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22 juin 2008 7 22 /06 /juin /2008 18:12
Les Deux Compagnons sont également connus sous le titre Les Compagnons ou Deux compagnons. Le chant peut être interprété comme un canon à 3 voix, on lui connaît deux airs différents et de nombreuses variations de paroles. Il serait paru pour la première fois dans le recueil Jeunesse qui chante et serait l'oeuvre de Pierre Jamet.
Parmi les variations les plus notables, on trouve comme 3e couplet :
« Cheminant ainsi sur terre / Nos deux joyeux compagnons / Un soir d’été arrivèrent / Près d’une vieille maison. » ou « Voyageant ainsi sur terre / Les deux joyeux compagnons / Un soir d’été arrivèrent / Près d’une vieille maison. »



I. Par les monts et par les plaines
S’en allaient deux compagnons, compagnons
{Ils chantaient à perdre haleine
Trouvant qu’ la vi’ a du bon, du bon (bis)

II. L’un jouait de la guitare
L’autre ne jouait de rien, et de rien
{Dans ce métier il est rare
De manger quand on a faim, a faim. (bis)

III. Un soir d’été arrivèrent
Près d’une vieille maison, la maison
{Devant la porte trouvèrent
Une dame au corps mignon, mignon (bis)

IV. "He ! Bonjour dame l’hôtesse"
Dirent nos deux compagnons, compagnons,
{Notre ventre crie détresse
Depuis trois jours nous marchons, marchons (bis)

V. Dame hôtesse toute aimable
Fit entrer nos compagnons, compagnons,
{"Asseyez-vous à ma table
Vous paierez d’une chanson, chanson"(bis)

VI. "Grand merci, dame l’hôtesse"
Dirent les deux compagnons, compagnons
{Après toutes vos largesses
Ecoutez notre chanson, chanson (bis)

VII. Quittant la bell’ créature
Nos deux joyeux compagnons, compagnons
{Repartirent à l’aventure
En chantant une chanson, chanson (bis)

VIII. Et la généreuse hôtesse
Rêvant sur son corps mignon, corps mignon
{Regarda avec tristesse
S’éloigner les compagnons, compagnons (bis)


Ecouter le chant ci-dessous :

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18 juin 2008 3 18 /06 /juin /2008 18:15
Selon le site des troupes de marines, il s’agit d’une chanson de gaillard d’avant - la partie du navire où les marins pouvaient se détendre entre les quarts - du temps des corsaires (début du XVIIIe siècle). Ces chansons «ne sont pas destinées à aider la manœuvre, d’où leur ton plus féerique ou trivial. Alors que les chansons de marins ne devaient en principe pas être chantées à terre, Les Filles de La Rochelle sont passées dès 1841 (date de leur première publication) dans le répertoire populaire.» Dans certaines versions, le second couplet n’est pas chanté.
Quelques variations : « Qu’avez-vous gentill’brunette » (l. 1, c. 5) ; « Avez-vous perdu père et mère » (l. 3 c. 6) ; « J’ai perdu » (l. 1 c. 7). Parfois le second couplet ne figure pas dans les carnets de chants.
Voici ce qu'en disait Gérard de Nerval qui propose des paroles un peu différente :

« Quoi de plus pur, d'ailleurs, comme langue et comme pensée ? Mais l'auteur ne savait pas écrire, et l'imprimerie nous converse les gravures de Collé, de Piis et de Panard !
Les étrangers reprochent à notre peuple de n'avoir aucun sentiment de la poésie et de la couleur ; mais où trouver une composition et une imagination plus orientales que dans cette chanson de nos mariniers ?

Ce sont les filles de La Rochelle – Qui ont armé un bâtiment – Pour aller faire la course  - Dedans les mers du Levant
La coque est en bois rouge -  Travaillé fort proprement – La mâture est en ivoire – les poulies en diamant
La grand-voile est en dentelle - La misaine en satin blanc - Les cordages du navire - Sont de fil d’or et d’argent
L’équipage du navire - C’est tout filles de quinze ans – Les gabiers de la grande hine – N'ont pas plus de dix-huit ans !
Etc. »




I. Sont les filles de la Rochelle
{Ont armé un bâtiment
Pour aller faire la course
Dedans les mers du Levant.

Ah ! la feuille s’envole, s’envole,
Ah ! la feuille s’envole au vent.


II. La grand-vergue est en ivoire
{Les poulies en diamant
La grand-voile est en dentelle
La misaine en satin blanc.

Refrain.

III. Les cordages du navire
{Sont de fil d’or et d’argent
Et la coque est en bois rouge
Travaillé fort proprement.

Refrain.

IV. L’équipage du navire,
{C’est tout filles de quinze ans
Le cap’taine, qui les commande
Est le roi des bons enfants.

Refrain.

V. Hier, faisant sa promenade
{Dessus le gaillard d’avant
Aperçut une brunette
Qui pleurait dans les haubans.

Refrain.

VI. Qu’avez-vous jeune brunette
{Qu’avez-vous à pleurer tant ?
Avez-vous perdu père et mère
Ou quelqu’un de vos parents ?

Refrain.

VII. J’ai cueilli la rose blanche
{Qui s’en fut la voile au vent
Elle est partie vent arrière
Reviendra-z-en louvoyant.

Refrain.



Ecouter le chant ci-dessous :





 

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13 juin 2008 5 13 /06 /juin /2008 20:21
[Seconde partie de l'article de Luc Tirenne sur Donoso Cortes]


DROITE ET GAUCHE

        L'analyse de Donoso n'est jamais superficielle, elle ne s'attarde pas aux faits, mais elle remonte des faits et des opinions contingentes aux options primordiales. Donoso élève le débat au niveau de la métaphysique implicite qui fonde toute pratique politique. Il pose ainsi les vrais termes de la controverse qui oppose en une lutte à mort ce qu'il appelle « la civilisation catholique » et « la civilisation philosophique », opposition qui recouvre, mutatis mutandis, l'antagonisme politique droite-gauche.
Dès que la politique fait intervenir les notions religieuses de bien et de mal, elle se fait, qu'elle le veuille ou non, servante de la théologie. Et il ne suffit pas d'éluder ces termes pour s'affranchir de la théologie. Une pratique politique se détermine d'après des valeurs, et tout système de valeur réintroduit les notions de bien et de mal en leur donnant un nouveau contenu.
        Il est incontestable que la droite, même en dehors de toute référence religieuse, possède une conception pessimiste de l'homme que Donoso Cortes traduit en termes théologiques :

        « La civilisation catholique enseigne que la nature de l'homme est corrompue et déchue, corrompue et déchue d'une manière radicale dans son essence et dans tous les éléments qui la constituent ».


(Lettre à Montalembert, 1849)


        Toute amélioration sociale repose donc avant tout, pour l'homme de droite, sur une transformation interne de l'homme par lui-même, et suppose chez celui-ci une conscience claire de ses limites et de sa responsabilité conformément à la tradition philosophique de l'Antiquité.
        Donoso Cortes dégage très finement la conception implicite de l'homme qui recouvre la théorie de l'aliénation propre à la gauche. Selon celle-ci, l'homme est virtuellement un Dieu encore prisonnier des liens sociaux, religieux et politiques. L'histoire s'interprète alors comme la reconnaissance par l'homme de sa propre divinité grâce à la suppression de toutes les aliénations.

        « La civilisation philosophique enseigne au contraire que la nature de l'homme est une nature parfaite et saine : saine et parfaite dans son essence et dans les éléments qui la constituent. Etant sain, l'entendement de l'homme peut voir la vérité, la discuter, la découvrir. Etant saine, la volonté veut le bien et le fait naturellement. Cela supposé, il est clair que la raison, abandonnée à elle-même, arrivera à connaître la vérité, toute la vérité, et que la volonté, par elle seule, réalisera forcément le bien absolu. Il est également clair que la solution du grand problème social est de rompre les liens qui compriment et assujettissent la raison et le libre-arbitre de l'homme. Le mal n'est que dans ces liens : il n'est ni dans le libre-arbitre, ni dans la raison... S'il en est ainsi, l'humanité sera parfaite quand elle niera Dieu, qui est son lien divin ; quand elle niera le gouvernement, qui est son lien politique ; quand elle niera la propriété qui est son lien social ; quand elle niera la famille, qui est son lien domestique. Quiconque n'accepte pas toutes ces conclusions se met en dehors de la civilisation philosophique ».


