Journal de combat nationaliste et identitaire : informations, formation, doctrine, chants
Extraits des discours du Maréchal Pétain sur les trusts
« Le travail des Français est la ressource suprême de la Patrie. Il doit être sacré ! Le capitalisme international et le socialisme international qui l'ont exploité et dégradé font également partie de l'avant-guerre...
... Pour notre société dévoyée, l'argent, trop souvent serviteur et instrument du mensonge, était un moyen de domination... »
(Appel du 11 juillet 1940)
« Deux principes essentiels nous guideront : l'économie doit être organisée et contrôlée. La coordination par l'Etat des activités privées doit briser la puissance des trusts et leur pouvoir de corruption... »
(Message du 11 octobre 1940)
« Quant à la puissance des trusts, elle a cherché à s'affirmer, de nouveau, en utilisant pour ses fins particulières, l'institution des comités d'organisation économique... Les grandes sociétés s'y sont arrogé une autorité excessive et un contrôle souvent inadmissible. A la lumière de l'expérience, je corrigerai l'œuvre entreprise et je reprendrai contre un capitalisme égoïste et aveugle la lutte que les Souverains de France ont engagée et gagnée contre la féodalité. J'entends que notre pays soit débarrassé de la tutelle la plus méprisable : celle de l'argent.
La révolution nationale n'est pas encore entrée dans les faits parce qu'entre le peuple et moi s'est dressé le double écran des partisans de l'ancien régime et des serviteurs des trusts ».
(Allocution du 12 août 1941)
INTRODUCTION
Trusts et Révolution Nationale
Après bien d'autres témoignages portés contre les trusts, les discours du Maréchal Pétain sont des documents capitaux, sanctionnés par l'autorité de leur auteur. Dans la nation française, et particulièrement dans ce qu'on appelle les masses populaires, règne un sentiment très profond auprès duquel ils auront trouvé écho. Dans ce domaine, une transformation affirmée dans les textes et attendue dans les cœurs constitue un élément essentiel de la Révolution Nationale.
S'il est vrai que toute révolution débute par une prise de conscience, il faut donc se demander ce qu'il faut entendre par « les trusts ». C'est ensuite seulement que l'on peut porter un jugement, envisager des réformes et des moyens de lutte. C'est ce que nous voudrions faire très brièvement dans cette brochure, en donnant essentiellement quelques éléments d'information qui permettront, cas échéant, d'apprécier et de soutenir des mesures révolutionnaires.
Les trusts et le règne de l'argent
Quand on parle de lutte contre les trusts, le vocable de « trusts » ne désigne plus en aucune façon l'institution de droit anglo-saxon qu'il a qualifié à l'origine. Il éveille un complexe de faits qui constituent l'ensemble du régime économique de notre époque. D'abord le règne de l'argent. La richesse à l'époque moderne possède un caractère particulier : elle peut se traduire à n'importe quel moment en papier qui passe sans effort et sans laisser de traces d'une main à une autre ; le téléphone et le télégraphe lui font franchir l'espace. Elle disparaît soudain en s'éparpillant dans une infinité de portefeuilles, elle se concentre brusquement dans les comptes d'une banque. Toujours mobilisée, ici elle se concentre pour frapper, là elle s'évapore pour fuir la responsabilité ou les coups. Par rapport aux hommes, elle a conservé toute sa vertu tentatrice qui s'est parée de l'attrait nouveau de la discrétion et de la facilité : tout s'achète, tout se vend, c'est le refrain facile du pessimisme. Tous profitent de ces avantages certains, mais tous ont l'intuition plus ou moins confuse qu'ils entraînent de grandes injustices. C'est le triomphe d'un régime de valeurs fictives, de valeurs de représentation qui détachent la richesse des vrais biens que l'homme peut tenir dans ses mains ou sentir sous ses pieds, qui sont des choses qui ont une histoire, une odeur, une dureté ou une douceur valables pour les yeux ou pour la peau. La richesse n'a jamais suffi à épanouir l'homme, même celle des labours profonds ou des forges retentissantes. Mais la richesse moderne plus que toute autre est déshumanisée. Elle engendre la misère des facultés les plus précieuses de l'homme et la misère tout court ; car des hommes meurent tous les jours de ce règne de l'argent, pas tous... Y échappent les habiles qui se débrouillent dans cet univers abstrait et compliqué, les forts qui s'accroissent de toutes leurs rapines, les trusts en un mot.
Les trusts et le règne de la grande entreprise
Car le régime des trusts est constitué également dons la mentalité commune par l'existence des grandes entreprises, fruit de ce que l'on appelle en langage d'école, la concentration économique (1). Ces grandes entreprises se sont constituées petit à petit aux dépens des plus faibles dont elles ont racheté les moyens de production et absorbé la clientèle. Le chef de petite ou de moyenne entreprise éprouve quotidiennement combien le jeu de la libre concurrence, fondé en théorie sur des notions de liberté et d'égalité, tourne en loi de la jungle. Le consommateur, sans pouvoir analyser lui-même la part de bienfaits ou de méfaits qu'il recueille dans cet état de choses, accuse finalement les trusts de ses malheurs, en vertu du réflexe aussi éternel que l'humanité qui dresse les « petits » contre les « gros ».
