force comme émanation de l'injustice qui ne donne que des droits usurpés et des titres souillés de sang ».

« L'ardent désir du peuple argentin, déclare encore le président Perón, le 23 juin 1947, est que tous les peuples et tous les gouvernements du monde n'aient d'autres aspirations que d'assurer la pacification intérieure et internationale, seul moyen de donner le bonheur aux êtres humains. Notre tradition chrétienne, la route pacifiste que nous suivons, notre désir de tout sacrifier à la cause de la paix, tout cela autorise l'Argentine à se faire l'écho des aspirations de l'univers tendant à établir une solidarité qui soit le prélude lumineux de la paix impérissable que nous désirons avec ferveur. »

 




    Les sources historiques du justicialisme sont bien clairement définies, elles procèdent de Rome et de la Révolution française de 1789.
    Mais laissons Perón en indiquer lui-même la filiation historique :

« Il est évident que la marche en avant de l'humanité ne saurait être arrêtée. Aussi, lorsqu'une tendance ou une idée s'est infiltrée, il faut en accepter le fait et en tirer le maximum de profit. L'exemple de la Révolution française, aux leçons de laquelle je me suis souvent rapporté, illustre magnifiquement la thèse que je soutiens. L'exaltation de l'individu et les concepts de liberté et d'égalité, circonscrits à leur aspect purement politique, prenaient tellement d'importance que la première occasion permit de démontrer leur force entraînante et de changer la face du monde. Pour des raisons historiques que nous n'avons pas à commenter ici, c'est en France que jaillit l'étincelle et, naturellement, c'est là que, dès le début, s'implantèrent tous les principes qui motivèrent le fait révolutionnaire.

Mais ces principes n'étaient pas tous bons. Certains même portaient en eux leur ferment destructeur, car après avoir suscité une liberté simplement politique et une égalité entre les hommes immédiatement démentie par une inégalité économique, il arriva que sous certains aspects, les classes laborieuses modestes se trouvèrent dans une situation pire qu'auparavant. Il ne fallut pas longtemps pour qu'on s'aperçut de cette grave erreur, ou mieux, de cette monstruosité qu'avait été l'interdiction des corporations, car ce n'est que par l'union et par le groupement corporatif que les êtres faibles acquièrent la force nécessaire à la lutte pour la vie : on croit défendre l'individu contre la pression et la coercition des syndicats et, en fait, on ne réussit qu'à supprimer individuellement et politiquement le prolétariat. »

 


    Nous avons vu que, parallèlement aux enseignements de la Révolution française qu'il trie et décante, le justicialisme peut se référer à Belgrano, qui, par l'aspect hardi de ses conceptions sociales et par l'ardeur de son nationalisme, peut être regardé comme un précurseur du peronisme.
    Continuateur du courant historique latin qui vise depuis des siècles à réaliser un ordre plus juste, le justicialisme incarne aux yeux de beaucoup la Genève de la justice sociale, la Rome et l'Athènes de la nouvelle civilisation latino-américaine.
    Terre classique de la liberté en Amérique, l'Argentine considère que sa mission historique lui commande de se faire sur ce continent le champion de l'humanisme. Depuis l'avènement du justicialisme, cette mission historique s'est chargée en plus du devoir de libérer les opprimés, de faire triompher la justice sociale. Héritière de Rome et d'Athènes, l'Argentine se regarde par ailleurs comme la continuatrice de leur œuvre civilisatrice.
    De la conscience de sa double mission historique découlent pour Buenos-Aires deux principes impérialistes parallèles, le premier issu de son caractère national, le second qui le pousse à répandre son idéologie.

    Le premier des principes impérialistes du justicialisme, axé sur l'affirmation de l'argentinité et sur le nationalisme, le pousse à un resserrement fraternel des liens qui unissent l'Argentine aux autres états d'Amérique latine. Perón, qui a donné une grande impulsion à ce courant, vise à faire de Buenos-Aires un foyer de culture et un centre intellectuel irradiant sur toute l'Amérique hispanique.
    Le second principe est celui de l'universalité du justicialisme, typiquement autochtone et inapplicable à un autre pays étranger dans ses institutions strictement argentines, mais universel quant à l'essentiel de sa doctrine et à ses grands principes qui conviennent à tous les peuples.
    Le justicialisme distingue très bien ce qui en lui est uniquement argentin et ce qu'il a d'universel, il ne confond pas les deux. Voici comment Perón affirme, le 18 juin 1948, que le justicialisme, tel qu'il est appliqué, n'est pas un article d'exportation :

« Il ne peut y avoir de doctrine politique universelle parce que les peuples vivent dans des conditions qui ne sont pas universelles. La doctrine de la République Argentine n'a probablement aucune valeur en Italie, en Russie ou en Allemagne. Le peuple italien comptant cinquante millions d'habitants qui vivent sur 300 000 kilomètres carrés, ne peut avoir les mêmes intérêts et les mêmes aspirations que le peuple argentin avec ses seize millions d'habitants vivant sur 4 millions de kilomètres carrés y compris l' Antarctique. »

 


    Et voici comment, le 23 juin 1947, il donne au justicialisme un étendard d'universalité :

« L'Argentine fonde sa paix intérieure sur la justice sociale, base de la paix et de l'ordre aussi bien dans la vie interne que dans la vie internationale. Sur ce plan se rencontrent tous les hommes et tous les peuples qui savent prendre pour étendard les plus hautes manifestations de la spiritualité de cette justice sociale. »

 


    Le Mandataire argentin précise sa pensée au cours d'un discours prononcé en octobre 1952 :

« Cette doctrine qui est nôtre peut-être – et nous le croyons fermement – une solution comme troisième idéologie de ce monde divisé où nous avons l'énorme responsabilité de vivre. Cette solution, nous l'avons offerte à tous les peuples et nous continuerons à l'offrir ».

 


    Dans Razon de mi Vida, Eva Perón est tout aussi affirmative et énonce nettement le principe de l'universalité du justicialisme :

« Nous pensons que lorsque le monde sera justicialiste, l'aide sociale ne sera plus qu'un souvenir désagréable... Quand le monde entier sera justicialiste, l'amour règnera et la paix triomphera... c'est ce que m'a appris Perón... Je me demande souvent pourquoi l'humanité n'apprendrait pas, elle aussi, cette merveilleuse leçon... Et j'ai envie de parcourir le monde pour prêcher le justicialisme de Perón ».

 


    Raul Mende tire la conclusion :

« Le justicialisme est donc aussi l'interprète, comme troisième position, de l'âme des peuples du monde entier ».

 


    La plus triomphale réussite du principe impérialiste social du justicialisme se situe sur le plan syndical. Réalisant dans ce domaine la Troisième Position qui est la sienne sur tous les plans, l'Argentine s'est faite la promotrice de l'Agrupacion de Trabajadores Latino-americanos Sindicalistas, fondée à la fin de 1952 au Mexique et dont le siège est à Buenos-Aires. Cette fédération syndicale internationale latine a dégonflé les deux organisations rivales, patronnées l'une par Moscou, l'autre par Washington, qui cherchaient à s'implanter en Amérique latine, et tous les éléments syndicaux sincères qu'elle groupe suivent maintenant la voie tracée par Perón.


    Comme tout mouvement révolutionnaire, le justicialisme possède son cortège coloré de symboles, de rites et de fêtes par lesquels s'extériorise sa brûlante spiritualité.
    L'insigne du parti peroniste reproduit les armoiries de l' Argentine, bonnet phrygien rouge et deux mains qui se serrent, sur fond blanc et bleu, auxquels le justicialisme a ajouté sur le côté un épi stylisé.
    Les jours solennels du justicialisme sont le 17 octobre, le 27 novembre et le 1er mai.

    Le 17 octobre est le Jour de la Loyauté, le Jour de la Révolution. On célèbre ce jour-là l'anniversaire de la journée révolutionnaire de 1945, où les travailleurs descendus sur la plaza de Mayo exigèrent le retour de Perón. En ce jour de réjouissance, Perón apparaît au balcon de la Casa Rosada et demande au peuple s'il est content de son gouvernement, question à laquelle répondent des milliers de oui enthousiastes qui réalisent ainsi un plébiscite direct.
    Certains 17 octobre ont été empreints d'une solennité particulière. Tels furent celui de 1952 où fut lu devant une foule énorme le dernier message d'Eva Perón, et celui de 1953 où fut proclamé, en présence du président du Nicaragua, le Décalogue argentino-paraguayen et la Déclaration de Buenos-Aires argentino-nicaraguayenne.

    Le 27 novembre commémore la fondation du Secrétariat au Travail et à la Prévoyance, première étape de la révolution. Ce n'est pas une fête nationale chômée, et la population travaille comme à l'accoutumée. Les ouvriers la célèbrent par une manifestation devant l'immeuble du Secrétariat.