(Lettre à Montalembert)


        Si l'école philosophique ou rationaliste prétend libérer l'homme de tout ce qui l'enracine, elle en fait une abstraction, un être suspendu enter ciel et terre, ou plutôt entre le paradis qu'il va construire et l'enfer dont il veut sortir.
        La conception « philosophique » de l'homme suppose une hétéronomie entre l'humain et le social : l'homme virtuel étouffe dans le carcan social. L'émancipation de l'homme passe donc pas l'abolition utopique de toute société organique :

        « Dans leur profonde ignorance de toutes choses, les écoles rationalistes ont fait de la société et de l'homme deux abstractions absurdes. En les considérant séparément, elles laissent l'homme sans atmosphère pour respirer et sans espace pour se mouvoir, et elles laissent également l'espace et l'atmosphère propres à l'humanité privés du seul être qui puisse se mouvoir dans l'un et respirer dans l'autre. »


(Esquisses historico-philosophiques)


        Donoso Cortes affirme au contraire la dimension sociale de l'homme dans une perspective aristotélicienne :

        « La société est la forme de l'homme dans le temps et l'homme est la substance qui soutient cette forme dans le temps ».


        Ce n'est pas le moindre mérite de Donoso que de montrer comment le concept abstrait d'homme, qui détermine apparemment une neutralisation générale des différences qui existent entre les hommes peut engendrer en fait un concept antithétique – celui d'inhumain, ou de sous-homme – chargé d'un véritable potentiel de mort. Aussi, comme le dit Carl Schmitt, le positivisme n'est qu'une manifestation du nihilisme. L'exaltation de l'homme abstrait conduit à l'extermination de l'homme concret, la volonté de libération de l'homme abstrait – affirmée comme fin – aboutit à l'asservissement de l'homme concret – considéré comme moyen.

        « L'abolition légale de la peine de mort est toujours un symptôme précurseur des massacres en masse ».


        C'est au nom des mêmes principes et de la même conception de l'homme que les bourgeois, en février 1848, ont aboli la peine de mort en matière politique et, en juin 48, ont fait tirer sur les ouvriers dans les rues de Paris. La contradiction, réelle au niveau des faits, s'abolit au niveau des principes : une conception erronée de l'homme est souvent à l'origine des grands massacres de l'histoire. « Avec une fulgurante instantanéité, écrit C. Schmitt, Donoso Cortes a vu en même temps que la perfection du commencement : l'abolition de la peine de mort, le résultat final : un monde où le sang paraît sourdre des rochers, parce que les paradis illusoires se transforment en réalités infernales ». Pascal l'avait déjà dit : « Qui veut faire l'ange fait la bête ».



ANALYSE CRITIQUE DU LIBERALISME

        Comme nous l'avons vu, le libéralisme n'est qu'une étape transitoire entre les affirmations souveraines de la « monarchie pure » et les négations absolues du socialisme. Donoso Cortes se montre beaucoup plus acerbe à l'égard de la médiocrité, de l'étroitesse de vue du libéralisme, qu'à l'égard du socialisme. Sa critique de l'idéologie libérale, « position de doute », annonce celle de José Antonio ou, sur un autre plan, celle de Julius Evola (3). Voici comment Donoso Cortes décrit l'école libérale dans son Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le socialisme.

        « De toutes les écoles, celle-ci est la plus stérile, parce qu'elle est la plus ignorante et la plus égoïste. Elle ne sait rien de la nature du mal et celle du bien ; elle a à peine une notion de Dieu ; elle n'en a aucune de l'homme. Impuissante pour le bien, parce qu'elle manque de toute affirmation dogmatique ; impuissante pour le mal, parce qu'elle a horreur de toute négation intrépide et absolue ; elle est condamnée sans le savoir à aller se jeter, avec le vaisseau qui porte sa fortune, ou dans le port du catholicisme, ou sur les écueils socialisme. Cette école ne domine que lorsque la société se meurt : la période de sa domination est cette période transitoire et fugitive où le monde ne sait s'il doit aller avec Barrabas ou Jésus, et demeure en suspens entre une affirmation dogmatique et une négation suprême. La société se laisse alors volontiers gouverner par une école qui ne dit jamais J'affirme ni Je nie, mais Je distingue. L'intérêt suprême de cette école est de ne laisser pas arriver le jour des négations radicales et des affirmations souveraines ; et, pour cela, au moyen de la discussion, elle confond toutes les notions et propage le scepticisme, sachant bien qu'un peuple qui entend sans cesse dans la bouche de ses sophistes le pour et le contre de tout, finit par ne pas savoir à quoi s'en tenir, et par se demander à lui-même si la vérité et l'erreur, le juste et l'injuste, le honteux et l'honnête sont réellement contraires entre eux, ou s'ils ne sont qu'une même chose considérée sous des aspects différents. Quelle que soit la durée de cette période, elle est toujours courte. L'homme est né pour agir, et la discussion perpétuelle, ennemie comme elle est des oeuvres, contrarie la nature humaine. Un jour arrive où le peuple, poussé par tous ses instincts, se répand sur les places publiques et dans les rues, demandant résolument Barrabas ou demandant Jésus, et roulant dans la poussière la chaire des sophistes ».


        Une école qui, contradictoirement, fait du scepticisme un dogme, se laisse facilement gagner par la corruption qui menace tous les pouvoirs. Donoso Cortes a bien vu qu'un régime fondé sur l'individualisme, où le pouvoir n'est plus investi d'un caractère sacré, laisse aisément se développer les germes de la corruption dans les gouvernements qui ne sont pas guidés par une idée, un dessin supérieurs, lorsque les intérêts matériels se font prédominants dans une civilisation décadente : « la corruption est le dieu de l'école, et, comme dieu, elle est partout en même temps » (Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le socialisme). Là encore, le diagnostic de Donoso n'a été que trop confirmé...
L'école libérale s'incarne essentiellement dans la classe bourgeoise que Donoso appelle classe discutidora, la classe bavarde, qui aime à discuter. En effet, Donoso perçoit les présupposés irrationnels qui guident l'action politique d'une classe qui s'affirme pourtant rationaliste : la vérité jaillit de la discussion comme l'étincelle du silex, tel est le dogme des régimes parlementaires.

        « De l'impuissance radicale des pouvoirs humains à qualifier les erreurs est né le principe de la liberté de discussion, base des institutions modernes. Ce principe ne suppose pas dans la société, comme il pourrait paraître à la première vue, une incompréhensible et coupable impartialité entre la vérité et l'erreur. Il se fonde sur deux autres suppositions, desquelles l'une est vraie et l'autre fausse : la première, que les gouvernements ne sont pas infaillibles, ce qui est parfaitement vrai ; la deuxième, que la discussion est infaillible, ce qui est parfaitement faux. L'infaillibilité ne peut résulter de la discussion, si elle n'est pas auparavant dans ceux qui discutent ; elle ne peut pas être dans ceux ceux qui discutent, si elle n'est pas en même temps dans ceux qui gouvernent. Si l'infaillibilité est un attribut de la nature humaine, elle est dans les premiers comme dans les seconds ; si elle n'est pas dans la nature humaine, elle n'est pas plus dans les seconds que dans les premiers. La question consiste donc à vérifier si la nature humaine est faillible ou infaillible ou, ce qui est nécessairement la même chose, si la nature de l'homme est saine ou déchue ou infirme »


(Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le socialisme)


        Cette analyse s'appuie sur l'exemple de la Monarchie de Juillet dont Donoso Cortes a pu apprécier l'impuissance. Une classe qui transfère toute activité politique qui remet toute décision au plan de la discussion, dans la Presse et le Parlement, est incapable de faire face à une époque de tensions sociales. La discussion permet d'éluder la responsabilité et de diluer la vérité métaphysique : ainsi la sanglante et inéluctable bataille décisive est-elle convertie en un débat parlementaire ; les oppositions sont illusoirement résolues sur le plan idéal de la discussion – jusqu'au jour où le conflit latent éclate dans la rue, laissant le Parlement impuissant, au moment où, comme le dit Donoso, le peuple réclame Barrabas ou Jésus – et, pour lui, il est indéniable que Barrabas doive l'emporter.



