Journal de combat nationaliste et identitaire : informations, formation, doctrine, chants
José-Antonio une pensée vivante (par Antonio Gibello)
«Plût au Ciel que mon sang soit le dernier sang espagnol versé dans des discordes civiles. Plût au Ciel que je trouve le peuple espagnol en paix ; il est si riche des qualités profondes : la Patrie, le Pain et la Justice. »
Et du soliloque adressé au peloton de la FAI, il reste le témoignage de ces paroles émouvantes qui résument son élan vital permanent :
« Mon rêve est celui de la Patrie, du Pain et de la Justice pour tous les Espagnols, et de préférence pour ceux qui ne peuvent gagner les bonnes grâces de la Patrie, parce qu'ils manquent de Pain et de Justice. »
La Patrie, le Pain et la Justice constituent la trilogie des aspirations sur lesquelles José-Antonio édifie toute sa pensée politique, pour un destinataire et un protagoniste unique : l'Homme.
L'Homme considéré comme porteur de valeurs éternelles, c'est-à-dire, investi de qualités qui sont consubstantielles à sa nature en tant que créature de Dieu et, par cela même, éternelles et intangibles, supérieures et antérieures à tout droit positif, parce qu'elles appartiennent à la sphère des droits naturels. José-Antonio synthétise ces valeurs en trois dimensions qui sont : la Dignité, la Liberté et l'Intégrité de la personne humaine.
Il est important de considérer clairement cette valorisation de l'homme pour comprendre le pourquoi de la critique que José-Antonio fait aussi bien du système libéral capitaliste que du système socialiste. N'oublions pas que José-Antonio, en s'opposant à l'Espagne de son temps, adopte envers elle, une attitude critique, logique et fondamentale. Il essaie d'analyser intellectuellement un phénomène aussi bien politique, sociologique, économique que scientifique. C'est cet esprit critique qui va éclaircir et définir en ]osé-Antonio les maux qui tenaillent et immobilisent un peuple qui avait accueilli avec allégresse le changement de la monarchie à la république, et qui avait espéré que ce changement de la monarchie apporterait, en fin .de compte, la transformation radicale de la vie espagnole toute entière. Le groupe d'intellectuels qui, avec son manifeste, amena la chute de la monarchie et l'avènement de la seconde république, l'avait poussé à cette joie, à cet espoir. Le manifeste fut signé par Ortéga y Gasset, Perez de Ayala et Maranon. Ils invitèrent les Espagnols à se mobiliser dans l'espoir d'une tâche collective de renaissance nationale, qui marqua le destin de toute une jeunesse qui refusait de continuer à traîner la vie plate, sans envergure et sans horizon, à laquelle l'avait conduit la décadence de la monarchie.
Pour comprendre depuis la perspective de notre époque, la pensée et l'ensemble des idées de José-Antonio, il est indispensable de les situer dans l'environnement historique, social et culturel de leur époque.
D'autre part, ce que nous appelons « doctrine » de José-Antonio ne se limite pas à un programme constitué de définitions et de solutions concrètes, ni à un formulaire hermétique composé de desseins plus ou moins immédiats.
Il s'agit d'un faisceau de vecteurs qui partent de l'homme, de la conception spirituelle de l'homme, face aux thèses matérialistes du capitalisme libéral et du capitalisme d'Etat socialiste.
Et, de l'homme, on passe à son environnement le plus proche : la famille, la commune, le syndicat, pour culminer finalement à l'édification de l'Etat. Je parle de vecteurs d'idées, c'est-à-dire, des axes de direction d'une pensée vivante que l'on peut projeter dans le temps et dans l'espace et, par cela même, d'une pensée dynamique, ouverte et pénétrante dans le futur, comme des flèches lancées à l'infini.
C'est ce qui explique l'évolution logique et le développement que subirent les idées de José-Antonio, depuis leurs précoces participations dans les virevoltes politiques de l'union monarchique, jusqu'à leurs mûres réflexions dans les journées déjà révolutionnaires, chargées de dramatisme et de vigueur, des discours prononcés au cours des années 1935 et 1936.
De l'union monarchique aux journées révolutionnaires.
C'est pour cela que j'insiste sur le fait que sa pensée ne serait pas compréhensible, sans la valorisation des événements qui marquent l'histoire agitée des années pendant lesquelles il lui a été donné de vivre. Années marquées par de dramatiques événements : en 1909, la tragédie de Barranco del Loboa lorsque l'Espagne faisait la guerre en terre marocaine, et la semaine tragique de Barcelone, conséquence directe de ce revers guerrier; 1917, la grève révolutionnaire suscitée par le parti et le syndicat socialiste UGT (Union General del Trabajo) ; 1921, le désastre de Annual et l'ouverture de l'enquête Picasso qui accusait le roi Alphonse XIII d'être responsable de l'hécatombe et qui aurait conduit donc huit ans plus tôt, à la chute de la monarchie si le coup d'Etat du général Primo de Rivera, en 1923, ne s'était pas produit dans l'intervalle.
Ce fut précisément la dictature et le traitement ingrat qu'il subit de la part du Roi, qui furent directement à l'origine, de l'amour filial blessé et de l'entrée définitive dans le tourbillon de l'action politique de José-Antonio. Quand José-Antonio fait irruption avec son discours fondateur de la Phalange espagnole, l'Espagne se trouve alors en campagne électorale. La deuxième république avait déjà subi de graves crises : d'une part, le feu mis aux églises (en mai 1931) et la désaffection consécutives de ces intellectuels qui, après avoir participé à son avènement, s'avisent de la trajectoire trompeuse de la république en disant : « ce n'est pas cela, ce n'est pas cela... » et d'autre part, le soulèvement militaire dû à la politique de démantèlement de l'armée imposée par Manuel Azana. La tragédie de Casas Viejas, véritable insurrection prolétaire contre la république bourgeoise, pompeusement auto-proclamée, république des « travailleurs de toutes les classes » survient également et de manière non moins significative.