    Le 1er mai, l'Argentine célèbre la Fête du Travail. Le choix de cette date surprend un peu les visiteurs étrangers. Le 1er mai, choisi arbitrairement par les marxistes, est en effet intimement lié au pseudo-socialisme des barbes israëliennes, c'est la fête du bolchevisme, et cela ne change rien que le nazisme, qui était toute autre chose que du fascisme, ait emboîté en son temps le pas à son frère le bolchevisme. Il aurait été beaucoup plus normal que l'Argentine, comme l'Italie, célébrât la Fête du Travail le 21 avril. Ce jour-là, les Romains, ancêtres des Argentins aussi bien que des Français, des Italiens et des Espagnols, célébraient la fête des Paliliae, fête des travailleurs des champs et des bergers. Depuis l'aurore de notre race, le 21 avril a toujours été la fête du travail, une fête qui est à nous et à notre nation. Le 1er mai comme le 17 octobre, le peuple argentin se réunit sur la plaza de Mayo où se déroule une grande cérémonie organisée par la C.O.T. et présidée par Perón, en sa qualité de « premier travailleur argentin ». Les ouvriers de la capitale et des délégations venues des provinces assistent en foule à cette fête magnifique, au cri mille fois répété de : « La vida por Perón ! ».


    Une autre importante date commémorative est celle du 12 octobre, journée où s'est célébré en Argentine le Jour de la Race, anniversaire de la découverte de l' Amérique, où l'Italie donnait un continent à l'Espagne.
    San Martin, héros populaire, incarnant parfaitement les vertus civiques, occupe une place importante dans la mythologie justicialiste. En 1950, centenaire de la mort du Libérateur, une loi prescrivit que les dates en tête de toutes les publications imprimées seraient accompagnées de la mention « Année du Libérateur, général San Martin ». Perón ouvrit le 3 janvier par ces paroles l' « Année du Libérateur » :


« San Martin est du peuple, parce que sa vie fut toute simplicité et honneur, digne et féconde comme la vie du peuple ; parce qu'il a toujours servi le peuple, sans jamais tirer avantage ni de sa gratitude, ni de son affection... San Martin et son peuple, unis par le miracle d'un seul et grand amour, celui de la patrie, ne font qu'un. »



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11 mai 2009 1 11 /05 /mai /2009 14:52

[Voici un chapitre extrait du livre de Lucien Duquenne et Pierre Biondini, L'Argentine de Peron qui présente le justicialisme. Notons que les auteurs y adoptent cependant des positions parfois contestables]


El peronismo es humanismo en accion.           

Perón           

 



    Le justicialisme est l'expression argentine du courant d'idées mondiales, caractéristique de notre siècle, qui vise à réaliser dans chaque pays un régime social appuyé sur la nation, conception politique qu'on désigne en France du nom de fascisme, ce mot étant pris dans son véritable sens de doctrine révolutionnaire réalisant la synthèse du national et du social, rendant au prolétaire sa patrie et au nationaliste le sens de la justice sociale. Doctrine universelle comme toutes les grandes idées, mais qui n'apparaît spontanément que dans les pays latins, ce socialisme retrouvé, revêt dans les diverses nations des formes différenciées, créées chacune par le génie particulier de chaque peuple. Le justicialisme est sa forme argentine, profondément marquée du sceau national et différent en beaucoup de points de ce que nous avons pu voir en Europe.
    Émanation argentine de la doctrine philosophique qui, se cherchant depuis Platon, les Gracques, César et la Révolution française de 1789, a eu pour premiers doctrinaires modernes Mussolini, Salazar et Codreanu et pour précurseur argentin Manuel Belgrano, le justicialisme a pour fondateur immédiat Juan Perón. Sans doute pourrait-on montrer ce que la pensée de Perón doit à ses prédécesseurs dans le grand courant national révolutionnaire latin, mais il n'en est pas moins vrai que le justicialisme est le fruit de son esprit et que, sans Perón qui, à point nommé, vint guidé par Dieu, prendre la tête du mouvement social: argentin, celui-ci n'aurait pu naître, ni n'aurait assumé le caractère qui est le sien. Rarement la phrase célèbre de Codreanu : « Ce qui n'est dans la nation que désir informe et obscur, arrive à la clarté dans la conscience d'un chef prédestiné » a trouvé meilleure application que dans le cas de Perón. Si le justicialisme de Perón prend place dans la chaîne déjà longue des mouvements sociaux-révolutionnaires, où ce maillon était d'avance prévu, il n'en est pas moins vrai que le maillon a été forgé par Perón, qui sut le réaliser.
    Voici la définition du justicialisme telle que la donne le théoricien peroniste Raul Mende :

« Le justicialisme est une doctrine dont l'objet est le 'bonheur de l'homme dans la collectivité humaine, bonheur obtenu par l'harmonie des forces matérielles et spirituelles, individuelles et collectives, fortifiées par le christianisme. »

 


    Dans le domaine de la doctrine et des réalisations, le justicialisme s'identifie profondément avec l'idéal fasciste, en ce qu'ils ont tous deux pour but suprême l'intérêt national et populaire, finalité intangible dont ils ne se laissent pas écarter, qu'ils sont l'un comme l'autre une révolution permanente, qu'ils ont en commune le dogme des minorités agissantes, leur aspect de démocratie organisée et de république syndicale, l'obligation qu'ils font à l'Etat d'assurer la prévoyance sociale pour l'ensemble des citoyens, leur rejet du capitalisme comme de la subversion marxiste, de la ploutocratie comme de la démocratie anarchique, leur conception limitée du droit de propriété, leur opposition théorique à la lutte de classe, leur positivité envers les factions, leur condamnation d'un individualisme outrancier comme d'un collectivisme-Moloch, leur axe nationaliste, leur principe d'autorité et de hiérarchie, la troisième position par laquelle ils concilient le matérialisme et le spiritualisme, leurs deux principes impérialistes parallèles.
    Le justicialisme par contre s'écarte nettement du fascisme italien en ce qu'il attache une bien plus grande valeur que ce dernier aux libertés individuelles, qu'il ne réalise pas l'État corporatif et ne donne pas de fonction politique aux syndicats, enfin par son pacifisme et son rejet de la caporalisation. Autre innovation importante, le justicialisme, pour la première fois, applique le nationalisme social à un état de type fédéral sans détruire le fédéralisme.
    Le noyau idéologique commun à tous les mouvements fascistes – troisième force sur le plan politique – vise à l'instauration d'un état révolutionnaire et nationaliste, d'où seraient éliminés la réaction et le cléricalisme et qui réaliserait la justice sociale au moyen de la socialisation des entreprises et de la prolétarisation des organes politiques dirigeants. On le trouve aussi à la base de tout le justicialisme. Il est trois points que Perón regarde comme l'essentiel de sa doctrine et qui pourraient aussi bien être les bases de n'importe quel autre mouvement socialiste. Les voici énoncés par Perón en 1951 :

« Nous, les justicialistes, nous brandissons les trois étendards les-plus importants... Le premier de ces étendards, c'est l'indépendance économique... Le second est celui de la justice sociale... Quant au troisième, c'est celui de la souveraineté nationale. »

 




    Le justicialisme est une révolution constructive et permanente qui procède par paliers, éliminant graduellement les institutions sclérosées pour les remplacer par de nouvelles plus justes. Sous la direction de Perón, la révolution est permanente en Argentine depuis 1945, progressant par étapes et apportant si nécessaire, de nouvelles retouches à ce qu'elle a créé.
    Cette révolution constructive est l'œuvre des « minorités agissantes », suivant une autre caractéristique idéologique du nationalisme social. Ce sont ces minorités actives qui font les révolutions et non les peuples dans leur ensemble. Représentant la partie vivante de la nation et incarnant sa volonté, elles constituent une véritable élite populaire, représentée en Argentine par le Parti peroniste.
    On ne trouve pas en Argentine cette doctrine des minorités agissantes affirmée d'une manière aussi nette qu'en Italie et en Roumanie. Mais elle n'en est pas moins à la base de l'existence du Parti peroniste. Lorsque Perón déclare le 9 décembre 1949 aux délégués de la corporation des employés de banque que va être créée une École Supérieure peroniste où seront étudiés les aspects supérieurs de la pensée justicialiste, afin de former sur le plan doctrinal une élite peroniste capable d'instruire à leur tour de nouveaux cadres, cela ne sous-entend-il pas le dogme des minorités agissantes ? Que seront ces cadres peronistes. sinon le levain permanent de la révolution justicialiste. sinon une élite populaire qui conduira le pays ? Le Parti peroniste n'est-il pas lui-même la minorité agissante qui exprime la volonté du peuple argentin ?
    Le « petit noyau résolu ». Perón le met lui aussi au-dessus des « majorités lâches et inertes ». Il déclare encore ce 9 décembre 1949 :

« Les doctrines ne n'enseignent pas, elles s'inculquent, et on ne saurait les inculquer si on ne ressent une vocation résolue et un enthousiasme absolu. Il me serait difficile d'inculquer aux autres quoi que ce soit qui ne m'aurait été inculqué à moi-même. Pour cette raison, le meilleur maître est celui qui enseigne avec sa propre conviction, fût-elle poussée jusqu'au fanatisme. Il n'est pas de grande cause qui ne doive compter avec un certain nombre de fanatiques. Il s'ensuit que les fanatiques seront toujours une nécessité... Je les considère comme des hommes dont l'esprit est supérieur à toute pondération, parce qu'ils sont prêts à se sacrifier pour leur cause. »

 


Le justicialisme est bien entendu foncièrement républicain, son idéal de justice sociale ne pouvant s'accommoder d'autres régimes, anachroniques, découlant de conceptions qu'il ne reconnaît pas. Né en Amérique dans une nation qui ne connut jamais de royauté, la question institutionnelle ne se posait pas pour lui : l'Argentine ne pouvait être qu'une république et une république sociale. L'état justicialiste peut être défini comme une démocratie parlementaire présidentielle, présentant un quadruple caractère national, syndical, prolétarien et fédéral.
    La démocratie justicialiste n'est pas la démocratie capitaliste que nous connaissons en Europe et dont Perón, en cette phrase concise, a dressé en janvier 1949, l'acte de décès :

« La communauté nationale, comme phénomène de masses, apparaît avec le déclin de la démocratie libérale ».