LE SOCIALISME : « UN SEMI-CATHOLICISME, ET RIEN DE PLUS »

        Donoso Cortes a compris que le libéralisme et le socialisme dont l'affrontement semble aujourd'hui partager le monde, ont en réalité la même source, appartiennent à la même famille idéologue :

        « L'école libérale n'a fait que poser les prémices qui mènent aux conséquences socialistes, et les socialistes n'ont fat que tirer les conséquences renfermées dans les prémices libérales – ces deux écoles ne se distinguent pas entre elles par les idées, mais par la hardiesse »

(Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le socialisme)


        Fondamentalement, les deux écoles partagent la même conception de l'homme, la même vision optimiste et progressiste de l'histoire. Mais les penseurs socialistes ont fait preuve de plus de rigueur, de « hardiesse » et d'ampleur de vue que la bourgeoisie sceptique, timorée et bavarde. Donoso ne peut se défendre d'une certaine admiration à l'égard du socialisme en qui le catholicisme a trouvé un adversaire à sa mesure : c'est le combat du Titan contre Zeus, de Lucifer contre Dieu :

        « Les écoles socialistes l'emportent sur l'école libérale, spécialement parce qu'elles vont droit à tous les grands problèmes et à toutes les grandes questions, et parce qu'elles proposent toujours une résolution péremptoire et décisive. Le socialisme n'est fort que parce qu'il est une théologie satanique. »

(Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le socialisme)


        Si le libéralisme est le temps du scepticisme, des demi-négations, le socialisme porte à ses extrêmes conséquences le processus de divinisation de l'homme :

        « En supposant la bonté innée et absolue de l'homme, l'homme est en même temps réformateur universel et irréformable , il finit par se changer d'homme en dieu ; son essence cesse d'être humaine pour être divine. Il est en soi absolument bon et il produit hors de lui par ses bouleversements le bien absolu. »

(Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le socialisme)


        Le rationalisme philosophique qui anime le socialisme et, plus tard, les prétentions du marxisme à la scientificité, ne sont pas exempts de présupposés théologiques. D'ailleurs, Nieztsche n'a-t-il pas montré que la science était l'ultime refuge de la religion ? Le socialisme, malgré le masque d'objectivité scientifique dont il cherche à se revêtir, n'a pu se passer des catégories théologiques de bien et de mal. Aussi, comme toute religion, il a ses mystères. On peut voir, dans le passage suivant, comment Donoso retourne l'arme de la raison et de la rigueur logique contre ses adversaires, et les enferme dans un dilemme.

        « Ou le mal qui est dans la société est une essence, ou un accident ; si c'est une essence, il ne suffit pas, pour le détruire, de bouleverser les institutions sociales, il faut en outre détruire la société même qui est l'essence qui soutient toutes ces formes. Si le mal social est accidentel, alors vous êtes obligés de faire ce que vous n'avez pas fait... de m'expliquer en quels temps, par quelle cause, de quelle manière et en quelle forme est survenu cet accident, et ensuite par quelle série de déductions vous arrivez à changer l'homme en rédempteur de la société... le rationalisme qui attaque avec fureur tous les mystères catholiques, proclame ensuite, d'une autre manière et dans un autre but, ces mêmes mystères »

(Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le socialisme)



        Dans la perspective essentiellement spiritualiste qui anime toute l'oeuvre de Donoso, il va de soi que les révolutions ont des causes beaucoup plus profondes que des revendications matérielles. La crise politique et sociale a des racines spirituelles ; le trouble est dans l'homme avant d'être dans la société ; la crise politique est d'abord une crise religieuse – en ce sens, l'histoire du sentiment religieux en Europe est susceptible de confirmer les thèses de Donoso. Dans son discours sur la dictature, il avait énoncé une proposition qui avait dû alors sembler paradoxale, mais dont l'évidence nous apparaît aujourd'hui clairement :

        « Les révolution sont la maladie des peuples riches. Les révolutions sont la maladie des peuples libres ».


        Lorsque Donoso Cortes critique le socialisme, c'est à Proudhon qu'il pense surtout. Mais en fait, ces attaques s'appliqueraient sans doute à Karl Marx, qui venait de publier son Manifeste communiste, beaucoup mieux qu'à Proudhon, révolté contre les injustices et les abus de la propriété plus que contre la propriété elle-même, et hostile à la dictature des masses comme à l'Etat-Moloch, « dragon aux milles écailles », dira Nieztsche. D'ailleurs, l'analyse qu'il fait du communisme, identifié au panthéisme, s'applique fort bien à la vision marxiste, et en particulier à la conception marxiste de la matière.

        « Il me semble évident que le communisme, de son côté, procède des hérésies panthéistes et de celles qui leur sont parentes. Lorsque tout est Dieu, lorsque Dieu est tout, Dieu est par-dessus tout, démocratie et multitude. Dans ce système, ce qui n'est pas le tout n'est pas Dieu, bien qu'il participe à la divinité, et ce qui n'est pas dieu n'est rien, parce qu'il n'y a rien hors de Dieu qui est tout. De là le superbe mépris des communistes pour l'homme et leur négation insolente de la liberté humaine ; de là ces aspirations immenses à une domination universelle par la future démagogie qui s'étendra sur tous les continents... de là cette fureur insensée qui se propose de brasser toutes les classes, tous les peuples, toutes les races pour les broyer ensemble dans le grand mortier de la Révolution, afin que de ce sombre et sanglant chaos sorte un jour le Dieu unique, vainqueur de tout ce qui est particulier... ce Dieu est la démagogie... La Démagogie est le grand Tout, le vrai Tout, le Dieu vrai, armé d'un seul attribut, l'omnipotence, triomphateur des trois grandes faiblesses du Dieu catholique : la bonté, la miséricorde et l'amour. A ces traits, qui ne reconnaîtrait Lucifer, Dieu de l'orgueil ? »

(Lettre au cardinal Fornari)


        Cette analyse du communisme préfigure et commente le jugement définitif, mais souvent mal compris de Pie XI : « le communisme est intrinsèquement pervers », c'est-à-dire qu'il prend le masque de la religion, exploite et pervertit sa volonté de justice, et prétend même assumer ses fins, pour n'aboutir en fait qu'à l'asservissement de l'homme. Les catholiques de gauche pourraient méditer avec profit ces lignes de Donoso Cortes. Une religion à rebours, tel est le communisme. Ainsi s'explique le caractère religieux, souvent souligné, du socialisme marxiste, et des institutions qui s'en réclament. Ce caractère n'est pas superficiel, mais il tient à l'essence même du communisme. La grande leçon de la théologie politique donosienne, c'est qu'une religion sans transcendance engendre nécessairement la tyrannie.



VERS LA DICTATURE MONDIALE

        Au moment où Donoso Cortes prononçait son discours sur la dictature, l'optimisme semblait de rigueur dans les milieux politiques et intellectuels. Aussi passera-t-il pour un exalté, d'un fanatisme médiéval. En effet, la crise de 1848 semblait apaisée, et rares furent ceux qui comprirent l'ampleur des forces et des problèmes apparus lors de cette révolution européenne. La prospérité économique , le progrès technique et l'optimisme progressiste ont fait oublier la « grande peur » de 48. Mais la révolution bolchevique devait confirmer de façon hallucinante les plus noires prédictions de Donoso Cortes.
        Pour lui, la dictature est désormais inévitable. Il n'est que de savoir quelle sorte de dictature l'emportera : la dictature d'en-haut, celle de l'autorité et de la légitimité, ou la dictature révolutionnaire, celle des masses. Le totalitarisme est une conséquence logique sur le plan politique, de la mort de Dieu : ce sont les Etats qui vont à présent assumer les vidées messianiques de la religion. Donoso Cortes figure le déterminisme de cette loi historique par une image empruntée au monde de la physique :

        « Le monde marche à grands pas à la constitution d'un despotisme, le plus gigantesque et le plus terrible que les hommes aient jamais vu... Il n'y a que deux sortes de répression possibles : l'une intérieure, l'autre extérieure, l'une religieuse, l'autre politique. Elles sont de nature telle que, quand le thermomètre religieux est élevé, le thermomètre politique est bas, et quand le thermomètre religieux est bas, le thermomètre politique, la répression politique, la tyrannie s'élève. Cela est une loi de l'humanité, une loi de l'histoire ».