Cette rébellion prolétaire, soutenue par un groupe d'anarchistes, fut étouffée par la brutale et expéditive méthode des « tirs au ventre » ordonnée par « l'exquis » Manuel Azana lui-même. Cet Azana fut l'un des responsables les plus importants de la guerre civile.
José-Antonio affirme, en analysant la réalité qui l'entoure, (1933 est en Europe l'année où Hitler accède démocratiquement au pouvoir, et où le dixième anniversaire de la Marche sur Rome voit le triomphe du fascisme italien de Mussolini) :
« Quand nous, hommes de notre génération, nous ouvrons les yeux, nous nous trouvons face à un monde moralement en ruines, un monde scindé par toutes sortes de différences ; et en ce qui nous concerne de près, nous nous trouvons dans une Espagne moralement en ruines, une Espagne divisée par toutes les haines et par tous les antagonismes ».
Le système libéral est responsable de la division de l'Espagne.
Quelles sont dans la pensée de José-Antonio les causes de cette division ?
En premier lieu, la doctrine libérale. La critique que José-Antonio fait du système libéral et de ses conséquences, garde aujourd'hui toute sa fraîcheur. Par le principe du « laissez faire », du « laissez passer », l'Etat libéral se constitue « en simple spectateur des luttes électorales ». Dans le monde politique tout cède devant la pratique du suffrage « cette farce des bulletins dans une urne en cristal ». Et dans le domaine économique, il abandonne le devoir de diriger qui lui échoit et laisse les lois du marché déterminer la marche de l'économie.
Peu importe à l'Etat libéral fondé sur le système des partis politiques, (et nous sommes en train de constater le fait à nouveau en Espagne), que la lutte électorale débouche irrémédiablement sur une lutte acharnée pour le pouvoir, en utilisant toutes les querelles bruyantes, tous les mensonges, tous les pactes, tous les dessous de table et toutes les tractations, en marge de la volonté des électeurs et que, comme José-Antonio le déclara, le change en « système le plus ruineux de gaspillage d'énergies ». Peu importe à l'Etat libéral que les partis « soient pleins d'ordures ». Comme rien ne l'affecte, mais au contraire paraît le réconforter, à savoir que le système capitaliste, version économique du libéralisme, consente à ce que les lois du marché soient conditionnées et perverties, en les contrôlant, en les manipulant, en les prostituant moyennant la concentration financière et industrielle et l'oligopole des canaux commerciaux de distribution. Ils ruinent le petit et le moyen chef d'entreprise, le travailleur autonome, le commerçant indépendant et, même les grandes entreprises de création nationale que l'on voit soumises à la persécution et à la démolition par l'internationale de l'argent complice de ses cipayes intérieurs, souvent installés aux commandes.
Nous ne parlons pas seulement du passé. Cette réalité n'est pas uniquement celle d'hier, comme nous le verrons à présent.
En faisant cette critique du système libéral et capitaliste, José-Antonio ne se contente pas de le dénoncer dans son discours fondateur (considéré par lui-même comme un prélude), mais il insiste lors de toutes ses interventions et écrits postérieurs, avec une précision et une rigueur intellectuelle croissante.
Dans ses discours à Valladolid (en José-Antonio mars 1934 et en mars 1935), dans la conférence du Cercle de l'Union Commerciale devant un auditoire de personnalités de la vie économique, dans les deux meetings populaires du cinéma de Madrid en mai et novembre 1935, et finalement dans celle qui devait être sa dernière grande comparution publique dans la capitale de l'Espagne : le discours du cinéma Europa, prononcé le 2 février 1936 en liaison radiophonique avec le cinéma Padilla, où il définit la position de la phalange avant les élections qui devaient voir le triomphe du Front Populaire.
Une fois connue, l'impeccable rigueur de l'analyse de José-Antonio et spécialement les événements, et les diagnostics des intellectuels les plus rigoureux de notre époque (et qui osent encore l'être), on est stupéfait par l'acharnement qui, à nouveau, se manifeste dans la défense et l'exaltation du libéralisme partisan et de l'économie de marché (instrument du capitalisme international) comme unique débouché pour l'Europe et le monde après l'apparent écroulement du socialisme soviétique ; sans vouloir remarquer par myopie ou intérêt abâtardie, étranger à l'intérêt des peuples européens et aux principes mêmes de notre culture et de notre civilisation, l'immense échec vécu aujourd'hui avec acuité par le système démocratique partisan et, plus encore la crise profonde dans laquelle se débat dans le monde entier, l'économie capitaliste dont la perversité essentielle réside dans son injustice distributive.
Comme preuve de cette erreur de perception, je fais part curieusement d'un fait récent qui nous concerne, spécialement nous, Espagnols. Le 7 octobre dernier, dans son discours devant l'Assemblée française ( significatif sans aucun doute non parce qu'on a mis en avant qu'il était le premier que prononçait un chef d'Etat espagnol, mais, selon mon jugement, il est significatif parce qu'il exprime la subordination dont souffre l'Espagne, à l'égard de la politique française), le roi Juan Carlos fit ressortir « le rôle décisif des institutions démocratiques dans l'idée européenne » et évoqua « l'originalité de la période actuelle de notre histoire » par deux remarques : « le renforcement indiscutable et désormais indiscuté au moins de manière globale et radicale, du système démocratique et en second lieu, par l'existence de la Communauté Européenne ».
[seconde partie ; troisième partie]