L'efficacité de la lutte contre les trusts
Si l'on trace, face à ces constatations rudimentaires, l'histoire de la lutte des pouvoirs publics contre les trusts, on est frappé de la pauvreté des moyens de combat (manifestations verbales mises à part) et des résultats. Il semble même que chez la plupart des gouvernants, « la lutte contre les trusts » ne corresponde à aucune idée arrêtée, à aucun dessein politique, pas même à un réel jugement de valeur.
Il serait significatif à ce point de vue de comparer la campagne électorale du Front Populaire de 1936, les discours et les programmes des chefs de parti, avec la pauvreté des réalisations. Pour des motifs militaires touchant aux exigences de la Défense Nationale on a nationalisé quelques très rares entreprises pour le compte du ministère de la Guerre. Pour le ministère de l'Air la prétendue opération de nationalisation a conduit au renforcement des anciens industriels propriétaires. Ces quelques rarissimes opérations n'ont donné aux trusts que l'occasion de montrer que – comme nous l'avons vu depuis – ils prendraient en temps et lieu leur revanche. Pour le surplus, la soudaineté des réformes sociales imposées en 1936 a amené l'effondrement de bien des entreprises moyennes et petites dépourvues des crédits suffisants pour étaler en durée leurs charges nouvelles. En définitive, les trusts ont été les grands bénéficiaires de 1936.
Des constatations aussi désenchantées conduiraient à se demander si les trusts sont tellement forts qu'il est chimérique de vouloir lutter contre eux, ou bien s'ils sont tellement nécessaires et tellement bienfaisants qu'il faut les accepter tels quels, ou bien encore s'ils ne constituent pas à proprement parler un mythe. Nous pensons qu'ils ne constituent pas un mythe, qu'une certaine lutte contre eux est nécessaire et que, quelle que soit leur force, elle est possible. Mais pour pouvoir justifier ces affirmations, il est nécessaire d'examiner d'un peu plus près lia nature des trusts et de remplacer par des idées claires et précises les vagues notions que recouvre en général le vocable de « trusts ».
Méthode d'exposition : Les trusts comme le problème de structure
Ces deux intuitions du sens commun sur la notion de trust sont exactes. Ce sont bien de grands organismes (grandes entreprises) qui ont pu se créer grâce à la seule force matérielle (règne de l'argent) qui tranche les différends dans le régime de libre concurrence. Il y aurait bien des manières d'aborder l'étude de leur nature et de leur rôle. Comme les trusts caractérisent essentiellement une « structure » – de l'organisation économique, pour préciser les questions que l'on peut se poser à leur sujet, il est indispensable de commencer par définir ce qu'est une « entreprise ». On verra alors sans peine que les trusts se caractérisent dans le cadre des entreprises à la fois par leur grandeur et la manière dont ils sont gérés.
Notion d'entreprise
D'un point de vue économique, une entreprise se caractérise du double point de vue de l'unité de direction et de l'unité de bénéfice. Toute entreprise comporte d'abord une direction unique à laquelle tous ses éléments sont subordonnés. Cette unité de direction apparaît facilement dans l'entreprise artisanale qui ne groupe souvent qu'un ou deux ouvriers et un apprenti sous la direction du maître artisan. Elle est également très sensible quoique moins immédiate dans une gronde affaire industrielle où en remontant par tous les échelons d'une hiérarchie parfois étendue on trouve une centralisation dans un homme ou dans un organisme unique : directeur général ou conseil d'administration. Cette unité de direction n'a qu'un seul but, en régime capitaliste tout au moins, le bénéfice. L'entreprise ne peut fonctionner indéfiniment sans faire de bénéfices ; il faut traduire dans un rapprochement, dans une confrontation de tous les services le résultat global, dont la direction est finalement responsable. Ainsi donc unité de direction, unité de bénéfice sont les deux aspects, l'un sur le plan des moyens, l'autre sur le plan des résultats, de cette unité organique qui constitue une entreprise et l'oppose aux autres dans la lutte économique.
On peut vérifier l'intérêt de cette définition à propos d'une entreprise de construction automobile, si celle-ci possède des ateliers très différents, des usines très dispersées, consacrées à la carrosserie, aux moteurs, aux châssis, aux pneumatiques, aux accessoires, aux engins militaires, elle constitue néanmoins une entreprise unique si toutes ces activités aboutissent finalement à un résultat unique, un seul bénéfice poursuivi sous l'impulsion générale d'une direction unique. L'intérêt de cette définition est d'ailleurs précisément de faire toucher du doigt l'unité réelle d'un groupe d'installations que l'isolement géographique, la diversité des fonctions, ou l'apparence juridique (nous insisterons longuement sur ce point) pourraient faire considérer comme doués d'une autonomie propre.