        L'homme mutilé, l'homme abstrait produit par cette « folie de l'unité » rationalisante que dénonce Donoso, conduit à la dictature. Le progrès technique, loin d'être un facteur de libération, comme le croyait l'école saint-simonienne qui pose les bases de l'idéologie technocratique, prépare en fait l'asservissement de l'homme. Là encore, le paradoxe de cette vision s'est aujourd'hui estompé, et l'idée paraît presque banale. Donoso Cortes, à l'aube même du socialisme et du développement technique, a prévu que communisme et technocratie allaient dans la même voie, parce qu'ils partagent au fond la même conception progressiste et matérialiste de l'homme et de l'histoire ; tous deux contribuent à faire du monde « une grande usine » selon l'expression de Max Weber, quelque que soit la structure de cette usine.

        « Les voies sont préparées pour un tyran gigantesque, colossal, universel ; tout est préparé pour cela. Veuillez y réfléchir : il n'y a plus maintenant de résistance soit matérielles, soit morales. Il n'y a plus de résistances matérielles, parce que avec les bateaux à vapeur et les chemins de fer, il n'y a plus de frontières et parce que, avec le télégraphe électrique, il n'y a plus de distances , et il n'y a plus de résistances morales, parce que tous les esprits sont divisés et tous les patriotismes sont morts. »


        Bien plus, au moment même où Marx mettait tous ses espoirs révolutionnaires dans les Etats-Unis et voyait dans la Russie absolutiste le dernier rempart à la révolution européenne (in New York Times, 31 décembre 1853), Donoso Cortes voyait clairement dans le despotisme russe un allié potentiel du socialisme. Il a prévu le déclin de l'Europe, la montée des colosses à l'est à l'ouest, et le regroupement des slaves par l'expansionnisme russe. Il a le sentiment que l'humanité est en marche vers la centralisation et la bureaucratie, après les destructions successives des corps intermédiaires. Voici comment Louis Veuillot, dans son introduction aux oeuvres de Donoso Cortes, résume la prophétie contenue dans le Discours sur la situation générale de l'Europe :

        « Quand d'une part le socialisme aura détruit ce qu'il doit naturellement détruire, c'est-à-dire les armées permanentes par la guerre civile, la propriété par les confiscations, la famille par les moeurs et par les lois ; et quand d'autre part le despotisme moscovite aura grandi et se sera fortifié comme il doit naturellement se fortifier et grandir, alors le despotisme absorbera le socialisme et le socialisme s'incarnera dans le Czar ; ces deux effrayantes créations du génie du mal se compléteront l'une par l'autre. »


*
**

        Donoso Cortes fut encore moins prophète en Europe que dans son propre pays. Ses avertissements dont l'actualité reste brûlante se sont perdus. N'est-ce pas le destin de Cassandre ? A vrai dire, nulle pensée ne fut plus « inactuelle » au sens où l'entend Nietzsche, c'est-à-dire à la fois si pertinente et si contraire aux idéologies montantes.
        Aux Cortes, son Discours sur la dictature provoqua rires et huées et ne trouva qu'une minorité pour l'approuver. Plusieurs études lui ont été consacrées en Espagne et, en Italie, un article de la revue Destra (4) vient de lui rendre hommage ; mais il est significatif que le livre écrit par Thomas Molnar sur la Contrerévolution, ne cite que fois Donoso pour le confondre avec de Maistre et de Bonald. L'étude la plus pénétrante sur Donoso Cortes reste assurément celle de Carl Schmitt qui a bien souligné l'intuition fondamentale de toute la philosophie donosienne et son originalité au sein du courant contrerévolutionnaire : cette intuition fondamentale, « c'est d'avoir pensé de façon exacte que la pseudo-religion de l'Humanité absolue est le début d'un chemin qui conduit à une terreur inhumaine. Conclusion neuve, mais plus profonde que les nombeux et grandiloquents jugements que de Maister a formulés sur la révolution, la guerre et le sang. Comparé à l'espagnol qui a admirablement sondé les abîmes de terreur de 1848, de Maistre est encore un aristocrate de la restauration de l'ancien régime un continuateur et un approfondisseur du XVIIIe siècle ».


Luc Tirenne,

 "Donoso Cortes : une philosophie contre-révolutionnaire de l'histoire", Défense de l'Occident, n°117, février 1974, pages 53 à 73.




(3) Julius Evola, L'Homme parmi les ruines, Les Sept Couleurs [réédition, Les Hommes au milieu des ruines, Pardès, 2005]
(4) Rivoluzionne, tradizione e reazione, par G. Allegra, in Destra, juillet-août 1973.
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10 juin 2008 2 10 /06 /juin /2008 18:17

«Les forges de Paimpont sont créées en 1633 au cœur de la forêt de Brocéliande, riche de récits chevaleresques attachés à la légende du Graal. D’après Simone Morand, ce sont les filles de Paimpont qui lancèrent la mode du pantalon, ce qui leur valut d’être réprimandées par leur curé, conscient de son devoir moral.»



Nous apprend Thierry Decruzy dans son ouvrage sur les chants. Cette chanson a connu un regain de popularité lorsqu'elle fut reprise par le groupe Tri Yann. Selon
ce site, le chant fut collecté par Adolphe Orain dans son oeuvre de collecte des chants traditionnels bretons.

«Le 1er décembre, jour de la Saint Éloi, il y avait une cérémonie religieuse dans la petite chapelle dédiée au patron des forgerons. Les ouvriers fleurissaient les marteaux et différents outils. S’en suivait une fête profane, où l’on mangeait, buvait et dansait. On imagine bien que les réjouissances devaient donner lieu à quelques « débordements » (notamment aux yeux de l’Eglise...). Ainsi la chanson « Les Filles des Forges » se présente comme un cantique qui aurait été progressivement détourné de sa vocation première au gré des versions et variantes.»



Variation : c. 2 l. 3 et 5 : « 
Pour demander pardon » ; c. 6 l. 3 et 5 : « Mais les jolis garçons » deux fois.




1. {Digue ding don don
Ce sont les filles des forges, (bis)
{Des forges de Paimpont.
Digue ding don daine
Des forges de Paimpont.
Digue ding don don (bis)

2. {Digue ding don don
Elles s’en vont à confesse(bis)
{Au curé du canton.
Digue ding don daine
Au curé du canton.
Digue ding don don (bis)

3. {Digue ding don don
«Qu’avez-vous fait mes filles (bis)
{Pour demander pardon ?
Digue ding don daine
Pour demander pardon ?
Digue ding don don (bis)

4. {Digue ding don don
J’avions couru les bals (bis)
{Et les jolis garçons.
Digue ding don daine
Et les jolis garçons.
Digue ding don don (bis)

5. {Digue ding don don
Ma fille pour pénitence (bis)
{Nous nous embrasserons.
Digue ding don daine
Nous nous embrasserons.
Digue ding don don (bis)

6. {Digue ding don don
Je n’embrasse point les prêtres(bis)
{Mais les jolis garçons
Digue ding don daine
Qu’ont du poil au menton.
Digue ding don don (bis)


Ecouter le chant ici :




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8 juin 2008 7 08 /06 /juin /2008 20:24
[Première partie (sur quatre) d'un article de sur "Donoso Cortes : une philosophie contre-révolutionnaire de l'histoire" par Luc Tirenne, publié par dans la revue Défense de l'Occident en février 1974]