 


    Démocratie doit être en Argentine entendu au sens étymologique du terme, le peuple y gouverne réellement et l'action du peronisme a précisément consisté à faire passer aux mains du peuple les leviers de commande. Le Parlement y fait les lois mais ne gouverne pas. Elle s'appuie sur la communauté populaire et non sur le libéralisme qui engendre l'oppression capitaliste. Bien que se défendant d'être le régime d'une classe, elle a le prolétariat pour fondations. En fait, c'est une démocratie populaire, si on nous passe ce barbarisme déjà rodé par d'autres qui n'y ont guère droit.
    On peut situer l'État justicialiste à mi-chemin entre la république sociale mussolinienne et la démocratie fédérale de type présidentiel. Si on met à part son caractère fédéral et présidentiel propre à l'Amérique – bien que l'Allemagne de Hitler ait aussi été une démocratie présidentielle et que la Suisse soit une confédération des plus classiques – le régime qui se rapproche le plus de celui de Perón est celui de Salazar au Portugal.
    Soulignons que Juan Perón n'est ni un autocrate ni un dictateur, mais le chef régulièrement élu et investi de pouvoirs réguliers que s'est librement choisi le peuple argentin. L'État justicialiste est une démocratie organisée, dans le cadre de laquelle s'équilibrent les différentes forces qui composent la nation argentine. Dans un discours qu'il prononçait dans le cours de l'été 1950, Perón déclare qu'on s'achemine vers un État plus social que politique et que, par l'organisation des forces du travail, « il faut arriver à l'équilibre permanent des forces organisées... Sans cet équilibre permanent, c'est une irréalisable utopie que l'exercice total de cette liberté que nous chérissons tous, mais que nous ne pouvons pratiquer ».

    Nous avons dit que le justicialisme rejetait la démocratie capitaliste pour réaliser une république sociale. Sa conception du droit de propriété, profondément révolutionnaire, place le justicialisme hors du cadre de l'économie libérale. Donnant une acception spéciale à la notion de propriété qu'il reconnaît mais limite, le justicialisme admet le droit de posséder, mais refuse la propriété stérile et improductive, il ne la conçoit pas coupée de sa fonction sociale.
    Le justicialisme se proclame opposé à la lutte de classes et affirme son intention de la remplacer par la collaboration entre le capital et le travail. « Pour obtenir la paix intérieure, déclare Perón, le 6 septembre 1944, il faut travailler à supprimer les extrémistes capitalistes et totalitaires, de droite où de gauche. De la part de l'État, la base de cette action est le développement d'un programme politique, économique et social adéquat. En outre, l'éducation des individus doit tendre à élever le niveau de la culture sociale, à donner de la dignité au travail, à humaniser le capital, enfin et surtout, à remplacer l'esprit de lutte par celui de collaboration ». Perón veut promouvoir une seule classe sociale, celle de ceux qui travaillent, mais proscrit les luttes intestines. Il veut abolir l'exploitation de l'homme par l'homme, rien de plus.
    En fait, malgré ses affirmations de principe, le régime peroniste tend de plus en plus à devenir un régime de classe. On sait qu'un phénomène semblable s'est produit en Italie durant le fascisme, où Mussolini, malgré ses positions théoriques et après avoir essayé de réaliser la justice sociale dans le cadre de la collaboration des classes, en vint à une république appuyée exclusivement sur le prolétariat. Il y a là un enseignement, l'enseignement qu'il est impossible d'édifier la justice sociale sans détruire le capitalisme, ce qui suppose la lutte des classes.
    Avec Perón, les ouvriers ont acquis la conscience de classe. Que le justicialisme ne cherche pas à faire de la lutte de classes en soi, c'est possible, mais il en fait dans la pratique lorsqu'il veut faire cesser l'exploitation capitaliste. Mettre fin à l'exploitation de l'homme par l'homme est au centre de toutes les positions doctrinales de Perón. Il déclarait, en septembre 1948 :

« Nous cherchons à assurer à notre peuple un régime social juste et humanitaire, où la coopération remplace la lutte, où il n'y ait ni réprouvés ni élus, où chaque homme qui travaille reçoive un bénéfice proportionné à son rendement, où tous aient leur avenir assuré, où la société égoïste ne se désintéresse pas du vieillard et de l'impotent et où la fraternité, la générosité et l'amour président aux relations entre les Argentins. Assurer les droits du travailleur, en les incorporant à la loi et aux coutumes argentines, pour que les classes économiquement faibles soient protégées contre l'égoïsme, la domination et l'exploitation des classes économiquement fortes. »

 


    Une autre déclaration de Perón, de mars 1949, rend le même son :

« A partir du moment où les Droits du Travailleur seront inclus dans la Constitution de la République, après qu'elle aura été votée et que tous les fonctionnaires de la Nation lui auront prêté serment, le travailleur pourra affirmer, en toute certitude, que le règne de l'exploitation de l'homme par l'homme a été balayé pour toujours de la terre argentine. Nous aurons l'insigne honneur d'avoir été le premier peuple du monde à établir que l'exploitation d'un homme par un autre homme soit considérée comme un délit condamné par la loi. »

 


« Dans un régime capitaliste, dit encore Perón en 1951, l'homme est exploité par l'homme ; là où règne le communisme, l'homme est exploité par l'État ; dans notre système, l'exploitation de l'homme, sous quelque forme qu'elle se présente, est toujours un crime que la loi punit. Ce que nous voulons, c'est supprimer complètement l'exploitation, quel que soit le nom derrière lequel elle se cache. »

 


    Que le prolétariat soit au centre de toutes les préoccupations de Perón, nul n'en doute en Argentine et c'est bien la cause de la haine de l'oligarchie pour le iusticialisme.

« Dans notre doctrine, a dit Juan Perón, les êtres pour lesquels nous travaillons le plus et auxquels nous pensons davantage, sont les plus modeste de tous et ceux qui ont le plus besoin de nous. La raison d'être et la force immanente du mouvement peroniste sont les humbles parce qu'en les voyant nous les avons aimés. »

 

 

 


 

    Où le justicialisme se différencie nettement de certains mouvements fascistes, c'est en ce qui concerne l'individualisme et les libertés du citoyen, auxquels il attache une bien plus grande valeur que ne l'ont fait les premières formes historiques du fascisme.
    Pour tout État, la liberté individuelle n'est pas sans limites et rencontre ses frontières du jour où l'individu vit dans la société d'autres hommes et trouve pour terme de la sienne propre la liberté du voisin. L'originalité du fascisme dans ce domaine est d'intervenir dans des secteurs que d'autres laissent libres. L'intérêt général primant celui de l'individu, le citoyen doit abandonner un peu de sa souveraineté particulière à la communauté populaire.
    Tout en visant à la même finalité, le justicialisme demande à l'individu une part moins grande d'abdication personnelle. Sans pour cela se détacher du collectivisme, il est extrêmement attaché aux garanties individuelles et nous ne pouvons que l'en féliciter. Perón expliquait ainsi le 9 avril 1949, au Congrès national de Philosophie quels doivent être les rapports du collectif et de l'individu :

« Il importe de concilier notre sens de la perfection avec la nature des faits, de rétablir l'harmonie entre le progrès matériel et les valeurs spirituelles et de donner à nouveau à l'individu un sentiment exact de la réalité. Nous sommes collectivistes, mais notre collectivisme a pour base l'individualisme et pour origine le trésor qu'est l'homme, du seul fait qu'il respire ».

 


Et le jour de la proclamation des Droits du Travailleur, il avait tenu à préciser :

« Notre conception est conforme au principe qui considère l'homme comme le centre des intérêts de tous les efforts des peuples et des gouvernements. Ceci nous a amenés à considérer les droits naturels qui, inhérents à la qualité humaine, découlent du travail et, en dernière instance, conditionnent sa liberté. Ces droits élémentaires, innés, subjectifs, inaliénables et imprescriptibles, que l'homme possède par sa seule raison d'être et dont la méconnaissance est la cause directe des malaises et des troubles sociaux actuels, constituent la base essentielle de nos raisonnements ».

 


« La valeur de l'homme est supérieure à celle de la société », écrit un théoricien du justicialisme qui, tout en affirmant l'attachement du peronisme aux libertés individuelles humaines, nous explique comment il concilie individualisme et collectivisme.