Les formes d'entreprises
Cette définition de l'entreprise est une définition économique s'appuyant sur la réalité essentielle de l'effort économique. Elle permet déjà d'analyser la structure d'un milieu donné en dénombrant les entreprises, en caractérisant leur complexité ou leur grandeur. Elle n'est pourtant pas suffisante pour définir une structure économique parce qu'elle laisse dans l'ombre la « forme » de l'entreprise. Qui exerce l'unité de direction ? A quelles personnes sont destinés ces bénéfices qui justifient l'entreprise ? On pose ainsi le problème des rapports entre les divers facteurs -travail, direction et capital – qui concourent à l'activité de l'entreprise. On soulève alors une question non plus seulement économique, mais également juridique : les entreprises peuvent se couler dans le moule de différentes formes juridiques. Pratiquement cette question de formes est déterminante pour classer une structure dans le cadre général du capitalisme; parce que c'est elle qui détermine si ce sont les mêmes personnes qui fournissent à la fois capital, direction et travail (entreprise artisanale) ou bien si ces trois éléments appartiennent à des personnes séparées (société anonyme), ou bien si capital et direction sont réunis (société en nom collectif), etc... Chacun de ces éléments mérite d'ailleurs une étude séparée. On peut se demander à qui par exemple appartient le capital, à l'Etat (entreprises publiques), aux consommateurs (formule coopérative), etc... Comme on le voit, l'étude des formes d'entreprises soulève des questions capitales, dont seule la solution permettra de donner de la description et de la valeur d'une structure une image exacte.
Ces considérations dictent notre plan dans l'étude des trusts comme problème de structure. Il faut d'abord s'appuyer sur la notion d'entreprise et rechercher comment on peut caractériser les trusts à cet égard. On peut rechercher ensuite quelles formes d'entreprises correspondent aux trusts.
Par rapport à la définition de l'entreprise, les trusts sont tout simplement de grandes entreprises. On peut donc les définir ainsi : ce sont des organisations complexes qui ont pour objet de faire porter sur des ensembles de plus en plus vastes une unité de direction sanctionnée par une unité de bénéfice. La question capitale qui se pose à leur sujet est la suivante : sont-ils le résultat d'une évolution nécessaire et inévitable, et en cas de réponse négative faut-il contrecarrer leur développement ? Pourquoi et comment ? Nous essaierons de donner une réponse à ces questions dans une première partie « La grande entreprise ».
Par rapport aux formes d'entreprises, les trusts se caractérisent essentiellement par une direction qui échappe de plus en plus au contrôle du capital et du travail, par des répartitions singulières du bénéfice, par une clandestinité générale de leurs opérations essentielles. Ils emploient essentiellement la forme de la société anonyme et de l'entente industrielle, grâce auxquelles ils échafaudent de vastes structures qui présentent souvent un caractère international. La description de leurs formes fera l'objet de notre seconde partie.
Comme suite naturelle aux deux parties précédentes, une conclusion-critique présentera le jugement que l'on peut porter sur les trusts en fonction d'une économie que l'on voudrait pénétrée de justice sociale et du respect de la personne humaine.
Le schéma de ce fascicule se présente donc de la manière suivante :
lre partie. Les trusts comme grandes entreprises : leur nécessité et leur valeur.
2e partie. L'organisation des trusts : sociétés anonymes et ententes industrielles.
Conclusion critique.
Remarque générale sur le caractère essentiel des problèmes soulevés
Avant de clore cette introduction, une remarque corrigera ce que la présentation du problème ainsi conçu a d'un peu sec, d'un peu scolaire. Le problème a été présenté sous l'angle d'une question de structure économique, parce que c'est le plus juste, le plus clair, le plus apte à faire apparaître les perspectives d'une réforme. Mais il faut bien comprendre que ce sont tous les problèmes économiques de notre époque que l'on met en cause. D'abord la question de savoir si l'économie d'une nation est ou doit être dirigée et vers quelles fins ; ensuite et par voie même de conséquence la matière des prix, de l'épargne, du crédit, des rapports entre l'économie nationale et l'économie internationale, etc... Il n'y a pas une des difficultés de la science moderne qui n'ait à être prise en considération en matière de trusts. Nous aurions donc pu écrire, pour éclairer les grands thèmes du débat, un véritable traité d'économie politique en tête de ces développements. Nous avons préféré les faire apparaître au fur et à mesure du progrès de notre exposition pour ne pas surcharger au départ l'esprit de notre lecteur et lui laisser refaire intellectuellement l'expérience de tous les réformateurs. Le problème des trusts ne saurait être justiciable de quelques slogans ou de faciles promesses. C'est à la base même de notre société moderne que l'on s'attaque en en désirant la réforme. Seuls une ténacité indomptable, une prudence poussée jusqu'à la ruse et un idéal sans discussion ni faiblesse, éviteront d'écraser l'homme sous les énormes rouages et le poids de matière que son génie inventif est venu animer des lois de la pesanteur en attendant celles de l'Amour.
Introduction du livre Les Trusts du professeur Paul Reuter, publiée par les Presses universitaires de France pour l'Ecole nationale des cadres d'Uriage.
(1) Dans la terminologie technique, on distingue les termes « trusts », « cartels », « ententes économiques ». Mais les auteurs discutent sur les définitions.