        Tout avait été dit, le 4 janvier 1849, à la tribune du parlement espagnol, lorsqu'un député s'avança pour donner son avis dans le débat de politique générale. L'opposition progressiste venait de protester contre les mesures autoritaires prises par le gouvernement du général Narvaez lors des troubles consécutifs aux révolutions européennes de 48. La majorité conservatrice dont faisait partie ce député, avait affirmé son libéralisme et sa bienveillance à l'égard des progressistes, en se cantonnant dans les questions de fait et en se gardant bien d'attaquer de front les positions doctrinales de ses adversaires, comme il est de règle dans les assemblées. L'orateur, avec une éloquence à la fois riche et fougueuse, commença par déclarer qu'il venait enterrer au pied de la tribune, leur sépulture légitime, toutes les idées de l'opposition, c'est-à-dire les idées libérales, « idées stériles et désastreuses, dans lesquelles se résument les erreurs inventées depuis trois siècles pour troubler et dissoudre les sociétés humaines ». La publication de ce Discours sur la dictature où Juan Donoso Cortes annonçait l'avènement mondiale de la dictature et proclamait la légitimité de la « dictature d'en haut » contre la « dictature révolutionnaire », valu à son auteur une immense renommée dans toute l'Europe.

        Renommée de courte durée. Donoso cortes mourut quatre ans plus tard, après avoir publié en 1851, simultanément à Paris et à Madrid, l'oeuvre qui résume sa pensée, l'Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le socialisme. Il avait prévu avec une exactitude stupéfiante les conséquences de la Révolution européenne de 48 où étaient apparues les prémices idéologiques du monde contemporain. Au milieu de l'optimisme qui régnait alors chez les libéraux et les prophètes du socialisme et de la technocratie, il avait annoncé, 80 ans avant Spengler, la décadence de la civilisation de l'Europe, l'apparition sur la scène mondiale des géants russes et américains, et l'instauration d'une dictature telle que le monde n'en avait jamais connue, issue paradoxalement de la mort de Dieu et du nouveau culte de l'Homme. Car c'est une vision théologique de l'histoire que nous offre Donoso Cortes, une vision où les faits s'ordonnent sur un plan supérieur, s'éclairent par l'action de la Providence divine.

        Mais l'homme n'en reste pas moins l'instrument de sa déchéance : c'est par ses actes que Prométhée s'expose aux foudres de Zeus. Donoso cortes n'est pas un visionnaire. Avec une parfaite logique, il tire simplement les conséquences politiques, avec la conviction, selon le titre du premier chapitre de son Essai, que « dans toute grande question politique se trouve toujours une grande question théologique » et que, comme il le dit ailleurs, « la théologie est la clé mystique de l'histoire ».

        Même si l'on adopte pas la vision providentialiste de Donoso Cortes, on ne peut nier la dimension religieuse qui s'attache au politique. Proudhon le reconnaissait dans ses Confessions d'un révolutionnaire : « Il est surprenant qu'au fond de notre politique nous trouvions toujours la théologie ». Il faut aujourd'hui rendre hommage à la lucidité de Donoso dont nous ne cessons de voir les preuves, et réentendre la voix de ce Cassandre trop longtemps méconnu.




HONNEUR ET FIDELITE

        Descendant du grand conquistador, Donoso Cortes est né en 1809 lorsque ses parents fuyaient l'avance des troupes napoléoniennes, à ce sombre moment de l'histoire espagnole qu'a illustré Goya, en un temps où les fondements du pouvoir légitime se trouvaient ébranlés. La double fidélité qui caractérise Donoso Cortes, fidélité à la couronne, fidélité à la religion, s'affirme peu à peu et s'approfondit à travers les épreuves de sa vie et celles de l'Espagne. D'abord imprégné des idées philosophiques du XVIIIe siècle sous l'influence du poète libéral Quitana, il étudie l'histoire, la philosophie et la littérature ; très jeune, il écrit une tragédie, aujourd'hui perdue. Il suit les cours de jurisprudence à Séville et achève ses études à 19 ans, avant l'âge requis pour être avocat.
        Donoso Cortes se consacre alors à la littérature. Il est nommé à la chaire de littérature de Cacerès, et, plus tard, il publiera une étude sur Classicisme et Romantisme, dont il cherche à concilier les aspirations. Il compte sur son esprit pour avancer dans le monde. « J'ai eu le fanatisme littéraire, le fanatisme de l'expression, le fanatisme de la beauté dans les formes », écrira-t-il à Montalembert. La langue parfaite de ses écrits politiques confirme en effet ce souci de la forme. Mais le destin le frappe une première fois. Marié en 1830, il perd une petite fille, puis sa femme en 1833. Il affronte aussi les orages politiques : au moment où se dessine une crise de succession dynasstique qui suscite une crise politique, il envoie au vieux Ferdinand VII un Mémoire sur la situation actuelle de la monarchie où il conseille au roi de s'appuyer sur les classes intermédiaires afin d'éviter à la fois l'anarchie et le despotisme. A ce moment, Donoso Cortes est encore un libéral, de la fraction modérée, et admirateur de la raison. Le roi le nomme officier du ministère public à l'Athénée de Madrid qui, en 1839, le nomme président de la section des sciences morales  et politiques.
        Elu député de la province de Cadix, il s'écarte de plus en plus des libéraux et de la philosophie rationaliste, comme en témoigne un article paru en 1839 sur l'Etat des relations diplomatiques entre la France et l'Espagne :

        « La philosophie se sépare de Dieu, nie Dieu, se fait Dieu... Mais de même que Dieu fit l'homme à son image et à sa ressemblance, la philosophie voulut faire la société à sa ressemblance et à son image. À l'imitation de Jésus-Christ qui donne son évangile au monde, elle voulut donner son évangile aux sociétés, leur montrant, au milieu des tempêtes de la révolution, comme Moïse couronné d'éclairs sur la cime orageuse du Sinaï, les nouvelles tables de la loi sur lesquelles étaient écrits les droits imprescriptibles de l'homme. Ainsi la Révolution française devait être logiquement le sanglant commentaire et le terme providentiel de l'émancipation de la raison humaine, comme aussi le dernier de ses égarements ».


       
De plus en plus hostile aux factions, Donoso Cortes affirme son attachement à la monarchie. Et lorsqu'en 1840, la régente Marie-Christine et contrainte à l'exil, Donoso la précède à Paris. Lorsqu'en 1842, les modérés reprennent le pouvoir, sa fidélité est récompensée. Secrétaire particulier de la très jeune Isabelle II, il joue auprès d'elle le rôle d'un précepteur ; nommé duc de Valdegamas, il est à nouveau élu aux Cortes comme député de Cadix. Il va négocier avec la France les mariages de la Reine et de sa soeur.
        Encore une fois, les épreuves personnelles s'ajoutent aux épreuves civiles : la mort de son frère provoque chez Donoso un approfondissement de la foi ; on peut alors parler d'une conversion dans la foi qui va désormais illuminer et ordonner sa pensée. À partir de cette époque, Donoso Cortes va jouer un rôle de premier ordre dans la diplomatie espagnole à Paris et à Berlin ; en particulier, il s'occupera des modalités du mariage de Napoléon III avec Eugénie de Montijo dont il sera le témoin.
        Ses notes diplomatiques, ses essais sur la situation de la Prusse et de la France, ses portraits d'hommes politiques, sont un modèle de lucidité, de concision, et il y fait preuve, comme dans toute son oeuvre, de l'alliance rare de l'esprit de finesse avec l'esprit de géométrie. Ses écrits diplomatiques montrent par ailleurs que Donoso Cortes n'avait rien d'un rêveur : son portrait fort pénétrant de Talleyrand trahit une admiration certaine envers l'intelligence politique de cet intriguant génial. Menant une vie d'aumône et de mortification, il est terrassé en 1853 par une maladie de coeur, dans sa quarante quatrième année. Il avait eu, dans son fameux discours du 4 janvier 1849, uen vision aussi forte de son destin personnel que de l'avenir de la civilisation lorsqu'il avait déclaré :

        « Lorsque arrivera le terme de mes jours, je n'emporterai pas avec moi le remords d'avoir laissé sans défense la société barbarement attaquér, ni l'amère et insupportable douleur d'avoir jamais fait aucun mal à un seul homme ».