« L'homme, selon le justicialisme, n'appartient pas totalement à la collectivité, comme le pensent les collectivistes ; il n'en est pas davantage absolument indépendant, selon la pensée individualiste... Le justicialisme nie la dépendance, comme l'indépendance totale de l'individu envers la société. Et il affirme la dépendance absolue de certaines cellules de l'individu et l'indépendance non moins absolue de certaines autres envers la société. »

 


    « La liberté individuelle aune limite qui est le droit à la liberté de tous les autres individus », écrit encore Raul Mende, mais le justicialisme ne lui en reconnaît pas d'autre. Ici, pas de caporalisation ni d'arbitraire. On a vu plus haut, bien au contraire, avec quel soin minutieux les libertés individuelles sont garanties par la Constitution qui précise au surplus dans son article 15 : « L'Etat ne reconnaît pas une liberté qui porte atteinte à la liberté. »
    Dans la pratique, cela conduit à une liberté inconnue en France. La grande presse, qui traite volontiers Perón de « dictateur » pour obéir à ses maîtres, pourrait, si elle était libre, faire d'instructives comparaisons. Chacun en Argentine peut critiquer Perón s'il en a envie, dans les cafés, les restaurants et n'importe quel lieu public, se livrer à toutes les élucubrations verbales qu'il lui plaît de professer. Aussi longtemps qu'il existera une nation argentine, elle sera fidèle aux paroles de son hymne national :

Écoutez, mortels, le cri sacré :

Liberté, liberté, liberté !

Écoutez le bruit des chaînes rompues,

Voyez régner la noble égalité.

 




    Le mythe Nation a pour le justicialisme la même importance que pour ses frères européens. « Nous considérons le principe des nationalités comme sacré », déclare Perón le 7 juillet 1947. En accord avec ce principe, pour le justicialisme la nation, corps et âme de la communauté populaire, n'est pas le sol, n'est pas une forme géographique colorée sur une carte, mais la communauté ethnique groupée en nation.
    Il s'oppose par là complètement aux conceptions scélérates de l'O.N.U. intéressées à proclamer qu'un État n'est qu'une forme géographique qu'on peut peupler de qui l'on veut, sans discriminations de nationalité ni de race. Le justicialisme affirme au contraire, en accord avec la logique et avec la réalité, que la nation n'est pas une aire géographique, mais une assemblée d'hommes unis par certains liens. « Nos campagnes, nos villes, nos palais ne sont pas la patrie. Je ne l'ai jamais cru. La patrie, ce sont nos frères vivant sur le même sol ». (Discours de Perón du 7 avril 1949.)
    Le nationalisme argentin est basé sur la race, ou plus exactement sur l'ethnie. Perón la définit ainsi le 12 octobre 1947 : « La race n'est pas pour nous un concept biologique, elle est une chose purement spirituelle. C'est une somme de vertus impondérables, qui nous fait ce que nous sommes et nous pousse à être ce que nous devons être, en raison de nos origines et de nos destinées... La race constitue pour nous notre sceau personnel qui est indéfinissable et ne peut être confondu ». Chaque année, l'Argentine célèbre le 12 octobre un Jour de la Race, une législation précise, complétée par les directives des deux plans quinquennaux, protège au point de vue racial le caractère latin du peuple argentin.
    Il faut bien préciser que si les Argentins ne sont pas xénophiles, ils ne sont pas non plus xénophobes et toutes les races trouvent chez eux le respect qui leur est dû.

    Corollaire de son nationalisme, le justicialisme fait sien le principe de l'autodétermination des peuples. Chaque peuple a le droit d'organiser selon ses conceptions particulières ses propres formes d'organisation politique, sociale, culturelle, morale et économique. Nul n'a le droit d'intervenir dans les affaires intérieures d'une autre nation, le justicialisme considère que chaque nation est seule maîtresse chez elle.
    Bien meilleurs socialistes que les bolchevistes et les débris de la IIe Internationale, les peronistes sont les ardents protagonistes d'un nationalisme intelligent, non pas de celui qui consiste à chercher des aventures guerrières dont le peuple fait toujours les frais, mais d'un nationalisme qui consiste à mettre en valeur toutes les possibilités du pays et à protéger le peuple contre les fléaux sociaux, la misère, la maladie et la guerre. Ces objectifs, le justicialisme les a magnifiquement atteints.
    Du principe national découle le principe d'autorité et de hiérarchie. Voici comment Perón affirme, le 12 août 1944, ce principe de hiérarchie, ce principe du chef, en des termes qui rejoignent ceux de Codreanu :

« Les peuples doivent savoir, pour leur part, qu'on naît conducteur. On ne fabrique de conducteurs ni par décret ni par élections. Conduire est un art, et on naît artiste ; on ne fabrique pas d'artistes. On ne réalise d'œuvres d'art ni avec des recettes ni avec des brochures. La suprême condition de l'artiste est de créer. Pour conduire, il n'existe pas de modèles, le conducteur crée les siens propres. »

 


    Le nationalisme argentin s'accommode fort bien du principe fédéral, il n'y a d'ailleurs pas antithèse entre le principe du chef et le fédéralisme. Il était intéressant de voir de quelle manière le concept d'autorité s'accorderait avec le système fédéral, essai tenté pour la première fois au monde. Le mariage apparaît comme fort réussi.
    En Argentine justicialiste, l'organisation fédérative est respectée, chaque province conserve son propre gouvernement qui régit librement les secteurs qui lui sont réservés par la Constitution. Le chef, assisté des organismes fédéraux, coiffe les différents gouvernements provinciaux, leur communique sa volonté révolutionnaire et fait descendre la révolution justicialiste jusqu'au peuple de toutes les provinces par le canal des organisations syndicales et du parti peroniste.
    Il est à noter que l'organisation du parti peroniste calque le système fédéral argentin. Le fédéralisme officiel y prend la forme d'une hiérarchisation.
    Pour un régime juste, l'État n'est pas un cadre qui doit enserrer le citoyen et le faire marcher au pas. Personnification de la Nation, il n'a droit à l'existence que pour protéger les citoyens qu'il représente. C'est dans le cadre de cette protection que le justicialisme regarde l'assistance et la prévoyance sociales comme une obligation de l'État. Le citoyen a le droit d'exiger que l'État le protège contre les risques sociaux. En conformité avec cette doctrine, les obligations sociales de l'État sont incluses dans la Constitution.
    Sans donner de fonctions politiques aux syndicats ni confier la représentation politique de la population à une chambre corporative, le justicialisme cependant s'appuie largement sur les syndicats qui forment l'armature du régime. Si le justicialisme n'a pas été tout à fait radical dans ce domaine, les diverses déclarations de Perón, affirmant à plusieurs reprises que le justicialisme ne serait pas possible sans le syndicalisme, indiquent pourtant une évolution. Il a souvent dit que les Etats passent actuellement de l'âge où tout se décidait par les organisations politiques, à l'âge où tout se décide par les organisations sociales. S'appuyant toujours davantage sur les organismes syndicaux, il travaille à accélérer ce processus historique et son régime présente par là un caractère nettement corporatif.



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20 mars 2009 5 20 /03 /mars /2009 14:55


    Une tentative de type nouveau

    La situation politique actuelle impose aux nationalistes révolutionnaires d’infléchir leur action dans un sens différent de celui du passé. Il faut bien comprendre que des recettes qui ont toujours abouti à l’échec ne peuvent servir à nos tâches futures. Il est donc nécessaire de réviser nos concepts, tant théoriques que pratiques. Nous avons l’obligation de rompre avec un passé anarchisant et petit-bourgeois, qui a toujours interdit aux nationalistes révolutionnaires de disposer d’un appareil politique efficace. Nous devons changer nos axes de réflexion en sachant nous mettre à l’écoute des expériences intéressantes, même si elles ne sont pas de notre bord.
    Nous ne devons pas craindre une quelconque « contamination idéologique », si nous mettons au premier plan de nos préoccupations l’édification de notre construction doctrinale. La contamination idéologique ne peut exister que dans une situation de « vide théorique », vide qui assure la libre pénétration des thèses adverses.

    La stratégie politique à envisager doit être conçue pour répondre aux impératifs suivants :

–la création d’un parti révolutionnaire ;

–la formation de cadres politiques et militants dans une optique concrètement révolutionnaire ;

–la mise au point préalable d’une théorie révolutionnaire.


Quelles sont les méthodes les plus appropriées à ce but ?

–la création d’un organisme cohérent presse-informations-documentation qui assure les tâches diverses d’élévation du niveau culturel et « opérationnel » des militants nationalistes révolutionnaires ;

–la création d’une « école des cadres », fonctionnant sur un modèle scolaire, seul adapté à la forme éducative envisageable. Cours par correspondance, cours du soir et stages forment l’armature de cette école, des examens divers assurant le classement des militants et leur ascension ultérieure dans la hiérarchie du mouvement nationaliste ;

–la préparation attentive des axes de travail en milieu syndical, en vue de la formation de noyaux syndicalistes, en commençant par les milieux les plus réceptifs. Cette préparation doit se faire selon des normes similaires à celle de la mise en place du mouvement de type purement politique ;

–l’organisation d’un service d’ordre et de formation de jeunesse, coordonnés à la direction politique et disciplinés. La formation globale de ces éléments représente une nécessité encore plus impérative que celle des autres militants, tellement les risques de scission et de dissolution ou de déviation sont nombreux dans ce secteur particulier de l’action nationaliste révolutionnaire ;

–la formation d’un collège de responsables capables d’un travail politique réel et dont le nombre peut être relativement réduit. Ces responsables doivent provenir aussi bien des représentants les plus valables du courant nationalistes révolutionnaires que des militants issus des cours de formation du mouvement. Les responsables doivent d’ailleurs participer régulièrement aux cours de formation, afin de poursuivre le développement de leurs aptitudes techniques et politiques ;

–le dispositif nationalistes révolutionnaires doit être à la fois souple et cohérent, et la séparation parti/mouvement nationaliste répond à ces deux critères de fonctionnement.