Portrait de Donoso Cortes




UNE CONCEPTION THEOLOGIQUE DE L'HISTOIRE.

        Donoso Cortes se situe dans la lignée de Saint Augustin et de Bossuet ; mais aussi de Vico qui, au début du XVIIIe siècle, posa les principes d'une « science nouvelle » qui préfigure l'historiographie et la sociologie moderne. Comme Vico, Donoso souligne l'étroite liaison qui existe entre la religion d'une part, et les coutumes, les moeurs, les institutions d'autre part (1). La religion est « l'institution primaire » qui fonde toute civilisation :

        « Dans la manière de prononcer le nom (de Dieu) se trouve la solution des plus redoutables énigmes : la vocation des races, la mission providentielle des peuples, les grandes vicissitudes de l'histoire, l'élévation et la chute des empires les plus fameux, les conquêtes et les guerres, les différents caractères des peuples, la physionomie des nations et jusqu'à leur fortune diverse ».


        Sous l'influence de Vico, la vision du théologien inspiré par Bossuet s'appuie sur une analyse précise des lois historiques, des arcanes des peuples et des civilisations. Vico s'interroge sur les origines de l'inégalité et pose les fondements d'une lutte des classes. La religion, la pratique des mariages solennels et l'ensevelissement des morts constituent le patrimoine spirituel d'où naît la civilisation et permettent de distinguer les héros marqués du sceau divin des bestioni, les vagabonds qui n'ont point accès aux mystères. L'histoire ne sera plus que l'effort tenté par les plébéiens pour accéder aux actes de la vie religieuse et se voir reconnaître une nature humaine. Les sociétés, selon Vico, reflètent les « modifications de l'esprit humain », la prépondérance d'une fonction sur les autres : la fonction « poétique » ou inventive, la fonction organisatrice et agissante, enfin la rationalisation et l'esprit critique. Chaque fonction s'incarne dans une classe, et chaque classe dans une élite. Ainsi les anciennes élites sont-elles successivement remplacées par de nouvelles (cf. la théorie de Vilfredo Pareto sur la « circulation des élites »). Mais le remplacement d'une élite par une autre provoque des ébranlements, la ruine progressive des traditions, et l'individualisme anarchique précipite la ruine des sociétés.
        C'est la nécessité d'une expiation divine, pour Donoso Cortes, qui fait passer à chaque cycle les sociétés de la barbarie primitive à une nouvelle barbarie, issue d'un excès de rationalisation et d'esprit critique. A cet égard, il est certain que Donoso a subi, tout comme le catholique allemand Schlegel, et plus tard Gobineau, l'attrait romantique du barbare primitif, de l'arien blond qui vient régénérer les peuples vieillis.
        Donoso Cortes examine l'histoire des peuples à la lumière de leurs sentiments religieux avec une puissance de synthèse et d'intuition qui fait oublier les généralisations et les simplifications parfois abusives que lui reproche son ami Montalembert. Voici par exemple comment le providentialisme donosien analyse les rapports de la puissance politique et de la religion romaine.

        « Ses principaux dieux, de famille étrusque, étaient grecs en ce qu'ils avaient de divin, orientaux, en ce qu'ils avaient d'étrusques : ils étaient nombreux, comme ceux des Grecs, ils étaient sombres et austères, comme ceux des Orientaux. En politique comme en religion, Rome est en même temps l'Orient et l'Occident. C'est une ville comme celle de Thésée et un empire comme celui de Cyrus. Rome représente Janus : dans sa tête, il y a deux têtes, et chacune son visage : l'un est le symbole de la durée orientale l'autre le symbole de la mobilité grecque. Sa mobilité est si grande qu'elle la porte jusqu'au bornes du monde, et sa durée est telle que le monde la proclame éternelle. Choisie dans les desseins de dieu pour préparer les voies à Celui qui devait venir, sa mission providentielle fut de s'assimiler toutes les théologies et de dominer toutes les nations. Obéissant à un appel mystérieux, tous les dieux montent au Capitole romain ; tous les peuples frappés d'une terreur subite baissent la tête. Les villes, les unes après les autres, se voient dépouillées de leurs temples et de leurs villes. Le gigantesque empire a pour lui la légitimité orientale : la multitude et la force ; et la légitimité occidentale : l'intelligence et la discipline ; aussi envahit-il tout et rien ne lui résiste ; aussi brise-t-il tout, et personne ne se plaint. De même que sa théologie a tout à la fois quelque chose de différent de toutes les théologies et quelque chose de commun avec elles, Rome a quelque chose qui lui est propre et beaucoup de choses qui lui sont communes avec les villes qu'elle a vaincues par ses armes ou éclipsées par sa gloire : elle a la sérénité de Sparte, le poli d'Athènes, la pompe de Memphis, la grandeur de Babylone et de Ninive. Pour tout dire en un mot, l'orient est la thèse, l'Occident l'antithèse, Rome la synthèse ; et l'empire romain ne veut pas dire autre chose, sinon que la thèse orientale et l'antithèse occidentale sont allées se confondre et se perdre dans la synthèse romaine. Qu'on décompose maintenant en ses éléments constitutifs cette puissante synthèse, et l'on verra qu'il n'y a synthèse dans l'ordre politique et social que parce qu'il y a synthèse dans l'ordre l'ordre religieux. Chez les peuples d'orient comme chez les républiques grecques, et dans l'empire romain comme chez ces républiques et chez ces peuples, les systèmes théologiques servent à expliquer les systèmes politiques : la théologie est la lumière de l'histoire ».

( Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le socialisme)


        La vision providentialiste se fond ici avec l'analyse proprement historique. La philosophie trouve son accomplissement dans l'histoire, « science qui prime toutes les autres », écrit-il à la jeune souveraine Isabelle II. Comme celle de Vico, la philosophie de Donoso s'insère dans l'histoire :

        « Vico ne peut accepter le divorce entre les idées et les faits, entre les lois providentielles et les phénomènes contingents, entre la vérité et la réalité, entre la philosophie et l'histoire. La philosophie et l'histoire, selon le dogme que pose Vico, au seuil de la Science nouvelle, sont soeurs jumelles »

(article sur la Science nouvelle, 1938).


        La philosophie de Donoso Cortes est une interrogation chrétienne de l'histoire. La crise du monde moderne est interprétée comme une crise religieuse ressentie à travers la philosophie et la politique. L'homme des temps modernes a été déraciné par le christianisme de ses attaches qu'il juge désormais trompeuses. Dans un monde qui n'est qu'illusion, instabilité et chaos, l'homme s'est replié sur lui-même à la recherche de ce qui l'anime en une démarche intériorisante dont le cartésianisme constitue le moment philosophique : Descartes, doutant un instant de l'existence du monde, instaure l'ego comme critère de toute vérité, tandis que Kant confirmera la raison comme faculté de l'universel.
        Si l'homme enivré de son pouvoir prétend se passer de Dieu dont Descartes, au dire de Pascal, aurait bien voulu pouvoir se passer, alor s l'esprit critique sape toutes les traditions, la raison universelle elle-même se subdivise en une multiplicité de raisons individuelles, avant de se ressaisir brutalement au sein d'une raison absolue qui serait l'expression d'une volonté unique et tyrannique. Quand la religion meurt, c'est l'homme qui se divinise puis l'Etat.
        Ces avatars du sentiment religieux transparaissent dans l'univers politique du siècle dernier comme dans le nôtre. Pour Donoso Cortes, les idéologies politiques ne sont que des ruses de la religion. Comme Saint-Simon et Spengler, il a le sentiment que l'ère chrétienne touche à sa fin, que socialisme et communisme s'instaurent en une religion nouvelle. Les affirmations ou les négations politiques procèdent des négations et des affirmations religieuses. Donoso a d'ailleurs pris chez de Bonald le parallèle fécond entre métaphysique et théorie de l'Etat qu'il expose ainsi dans une lettre à Montalembert.