La préparation de la révolution nationaliste

    Depuis bien des années, les militants nationalistes se réfèrent à l’idée d’une « révolution nationaliste », qui, abattant le régime plouto-démocratique, assurerait l’avènement d’un Ordre nouveau.
    Par contre, la définition de ce que pouvait être la dite révolution a toujours été absente ou, dans le meilleur des cas, à peine esquissée par les mouvements se référant expressément au nationalisme révolutionnaire.
    En fait, ces mouvement peuvent être définis comme strictement « historiques », c’est-à-dire uniquement gouvernés par les circonstances du moment et donc incapables d’une vision à long terme de leur stratégie révolutionnaire. Pour ne citer que le courant directement issu de Jeune nation, on a pu enregistrer les positions suivantes :


–Jeune nation et le Front nationaliste, en raison de la crise algérienne et des possibilités de soulèvement militaire qu’elle posait, ont envisagé la « révolution nationaliste » sous une forme putschiste, avec comme unique perspective, le noyautage d’un coup de force de l’armée ;

–Europe action, dans la phase de repli politique qui a suivi la débâcle de l’OAS, a théorisé son impuissance militante en bâtissant une stratégie de formation de cadres « révolutionnaires », en rejetant l’idée même de révolution dans un brumeux et lointain avenir. La désintégration de l’organisation a suivi la découverte par de nombreux cadres et militants que les perspectives révolutionnaires n’étaient que des hochets offerts par une direction qui ne croyait pas à une véritable évolution de ce type ;

–Occident, en raison de ses origines (scission étudiante « activiste » d’Europe action), a prétendu pratiquer une action révolutionnaire, au moins dans ses intentions, mais sans jamais y mettre le sérieux et la technicité indispensables. L’action révolutionnaire a donc pris la forme d’un vague activisme, arrogant en période de calme relatif (1966-1967) et inexistant en période de véritable crise révolutionnaire (mai 1968) ;

–Ordre nouveau, refusant de connaître le sort d’Occident (dissolution puis éclatement), a cherché à jouer la carte du « parti révolutionnaire ». Il s’agissait de créer, en trois phases successives, un parti révolutionnaire, disposant de cadres de valeur et d’une organisation solide, le tout au service d’une conception dynamique de la « Conquête de l’État ». Ordre nouveau, marqué à ses débuts par le soucis de « respectabilité », du au désir de se démarquer des « trublions gauchistes », et par la volonté de se limiter au maximum à une action légale, finit par laisser le champ libre à ses militants, en fonction de sa crise interne, et se laissa entraîner dans un processus de violence stérile, débouchant pour finir sur une dissolution que ses responsables avaient refusé de prévoir et dont ils n’avaient rien fait pour parer les conséquences.


    Quelle leçon pouvons-nous tirer de ces expériences successives ? Tout d’abord nous pouvons affirmer que les principes d’une action révolutionnaire doivent être « a-historique ». Si nous entamons notre action dans une période de calme, nous ne devons pas privilégier dans l’absolu une stratégie de lutte parlementaire. De même, si nous agissons dans une époque troublée, nous ne devons pas poser comme condition de notre combat celle régissant un quelconque activisme « urbain ».

    Nous devons poser comme a priori qu'il est impossible de définir ex nihilo une stratégie définitive de lutte révolutionnaire. Personne ne peut exclure par exemple que la France ait à connaître un processus de type insurrectionnel, dans les mois ou les années à venir.


    Comment, dans cette perspective, peut-on mettre sur pied un mouvement réellement révolutionnaire ?
    Il s’agit de revenir aux anciennes définitions, qui n’ont rien perdu de leur valeur. Un parti révolutionnaire est une organisation structurée et hiérarchisée, apte à vivre et à progresser dans la clandestinité aussi bien que dans la légalité, formée de militants éduqués politiquement et tactiquement, dirigée par des spécialistes confirmés et dotée d’une idéologie unitaire « opérationnelle ».
    Les nationalistes révolutionnaires, s’ils veulent sauver leur pays et sa civilisation, doivent accepter de s’organiser selon ces critères d’action.
    Le parti nationaliste révolutionnaire doit être une armée politique, capable de faire face aux changements de situation, disposant de cadres et de militants réellement formés, habitués à concevoir des actions de type très variable en refusant tout amateurisme.
    L’outil révolutionnaire ne peut se concevoir sans la réunion de moyens relativement importants, en sachant d’ailleurs que l’efficacité de l’organisation représente le meilleur moyen d’acquérir les finances indispensables à une lutte de longue durée.
    Notre conception révolutionnaire est, elle aussi, fort simple : nous devons savoir faire cohabiter une organisation de combat et une organisation de formation et d’encadrement.

    Dans l’hypothèse où le mouvement nationaliste révolutionnaire dispose des forces nécessaires à une lutte violente et soutenue, si ces forces sont disciplinées et organisées, il peut rallier à lui les masses de droite, qui recherchent toujours une force susceptible de les rassurer.
    Contrairement à ce que l’on répète, en paraphrasant la loi de 1936 sur les « milices armées », l’État ne combat pas spécialement les formations de type paramilitaire, il dissout les mouvements, fussent-ils inorganiques, qui provoquent du désordre dans les rues. Ordre nouveau a pu, pendant des années, faire parader ses militants en casques noirs sans être interdit. Sa dissolution n’a eu lieu que lorsque, tombant dans le piège gauchiste, il a mis en évidence ses moyens de combat dans la rue, et a attaqué Censier, des réunions trotskistes à Nice, etc. C’est l’action illégale du Groupe d’intervention nationaliste, ridicule paravent d’Ordre Nouveau, qui a entraîné la dissolution du mouvement et non l’allure paramilitaire de ses militants.
    Le Parti nationaliste révolutionnaire doit créer une organisation qui montre qu’il est capable de s’opposer à une prise de pouvoir par un coup de force communiste. Il faut bien comprendre que la position de « violence défensive » uniquement dirigée, au moins théoriquement, contre la menace de troubles d’extrême-gauche, est la seule qui soit susceptible de permettre le développement et la survie d’une formation de combat nationaliste.

    Le parti doit être parallèlement doté d’une structure administrative qui rendra crédible sa prétention à être un mouvement révolutionnaire. Être révolutionnaire, ce n’est pas se vouer à la destruction de l’ordre ancien, mais bien préparer l’avènement de l’Ordre nouveau (qui passe par la destruction, évidemment, des structures anciennes). Or, il faut préparer à l’avance sinon tous les points précis de l’État à construire, au moins les équipes qui seront chargées de la mettre en place et les grandes lignes directrices de sa future organisation. Pour cela, il est indispensable de mettre sur pied une véritable « contre-société ».
    Cette « contre-société » aura deux fonctions, aussi importantes l’une que l’autre :


–donner un plus grand dynamisme et une plus grande homogénéité aux nationalistes ;

–roder les futures équipes de direction de l’État nationaliste, tout en montrant à l’opinion publique que les nationalistes révolutionnaires possèdent un personnel politique compétent.



    Nous avons à faire la preuve de notre crédibilité politique et notre erreur a consisté à rechercher cette crédibilité dans l’action électorale, alors que celle-ci ne pouvait être couronnée de succès que dans la mesure justement où elle aurait suivi l’acquisition d’une crédibilité politique.

    Il est donc impératif de tout faire pour parvenir à ce seuil de crédibilité qui conditionnera notre action future.
    Nous représentons une force totalement inorganisée, c’est-à-dire pas de force du tout, et notre premier souci doit être de tout faire pour mettre fin à cet état de chose.
    Une possibilité d’action révolutionnaire n’existe que lorsque les éléments mécontents de la population sont encadrés par des gens ayant une conscience claire du but à atteindre et des moyens nécessaires pour y parvenir.
    Mais cet encadrement est lui-même fonction de la prise de conscience par les personnes aptes à ce travail politique du chemin à suivre afin de réaliser leurs aspirations révolutionnaires.
    Ce chemin ne peut être que celui de la lutte globale contre le régime en fonction de critères simples et cohérents :


–le parti est une armée disciplinée, lancée sans trêve à la conquête de l’État ;

–toutes les formes de lutte sont bonnes en soi et seule l’opportunité du moment doit permettre de faire un choix, obligatoirement provisoire, entre elles ;

–un corps d’officiers politiques, de techniciens révolutionnaires peut seul assurer la conduite de la lutte politique. Sa formation représente un préalable à toute action d’envergure ;

–la mise en place d’une idéologie opérationnelle et d’un programme concret sont elles-mêmes des préalables à la formation d’un corps politique et d’une organisation destinée à une action politique d’une certaine envergure.


    Comment concevoir la révolution que nous voulons ? Le plus logique est d’envisager un affaiblissement progressif de l’État, une crise de civilisation toujours plus grande, un effondrement toujours plus évident des structures internes de notre société. Quand la crise de l’Occident aura atteint une phase infiniment plus critique que celle qu’il connaît de nos jours, une solution radicale pourra devenir acceptable pour des millions de Français. Les problèmes économiques de plus en plus sérieux qui se posent à notre pays, et à toute l’Europe, ne pourront qu’accélérer les tensions existantes, les conduisant plus rapidement vers des bouleversements dramatiques.
    Une révolution ne peut s’accomplir que si nombre de conservateurs paisibles cessent d’être tentés par la perpétuation de l’ordre régnant. Il est plausible d’estimer que tel pourrait bientôt être le cas. Peut-on penser que la marche vers la révolution pourra se faire d’une façon brutale ? Ce n’est pas sur mais cette hypothèse ne saurait être écartée. Dans ce cas, seule une solution de force pourra mettre fin à la crise. Dans ce cas, seul le mouvement capable de lancer dans la rue de nombreux militants, combatifs et disciplinés, pourra remporter la victoire et protéger notre civilisation.
    Par contre, si le phénomène de dégradation est aussi lent que continu, il sera sans doute possible de rallier des centaines de milliers d’électeurs à un programme de salut public. Dans ce cas là, l’axe de la lutte se déplacera sur le plan électoral, ce qui entraînera l’adoption d’une stratégie politique fort différente de celle envisageable dans le cas d’une crise à dénouement brutal.
    En tout état de cause, nous pouvons considérer que le processus révolutionnaire est désormais bel et bien engagé et nous devons nous tenir prêts à faire face aux événements qui s’annoncent.
    Pendant des années, les nationalistes révolutionnaires ont dû se battre dans une sorte de brouillard, il n’était pas possible d’acquérir les « idées justes » car elles ne peuvent être fondées que sur l’expérience pratique et le contrôle idéologique. Lorsque la pratique existait, l’idéologie était absente, et lorsque l’idéologie faisait une timide apparition, c’était la pratique qui disparaissait aussitôt.
    Maintenant, il est possible de « marcher sur deux jambes », de tester les « idées justes » sur les deux plans. Les nationalistes révolutionnaires ont des instruments d’action et des instruments de réflexion. Ils peuvent travailler à construire l’outil révolutionnaire, dont ils ont, de plus en plus la vision claire et nette. Construire un parti révolutionnaire n’est pas une tâche facile, mais nous avons pour la première fois les bases théoriques nécessaires à sa constitution : de même, nous avons entrepris de rassembler les moyens nécessaires à son lancement, en sachant que ce qui nous a manqué le plus durant les années d’efforts infructueux, c’est finalement moins les moyens matériels qu’une équipe directionnelle politique capable de coordonner et d’animer nos campagnes politiques. Nous ne sommes qu’au début du processus de mise en place des structures du parti révolutionnaire, mais nous avons une idée claire de la marche à suivre et du but à atteindre.

    En rassemblant sur des thèmes politiques réalistes et efficaces de nombreux nationalistes révolutionnaires, nous pourrons redonner à notre camp l’esprit offensif qui lui manque depuis trop longtemps.
    L’heure est à l’action et non à la critique stérile, à la réflexion théorique et non aux récriminations sans avenir. Nous continuons notre combat, mais en le fondant sur des bases nouvelles.
    C’est par cette méthode politique que nous pourront engager une lutte plus efficace contre tous nos ennemis, ceux du Régime comme ceux du Bolchevisme.




François Duprat (26 X 1940 - 18 III 1978)
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18 mars 2009 3 18 /03 /mars /2009 14:56

Manifeste nationaliste révolutionnaire (par François Duprat)

    Notre situation politique impose une révision drastique de nos thèmes et de nos méthodes d’action, mais il ne s’agit pas, cette dois-ci, de se limiter à une critique, hélas trop facile, des expériences antérieures.
    Il est frappant de constater que nos axes de réflexion sont uniquement fondés sur l’histoire des mouvements nationalistes français, en dépit de nos professions de foi anti-chauvine et « européennes ». Nous négligeons systématiquement l’apport, passé mais aussi présent, de mouvements infiniment plus importants que les nôtres, sous prétexte d’une « spécificité nationale ».
    Certes, chaque pays a une vocation particulière et l’on ne peut plaquer sur lui des méthodes d’action adaptées à d’autres structures. Mais il ne faut pas exagérer cette difficulté. C’est l’incroyable ignorance de l’Histoire et de l’actualité par les chefs nationalistes français qui a conduit à cet état de fait.
    Il est donc possible de se mettre à l’école des autres organisations nationalistes, en faisant l’effort d’adaptation assurant la bonne interprétation de la stratégie et de la tactique suivies par ces mouvements.
    Le programme d’action nationaliste, qui est présenté ici, est directement issu de cette prise de conscience : le nationalisme révolutionnaire représente une valeur universelle que chaque peuple découvre selon des modalités propres, tout en se rattachant à un fond commun.
Notre tache est de définir cette « Voie française vers la Révolution nationaliste », seule possibilité qui existe pour notre cause de combattre pour la victoire et non pas pour de nouvelles défaites !


Qu’est-ce que le nationalisme révolutionnaire ?

    Nous devons essayer de définir d’une façon concrète ce qu’est le nationalisme révolutionnaire, en évitant de dire ce qu’il n’est pas (comme on le fait le plus souvent), mais bien en insistant sur ce qu’il est d’une façon positive.
    Le nationalisme révolutionnaire représente une tentative de prise en charge de la crise actuelle de l’Europe, sur le plan d’une remise en cause radicale des valeurs de la dite société. Ce nationalisme révolutionnaire propose comme noyau central de l’action humaine l’idée de Nation, conçue comme un rassemblement organique d’éléments qui, sans elle, ne représenteraient qu’un agrégat sans consistance et traversé de tensions destructrices. La Nation organisée ne peut être qu’une nation où les différences de classe ont été éliminées d’une façon réelle, et non par des vœux pieux, car de telles différences supposent automatiquement des tensions, néfastes à l’harmonie nationale. Ces tensions doivent être éliminées par l’État, qui est celui du « peuple tout entier ». Comment pouvons nous définir le peuple d’une façon cohérente ? Le peuple ne peut être que l’ensemble de ceux qui contribuent au développement national, ce qui en exclue les profiteurs, les parasites, les représentants des intérêts étrangers. Quels sont les groupes sociaux qui font partie de la réalité de notre peuple ? :

–les ouvriers, en tant que producteurs de base ;

–les paysans, petits propriétaires, fermiers, métayers ou ouvriers agricoles, puisqu’ils forment un groupe directement attaché à la production ;

–la petite bourgeoisie, dans la mesure où elle participe elle aussi à la production, et où ses activités de service et de distribution sont directement liées aux nécessités du développement harmonieux des échanges au sein de la population ;

–les éléments nationaux de la bourgeoisie en tant que classe maîtresse d’une bonne partie des moyens de production, c’est-à-dire tous les participants actifs à la production, au niveau de la direction et de la gestion, dans la mesure où ils forment un secteur réellement indépendant des groupes et intérêts étrangers.  Nous devons insister sur l’aspect national exigé de ce groupe en sachant qu’une bonne partie de ses membres sont, en réalité, liés à des forces étrangères à notre peuple.


    Le nationalisme révolutionnaire envisage la France comme une nation colonisée, qu’il est urgent de décoloniser. Les Français se croient libres alors qu’ils ne sont, en vérité, que les jouets des lobbies étrangers, qui les grugent et les exploitent, grâce à la complicité d’une fraction des classes dirigeantes, à qui ces lobbies jettent quelques morceaux de leur festin.
    Face à cette situation, nous pouvons estimer que les conditions de lutte des nationalistes révolutionnaires sont similaires à celles qui furent le lot des groupes nationalistes du tiers monde (il importe peu, à cet égard, que la France, en raison de son passé colonial, ait été, en même temps, durant une certaine période, à la fois colonisatrice et colonisée en particulier sous la IVe République).
    Il est évident que cette situation de pays colonisé n’est pas perçue par nos compatriotes ; cette cécité n’est due qu’à l’habileté de nos exploiteurs, qui n’ont de cesse que de prendre le contrôle des Mass Media, puis, insensiblement, de toute notre culture nationale, dont la réalité même peut désormais être délibérément niée. Par cette méthode, il devient incontestablement très difficile de faire comprendre aux Français qu’ils vivent dans un pays dont le peuple n’est pas forcément maître de son destin.

    Le processus de destruction de notre identité nationale, pour hypocrite et camouflé qu’il puisse être, n’en est déjà pas moins très fortement entamé et le premier devoir des nationalistes révolutionnaire est d’y faire face.
    La conscience de l’état de nation dominée qui est celui de notre patrie représente la première pierre de notre édifice doctrinal. En effet, nous devons estimer que notre devoir le plus impératif et le plus évident est de tout faire pour mettre fin à cet état de chose.

    Puisque les Français ne sont pas les vrais maîtres de leur patrie, la traditionnelle opposition faite par les nationalistes entre un « bon capitalisme » national et un « mauvais capitalisme » international, n’est qu’une pure et simple duperie. Le capitalisme en France ne peut être qu’un outil entre les mains des véritables propriétaires de la nation. Dès lors, les nationalistes révolutionnaires ne peuvent accepter une formulation économique totalement contradictoire avec leurs aspirations nationales les plus évidentes.
    Le capitalisme est une formule économique qui sous-entend l’esclavage de notre Nation.
    Mais il doit s’agir pour nous d’une opposition radicale et non uniquement dans les mots (comme ce fut trop souvent le cas). La Nation doit reprendre le contrôle de la vie économique, et, spécialement, des secteurs où les intérêts étrangers sont les plus puissants. Banques, secteurs de pointe, centres de recherche et de distribution doivent être repris par le peuple français. Le pseudo-sacro-saint principe de la propriété privée n’a pas à jouer, car des biens illégalement acquis ne réclament ni respect, ni compensation.