        A ces trois affirmations religieuses : un Dieu personnel existe ; Ce Dieu personnel règne sur la terre et au ciel ; ce dieu gouverne absolument les choses divines et humaines, correspondent trois affirmations politiques : il y a un roi présent par le moyen de ses agents ; le roi règne sur les sujets ; ce roi gouverne ses sujets. Nous sommes ici dans le système politique de la « monarchie pure ».
        A la négation religieuse : Dieu existe, règne, mais il est trop élevé pour gouverner les choses humaines qui caractérise le déisme, correspond la monarchie constitutionnelle progressiste où le roi existe, règne, mais ne gouverne pas.
        Le panthèisme où Dieu existe, mais n'a pas d'existence personnelle, ne règne ni ne gouverne, identifie Dieu à l'Humanité et correspond au système républicain dans lequel le pouvoir existe sans être une personne ; le pouvoir est tout ce qui existe, c'est-à-dire la multitude qui s'exprime par le biais du suffrage universel.
        L'athéisme qui pour Donoso Cortes s'incarne en Proudhon, est la négation absolue : Dieu n'existe pas, et l'anarchisme sera sur le plan politique l'expression de cet athéisme.

        Ce passage de l'affirmation à la négation pure figure le mouvement de la décadence qui emporte les civilisations. La dégradation du pouvoir politique, la lente agonie de la légitimité qui reflètent les progrès de l'irreligion semblent irréversibles dans la philosophie profondément pessimiste de Donoso Cortes. Pour lui, le mal triomphe naturellement du bien, le triomphe de Dieu sur le mal ne peut qu'être surnaturel. Il faut reconnaître que l'histoire a davantage confirmé le diagnostic de Donoso Cortes que l'optimisme utopique des socialistes et des technocrates. Comme le dit Carl Schmitt (2), « Donoso Cortes porte un coup mortel à la philosophie progressiste de l'Histoire avec une force qui procède d'une image vigoureuse et personnelle de l'Histoire ».


[suite de l'article (a venir)]





(1) Nous suivons ici le parallèle établi entre Vico et Donoso Cortes par J. Chaix-Ruy dans Donoso Cortes, théologien de l'histoire et prophète (1956)

(2) Interpretacion europea de Donoso Cortes, Biblioteca del pensamiento actual, Madrid, 1963.
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31 mai 2008 6 31 /05 /mai /2008 18:17
       Le petit Grégoire ou l'histoire d'un grand chouan par Théodore Botrel...

       Dans l'enregistrement effectué par l'auteur, ne figure pas le second couplet. On trouve parfois sur internet un curieux mélange entre les couplets du
Petit Grégoire et le refrain du chant Monsieur de Charette (où il est question d'un autre Grégoire).




I. La maman du petit homme
Lui dit un matin :
«A seize ans t’es haut tout comme
Notre huche à pain…
A la ville tu peux faire
Un bon apprenti
Mais pour labourer la terre
T’es ben trop petit, mon ami !
T’es ben trop petit ! dame oui !»


II. Vit un maître d’équipage
Qui lui rit au nez
En lui disant : «point n’engage
Les tout nouveaux-nés !
Tu n’as pas laide frimousse
Mais t’es mal bâti…
Pour faire un tout petit mousse
T’es ’cor trop petit, mon ami,
T’es ’cor trop petit, dame oui !»


III. Dans son palais de Versailles
Fut trouver le Roy :
«Je suis gars des Cornouailles
Sire équipez-moi !»
Mais le bon Roy Louis XVI
En riant lui dit :
Pour être “garde française”
T’es bien trop petit, mon ami,
T’es bien trop petit, dame oui !
»


IV. La guerre éclate en Bretagne
Au printemps suivant
Et Grégoire entre en campagne
Avec Jean Chouan…
Les balles passaient nombreuses,
Au-dessus de lui
En sifflotant, dédaigneuses,
«Il est trop petit, ce joli,
Il est trop petit, dame oui !»


V. Cependant une le frappe
Entre les deux yeux…
Par le trou l’âme s’échappe :
Grégoire est aux Cieux !
Là, saint Pierre qu’il dérange
Lui dit : «Hors d’ici !
Il nous faut un grand Archange,
T’es bien trop petit, mon ami,
T’es bien trop petit, dame oui !»


VI. Mais en apprenant la chose,
Jésus se fâcha
Entrouvrit son manteau rose
Pour qu’il s’y cacha ;
Fit ainsi rentrer Grégoire
Dans son Paradis,
En disant : «Mon ciel de gloire,
En vérité je vous le dis,
Est pour les petits dame oui !»



Ecouter le chant ici :



ou ci-dessous (précédé d'un petit précis historique sur la vie de Théodore Botrel)

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24 mai 2008 6 24 /05 /mai /2008 14:15
      La police fédérale a effectué la semaine dernière un raid contre l'« Agriprocessors plants », une vaste usine agroalimentaire.

      Il s'agissait de la plus vaste opération jamais réalisée dans l'Iowa.
      Il s'agit de la plus grande entreprise agroalimentaire dans sa spécialité du monde.
      389 travailleurs clandestins exploités y ont été arrêtés.
      Un laboratoire de drogue y a été retrouvé.
      Des hommes armés ont été découvert patrouillant dans l'usine.


      Autant de faits qui auraient du conduire à une couverture médiatique importante. Surtout si l'on imagine une seconde que l'entreprise avait produit des aliments réservés aux populations catholiques, et dirigeait par un catholique intégriste.


      Il n'en est rien : Agriprocessors a été fondée en 1987 par Aaron Rubashkin, un juif intégriste loubavitch ; l'entreprise est aujourd'hui dirigée par ses fils, Sholom et Heshy. Le coeur de métier de l'entreprise, c'est la production industrielle de produits casher ; désormais pourtant deux-tiers des produits sont produits pour les goys, sous les marques « Best Iowa Beef », « Aaron's Best » et « Rubashkin ».

      L'usine avait été déjà au coeur de plusieurs scandales dans le passé. L'organisation de défense des droits des animaux PETA avait mis en avant, preuves vidéos à l'appui, les traitements abjects infligés aux animaux, les conditions d'hygiène inadmissibles. Les images ont horrifié jusqu'à des juifs qui ont déclaré l'installation contraire à la loi juive.
      L'établissement, établi au milieu d'une paisible population américaine a par ailleurs conduit à de nombreuses tensions, à tel point qu'un livre est paru : Postville, A clash of cultures in Heartland of America (Postville, un choc des cultures au coeur de l'Amérique). Les dirigeants ont par exemple importé des centaines d'immigrés, la plupart clandestins, dans la ville : 90% des élèves y sont aujourd'hui hispaniques. La ville ne compte que 2300 habitants, majoritairement donc aux mains des employés de Rubashkin.
      Entre autre, la société a du payer 600 000 dollars pour avoir pollué les eaux environnantes, rejetant volontairement les eaux usées en pleine nature ou, il y a deux mois 758 000 francs pour diverses infractions aux lois sur la santé, la sécurité ou le droit du travail.


      Les services des douanes et de répression de l'immigration illégale ont donc mené la plus grande intervention jamais réalisée dans l'Iowa. L'action ne visait cependant que les seuls clandestins, et aucunement les employeurs koshers.
      Selon les informations rassemblées par les services fédéraux, 76% des 968 employés étaient des clandestins, et utilisaient des faux numéros de sécurité sociale. Parmi les accusations, celle d'employer des enfants de 15 ans, de forcer les employés à acheter des véhicules pour pouvoir faire des faux-papiers ou encore des violences, telles celles subies par un travailleur guatémaltèque, les yeux bandés, frappé avec un crochet de boucherie.

      Aucun cadre de l'entreprise n'a pourtant été arrêté ; paradoxalement, l'arrestation des clandestins pourrait avoir permis de cacher d'autres accusations, telles que le travail des enfants selon un syndicat.