    Les biens repris par la nation devront être gérés selon les techniques qui assureront à la fois la pérennité de leur récupération et une utilisation rationnelle. La formule la meilleure serait probablement un contrôle souple de l’État et la remise au public, sous forme de don ou de vente à bas prix, d’actions représentant le capital des biens retournés à la communauté nationale.
    La reprise en main de notre économie permettra la récupération de l’indépendance nationale, puisque les éléments exploiteurs, privés de toute source d’enrichissement, n’auront plus aucune raison de demeurer sur le territoire national. Nous devons donc considérer que notre programme de libération politique et sociale de notre peuple passe par l’adoption d’une économie communautaire au niveau des moyens de production. Les moyens de production sont aujourd’hui aux mains d’intérêts étrangers, pour une bonne part, soit directement, soit indirectement. Or, la possession de ces moyens représente la possibilité d’exploiter le travail de notre peuple, en sécrétant de nouvelles richesses, qui assurent le renforcement de la mainmise extérieure.

    La récupération des richesses nationales doit aller de pair avec la fin de l’imprégnation culturelle étrangère au sein de notre sphère civilisatrice. Nous devons remettre en honneur notre tradition nationale, refuser les apports extérieurs qui en sont la négation ou l’affadissement, tout en redonnant à notre peuple une tâche à la mesure de son destin historique. Cette tâche ne peut être que l’édification d’un système politico-économique susceptible de servir de modèle aux nations confrontées au même problème, à savoir celui de la libération interne d’une influence extérieure prédominante.
    En redonnant aux Français, l’ambition des nationalistes révolutionnaires se plaçant à ce niveau, la volonté de combattre et de vaincre, nous donneront le signal de la renaissance nationale de la Patrie. L’histoire glorieuse de notre nation a toujours été fondée sur une volonté acharnée de vivre libre ; en restaurant cette tradition multiséculaire, nous mettrons fin à ce processus de « génocide culturel et biologique », qui vise à détruire notre peuple et son organisation, en tant qu’entité cohérente et unie.
    Notre volonté de libérer notre nation prend place dans une conception plus large de l’histoire, conception qui est à la base même de notre combat idéologique. Pour nous nationalistes révolutionnaires, l’histoire est fondée sur la compétition des peuples, qui agissent d’une façon bénéfique en vue de maintenir leur originalité dans tous les domaines, aussi bien sur le plan ethnique, culturel, politique, etc.
    Tout ce qui s’oppose à cette originalité vise, en fait, à détruire le moteur même de l’histoire et constitue une attitude foncièrement réactionnaire et anti-populaire, au sens plein du terme. Jamais l’homme n’aurait pu progresser sans une attitude foncière d’émulation, par rapport à ses semblables et les luttes entre groupes, ethniques ou autres, soit militaires soit pacifiques, ont toujours été le véritable moteur de l’histoire. L’indépendance des groupes humains s’est codifiée, il y a des centaines d’années, dans un type, désormais universel, celui de l’État-Nation. Par contre, les tentatives d’Empires, universels ou plus limités, se sont effondrées dans le sang ou représentent, comme les Empires chinois ou soviétiques, de véritables « prisons des peuples », vouées tôt ou tard, à l’éclatement, lors d’un nouveau « printemps des peuples ».

    L’État-Nation, moteur de l’histoire, doit être homogène, non pas sur un plan strictement racial, ce que l’expérience historique ne prouve absolument pas, mais sur un plan de cohésion et de coopération mutuelle entre les divers participants de ce groupement historique. Les éléments qui refusent cette cohésion ne sont pas les bienvenus dans cet État-Nation et, au minimum, ne doivent pas avoir la possibilité matérielle de développer leur influence et leur puissance au détriment de la communauté nationale.
    L’histoire ne peut prendre son sens que si la réalité nationale des peuples est préservée. Le colonialisme économique et culturel que nous subissons, vise directement à interdire à notre nation de conserver ses caractéristiques propres. Le meilleur moyen de développer les potentialités nationales réside dans le maintien de notre intégrité en tant que peuple et tant que des menaces pèseront sur celle-ci, cette tâche sera primordiale pour les nationalistes révolutionnaires.

    Ce souci exclusif de protection nationale ne se place pas dans le cadre d’une hostilité quelconque à l’encontre des autres entités nationales. Bien au contraire, nous pensons qu’une France nouvelle aurait comme objectif d’aider les autres nations-sœurs à acquérir le même type d’indépendance qu’elle.
    Si l’histoire est, avant tout, libre jeu des compétitions entre groupes organisés, le principe même de la vie humaine est, issu de cette conception. Pour nous, l’homme n’est capable de progrès que si sa vie est fondée sur deux principes clairs :

    –émulation compétitive avec ses concitoyens,

    –coopération avec les autres membres de son groupe.


    L’émulation, facteur de progrès, doit être complétée par la coopération, pour éviter un écrasement, toujours possible, des faibles par les forts. La véritable fonction de l’État est d’ailleurs de compenser les inégalités inévitables, afin de maintenir la cohésion du groupe national.
    Ce rôle de l’État est directement lié à notre conception de la nation ; l’État n’est pas seulement le gardien de l’indépendance de la Nation, il est aussi le garant de sa cohésion. L’État doit nécessairement disposer de larges pouvoirs et de moyens d’action étendus pour réaliser ses objectifs.
    Mais l’État doit être réellement au service du peuple et non au service exclusif des intérêts des groupes dominants ; il doit être le régulateur de l’activité nationale, en cherchant en priorité à permettre le libre développement de notre peuple. Pour cela, l’État doit être directement issu du peuple et contrôlé par lui ; le peuple doit être associé à l’État et à ses organismes de direction. La pseudo-doctrine élitiste, qui vouait la direction de l’État à des « élites » autodéterminées est à abandonner.
    L’État populaire doit être un État où le peuple exerce pleinement ses droits politiques. En outre, il doit avoir les moyens de s’opposer à toute tentative d’oppression. Le meilleur moyen réside dans un article bien simple de la Constitution américaine : le droit pour tout citoyen de détenir à son domicile des armes pour sa défense. Cette conception du citoyen armé correspond d’ailleurs parfaitement à notre volonté de réaliser une véritable défense nationale, par la mise en œuvre d’une organisation militaire de type populaire (dans le style d’une Garde nationale, ouverte à tous les citoyens français).
    Si les citoyens de l’État-populaire doivent pleinement participer pleinement à la vie et à l’organisation de leur État, c’est bien parce que nous refusons totalement la notion typiquement réactionnaire qui voudrait traiter les Français en mineurs incapables de prendre parti sur les grands problèmes de leur pays.
     Nous estimons au contraire que les Français sont des êtres majeurs et il est évident que notre peuple doit prendre en main son destin, sa libération passant par son adhésion librement consentie à une politique de défense nationale et populaire. Dans cette optique, les nationalistes révolutionnaires sont favorables à une conception politique étatique d’un style nouveau, c’est-à-dire une forme d’État authentiquement populaire et fort.
    Populaire, car tous les organismes étatiques doivent être issus du choix du peuple, le peuple participant à leur fonctionnement et à leur contrôle
    Fort, car sa tâche très lourde ne peut être assumée avec succès que par l’existence de moyens de gouvernement permettant la mise au pas des intérêts étrangers.
    L’État, ainsi conçu, est donc directement lié au peuple et ne peut exister que par lui et pour lui. Ainsi, dans cet État populaire, les Français auront la possibilité d’être les maîtres de leur destin, tout en récupérant leurs richesses nationales, dont ils sont aujourd’hui frustrés. De cette façon, ils comprendront parfaitement ce qui est en jeu et feront bloc pour défendre ce qu’ils auront ainsi reconquis, par leur action commune.

    Comment parvenir à la naissance de l’État populaire ? Il est certain qu’un bouleversement aussi profond et aussi radical ne pourra s’effectuer sans des luttes violentes et nombreuses. Les exploiteurs de la nation n’accepteront pas d’être privés de leur butin sans se défendre avec une détermination sauvage. Si la menace devient réelle, ils bafoueront sans hésiter leurs prétendues conceptions humanitaristes et répondront par la terreur. Le combat politique doit donc être mené sur deux plans :

    –sur le plan électoral, en informant les Français de ce qui les menace, en essayant de regrouper autour de nos thèmes le maximum possible de nos compatriotes ;

    –sur le plan purement politique, en mettant sur pied une organisation capable de relever le défi qui lui sera tôt ou tard lancé par les ennemis de la nation, organisation régie selon une discipline et une rigueur toutes militaires, en raison des circonstances où elle pourrait être amenée à intervenir.


    La lutte politique, surtout une lutte révolutionnaire radicale, est une chose sérieuse ; elle ne peut être menée que dans le cadre d’une organisation disciplinée et structurée. Il importe donc de séparer le mouvement nationaliste, organisation révolutionnaire, du parti chargé de représenter notre idéal au niveau de la population française.
    Cette action à deux niveaux permet d’encadrer dans des mouvements ayant des buts similaire des individus qui ne sauraient cohabiter dans un mouvement unique. Quiconque accepte intégralement les principes et les buts du mouvement nationaliste, qui veut en partager les tâches et les risques, doit être membre du mouvement nationaliste. Ceux qui ne peuvent accepter qu’une fraction, plus ou moins importante, de ces mêmes principes, peuvent être membres du parti, afin de militer pour l’application de ce programme minimum des nationalistes révolutionnaires.
    Dans ce cadre politique, les nationalistes révolutionnaires doivent considérer comme des ennemis d’un type similaire, sur le plan idéologique, les diverses organisations du centre, de droite ou de gauche. Ce refus de l’opportunisme doctrinal n’a évidemment rien à voir avec un pur sectarisme politique. Il est certain que nous devons réagir selon les nécessités du moment, sans nous laisser lier les mains par des a priori sans signification réelle.
    Les nationalistes révolutionnaires combattent pour une révolution radicale ; pour cela, il est indispensable que les militants soient éduqués dans un esprit véritablement révolutionnaire. Cette éducation ne peut commencer que par l’adhésion totale des militants à l’idéologie nationaliste révolutionnaire. Un nationaliste révolutionnaire doit accepter l’idéologie nationaliste révolutionnaire, en militant au sein du mouvement nationaliste, noyau combattant du parti de la révolution nationaliste. Un nationaliste révolutionnaire doit accepter la discipline interne de son organisation, refuser le fractionnisme et prendre conscience de l’ampleur de la mission qui est la sienne.

    La construction du mouvement nationaliste, premier cercle de la révolution est donc la tâche politique la plus urgente des nationalistes révolutionnaires. Elle doit prendre place avant toute autre initiative, car, sans le mouvement nationaliste, toute action politique nationaliste révolutionnaire serait vouée à l’échec, ce fut toujours le cas auparavant. La naissance du mouvement nationaliste ne peut pas être autoproclamée par tel ou tel groupe plus ou moins nationaliste révolutionnair. Elle doit être le fruit d’un intense travail aussi bien doctrinal que politique et organisationnel. Le mouvement nationaliste ne peut exister que dans la mesure où l’idéologie nationaliste révolutionnaire a été rendu opérative, c’est-à-dire après le renouveau réel de cette pensée. Il ne peut exister, aussi, que dans la mesure où les nationalistes révolutionnaires disposeront d’un appareil de formation et d’éducation, assurant correctement des fonctions absolument indispensables dans un parti de type révolutionnaire (écoles de cadres, revues théoriques et historiques, documents politiques, critique de l’actualité, etc.). Cette formation doit se faire sur deux plans :

    –une formation immédiate, assurant au noyau initial nationaliste révolutionnaire les moyens d’action qui lui rendront possible l’encadrement des futurs adhérents ;

    –une formation plus tardive appliquée aux nouveaux adhérents en vue de les intégrer réellement à l’organisation nationaliste révolutionnaire, tout en leur permettant de remplir les fonctions importantes au sein du mouvement nationaliste.


    Le processus de création du mouvement nationaliste ne peut être qu’une œuvre de longue haleine, mais il doit aller de pair avec des actions ponctuelles de type politique, militant ou électoral, afin d’éviter l’écueil classique de ce genre de formation étagée dans le temps, celui d’une déviation sectaire et ultra-minoritaire, entraînant un repliement de l’organisation sur elle-même. Pour ce, il est indispensable que les nationalistes révolutionnaires collaborent avec les autres fractions de l’opposition nationale, la rigidité doctrinale régnant au sein de leur mouvement leur permettant la plus grande souplesse au niveau de la tactique purement politique. Cette collaboration doit prendre la forme d’une politique de Front uni, soit sur des problèmes précis, soit dans le cadre de campagnes électorales ou de propagande.
    L’édification du mouvement nationaliste, lorsque les moyens matériels et humains seront réunis, se poursuivra par la mise en place d’un parti plus large, dont les objectifs se limiteront à populariser certains thèmes nationalistes révolutionnaires, sans chercher à en faire passer la totalité dans la masse sympathisante. Cette deuxième étape de l’édification de l’organisation nationaliste révolutionnaire devra assurer la participation des nationalistes révolutionnaires à la vie politique, économique et sociale de la Nation.

    Nous devons placer notre stratégie politique dans une perspective résolument optimiste : la France (et bien d’autres pays) va être confrontée à une crise d’ampleur inégalée depuis des dizaines d’années, ce qui entraînera la nécessité de solutions radicales. Notre faiblesse actuelle, au niveau de l’adhésion populaire, pourra, dans cette hypothèse, disparaître d’une façon extraordinairement rapide. Mais cette crise inévitable ne pourra tourner à l’avantage des nationalistes révolutionnaires que si ceux-ci se sont sérieusement préparés aux affrontements inéluctables. Le parti révolutionnaire peut se développer dans une période de bouleversement politico-économique, il n’a guère tendance à sortir alors du néant. Il est nécessaire de mettre en place les structures politiques du parti avant la crise, et non pas après son éclatement. Nous ne devons pas être atteints de cécité, en refusant de voir que la longue période de stabilisation de l’équilibre mondial, entamé dans les années cinquante, par une certaine mise en sommeil de la guerre froide et par l’extraordinaire relèvement économique de l’Europe, est en train de se terminer. Nous sommes de nouveau dans la « zone des tempêtes », et, dès lors, tout redevient possible pour les nationalistes révolutionnaires.
    Il ne faut pas se faire d’illusion : nos thèmes ne peuvent rallier à nous des gens satisfaits de leur sort ! Notre erreur a été aussi de croire qu'ils pouvaient nous rallier des gens vaguement inquiets ou même directement mis en cause par les bouleversements sociaux de ces dernières années.

    Nous devons admettre que seuls des gens au pied du mur peuvent nous rejoindre, pour des raisons autres que celles purement idéologiques qui ne peuvent évidemment concerner qu’une fraction extrêmement minoritaire de nos concitoyens.
    L’approche de la crise qui marque encore confusément la vie de notre pays nous impose une stratégie de tension. Nous devons essayer d’aggraver les contradictions internes de la société et de l’État, en nous opposant à toute tentative de « conciliation nationale », dont les véritables détenteurs du pouvoir ont probablement l’intention d’user si les tensions économiques et sociales s'accéléraient jusqu’au point de la rupture.
    Les nationalistes révolutionnaires ont le devoir de préparer la révolution autrement que par des discours creux ou des appels enflammés. Pour cela, ils n’ont qu’une possibilité et une seule : constituer un parti soumis à une discipline de type militaire et organisé selon des formes réellement efficaces, dans le cas de l’ouverture brusquée d’une situation de crise révolutionnaire. Mais pour y parvenir, les nationalistes révolutionnaires ont un long chemin à parcourir, chemin qui passe par l’abandon de leur tendance à l’anarchisme petit-bourgeois, à leur penchant à des solutions conservatrices, à leur fractionnisme et à leur propension à se mobiliser ou à se démobiliser au gré d’enthousiasmes ou de découragements successifs et cela pour le plus grand danger de leur mouvement.

    Nous devons former un type de militant qui soit adapté à l’action à mener, militant qui n’est pas forcément celui qui a été à l’honneur dans les mouvements précédents, mais qui doit être avant tout éduqué et « politisé », la politique étant curieusement absente des préoccupations essentielles de trop nombreux « nationalistes ». Ces militants nationalistes révolutionnaires, encadrés et organisés, auront comme souci primordial d’agir dans leurs milieux propres, en diffusant les thèmes de leur mouvement, de la seule façon qui soit efficace, celle de la lente imprégnation et maturation. Il faut d’ailleurs différencier les militants, les formations de jeunesse, le parti et le mouvement nationaliste, ne réclamant pas le même genre de militantisme et le même style d’action.
    Les nationalistes révolutionnaires ont comme mission de préparer la révolution qui vient et pour cela ils doivent rompre radicalement avec un passé de défaites et d’erreurs, au moins sur le plan purement national. Pourquoi se référer sans cesse à des groupes français du passé, dont l’incapacité totale saute aux yeux ?
    Pourquoi ne pas faire référence à des mouvements qui sont, eux, des modèles de succès et non d’échec. Les nationalistes révolutionnaires se lamentent depuis des années sur le peu de résonance de leur propagande en milieu ouvrier, et ils n’étudient pas les modalités d’action de mouvements comme le Justicialisme en Argentine ou les Croix fléchées en Hongrie, qui sont arrivés à rallier une grande partie du prolétariat, tant urbain que rural !
    Nous devons comprendre que les problèmes auxquels nous sommes confrontés sont, certes, originaux, mais que des leçons très précises peuvent être tirées de l’histoire du mouvement nationaliste révolutionnaire dans le monde.
    Nous entrons dans une nouvelle période de notre histoire politique ; aussi devons-nous entreprendre une révision radicale de nos thèmes, mais il nous faut éviter les erreurs qui furent commises dans des périodes similaires. En ne nous référant qu’à un passé très récent, la tentative de Venner, par Europe action, après la perte de l’Algérie, tentative originale de remise en cause du vieux fatras idéologique de l’extrême droite, a complètement échoué du fait de son enferrement dans une sous-philosophie dérivée d’un « matérialisme biologique », qui ne fut jamais clairement défini. La deuxième expérience, celle d’Ordre nouveau, après la tourmente de Mai 1968, a voulu faire l’impasse totale sur les problèmes idéologiques, en privilégiant l’action immédiate. Mais l’idéologie a la vie dure et les tensions que soulevait sa mise en sommeil ont finalement entraîné l’éclatement d’Ordre nouveau, avant même l’interdiction de ce mouvement.


(fin de la première partie).

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