      The Last but not the least, durant l'opération les policiers fédéraux ont découvert un laboratoire de méthamphétamine (drogue dure provoquant une très forte addiction). Mais les dirigeants, donc, n'ont pas été interpellés, encore moins incarcérés. Et surtout pas expulsés.



     
      Il y a quelques mois Sholom Rubashkin faisait paraître une lettre ouverte, dénonçant les propos diffamatoires et la campagne menée contre son entreprise. Il rappelait que ses produits étaient « sûrs et sains ».
      Après l'opération, l'entreprise publiait une lettre pour apporter son soutien aux clandestins arrêtés, renouvellait son appel pour que les clients leur accordent toujours leur confiance et affirmait vouloir coopérer avec les autorités.

      Parmis les personnes arrêtés on trouvait : 290 Guatémaltèques, 93 Mexicains, 4 "Ukrainiens" et 2 Israéliens. Ils ont été arrêtés pour vol et falsification aggravée de documents.
Dix-huit jeunes ont été libérés, laissant à penser que l'accusation de travail clandestin de mineurs était fondée, même si le procureur a refusé de s'exprimer sur le sujet.


      Il y a quelques mois, les clandestins avaient tenté de se syndiquer. Les dirigeants de l'usine avait refusé. Il y a quelques semaines, un tribunal avait donné raison aux employés.
      Nul doute que désormais les clandestins y réfléchiront à deux fois avant de vouloir affronter leurs patrons...
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19 mai 2008 1 19 /05 /mai /2008 18:18
Il y a trente ans aujourd'hui, le 18 mai 1978, les légionnaires du 2e REP, emmené par le colonel Philippe Erulin, sautaient sur Kolwezi. Cette ville minière du Katanga fut prise dans la tourmente de la seconde guerre de Shaba. Les rebelles katangais prirent d'assaut la ville, plaçant la population européenne dans une situation très périlleuse.
Trois milles Européens sont entre les mains des Katangais, armés et aidés par divers régimes communistes. Plusieurs dizaines d'Européens sont assassinés en quelques jours.
Le 16 mai, la France réagit finalement : le 2e REP est mit en alerte bien que la France et la Belgique ne parviennent pas à s'entendre sur une intervention commune.
A 14 h 30, le 19 mai, 405 légionnaires sautent sur Kolwezy. En quelques heures, la ville est sous contrôle pour une grande partie ; les Européens sont libérés. Le jour suivant, 250 légionnaires de la 4e compagnie et section d'éclairage et de reconnaissance est larguée à l'Est de la ville ; dans la matinée ils seront rejoints par les parachutistes belges.
Les ressortissants européens sont évacués peu après. Le jour suivant, le REP libére la ville de Metalkat et sauvent les Européens.
Les rebelles auront eu le temps de tuer près d'un millier de personne, dont 170 européens.
Durant l'opération, cinq légionnaires ont perdu la vie.


En guise d'hommage, ce chant parachutiste,
Au terrain. Le chant emprunte le même air que 
La Sentinelle.
Variations : c. 1, l. 2 : "pour embarquer" ; refrain, l. 2 : "Claquent pépins" ; l'autre refrain ("Haidi, haïdo, ..." , connait beaucoup de changements.



I. Au terrain qui rassemble, dans l’ombre,
Les sticks bien alignés pour s’embarquer,
Dans la nuit murmurent des voix sans nombre…
Les hommes sont impatients d’être largués.

Le casque est lourd, ami,
Mais par la porte ouverte, claquez pépins…
Tu vas bondir, ami… Haï di, Haï do…
Le GO t’arrache vers ton destin.


II. Dans la rosée des prés, des bois,
Doucement tu te poseras.
L’air du matin te grisera et te rendra fana.

{Haï di, Haï do (X3) .
Haï do, ha, ha, Haï di, Haï do (X4).


III. Si un soir le sort veut que tu tombes,
Les copains seront là pour te venger,
Les pistes qui sillonnent le monde
Prendront ton sang comme celui des aînés.

Ta seule détente, ami, n’est pas dans le retour
Vers tes amours.
Mais pour la France, ami,
Haï di, Haï do,
Il faut lutter, paras, sans trêve ni repos.


IV. Si tu reviens dans ton pays,
N’oublie jamais tous ceux, là-bas,
Qui, pour défendre la Patrie,
Mènent de durs combats.

{Haï di, Haï do (X3) .
Haï do, ha, ha, Haï di, Haï do (X4).




Ecouter le chant ci-dessous :



ou ci-dessous :




D'autres images de Kolwezi

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13 mai 2008 2 13 /05 /mai /2008 20:24
Le Manifeste de Zénon par Yvan Benedetti



On ne peut qu’être abasourdi par les réactions primaires et irrationnelles que suscite, à nouveau, ces derniers jours, ce que l’on pourrait qualifier d’ « Affaire du Détail 2 ».

Abasourdi que tant de bonnes consciences moralisatrices s’effraient de la libre parole d’un homme précisément libre et sensé, s’exprimant avec honnêteté et courage, dans le pays qu’on ne cesse de définir comme la terre d’élection de la Liberté et de l’Esprit et qui se veut l’héritier audacieux de la Divine Philosophie des Lumières.

Abasourdi qu’on dénie à un homme politique aussi incontournable que Jean-Marie Le Pen le droit élémentaire à la libre pensée. Est-il nécessaire de rappeler en effet que Le Pen n’est pas le premier venu, qu’il représente des millions de Français et qu’il fait partie - cela n’est tout de même pas anecdotique - de cette petite minorité de politiques qui eut l’honneur d’accéder au deuxième tour de l’élection présidentielle ?

Est-il nécessaire aussi de rappeler, malgré ses défauts, l’acuité de son sens politique, les qualités de visionnaire qu’il a démontrées tout au long de sa carrière, ainsi que son bon sens, l’étendue de sa culture, la cohérence, la constance et la solidité de sa pensée, la pertinence et l’efficacité de son discours, la probité de son long engagement quand la plupart de nos hommes politiques se distinguent, au contraire, par leur vacuité, leur vanité, leur goût immodéré pour le mensonge et la rhétorique creuse, leur opportunisme et leur incompétence!

Le Pen n’est pas un « parvenu » de la politique, c’est un homme de la IVème, un « vieux cheval » qui a connu la Seconde Guerre Mondiale, l’Indochine, l’Algérie et la constitution de la Vème République. Il possède une expérience de longue durée. Expérience au cours de laquelle il a sans cesse prouvé son attachement au système démocratique et parlementaire, ayant d’ailleurs ramené la droite nationale dans le giron républicain quand celle-ci, écoeurée et désespérée après la tragédie algérienne, n’envisageait guère d’autre issue qu’un coup de force. Sa loyauté incontestable à l’égard du modèle républicain - que certains dans notre camp ont vivement dénoncé - ne lui a cependant pas ôté son libre-arbitre et son indépendance d’esprit. Lui fait-on payer autre chose aujourd’hui que son refus définitif d’être assujetti, « vassalisé » au despotisme d’une idéologie simpliste, créée à des fins peu morales, en vérité, par le gros argent et ses inféodés de la sphère médiatique, qui nous rebattent les oreilles des mêmes poncifs dangereux et absurdes et qui, pour préserver leur pouvoir absolu, brûlent et questionnent publiquement l’impudent qui ose s’en écarter?

Un homme politique, digne de ce nom, n’a pas à se soumettre à la doxa. Il doit, à l’inverse, se comporter en guide, en pédagogue, en précurseur. Si les esprits les plus éclairés quant aux arcanes de l’Histoire et de la Politique ne parlent plus, alors qui le fera? Quelle compréhension aurons-nous des règles du jeu qui président à nos destinées ? Qui nous aidera à construire notre réflexion et notre jugement? Veut-on vraiment réduire définitivement nos esprits en esclavage et nous ravaler au statut de troupeau aveugle et bêlant?

On nous expliquera qu’on cherche simplement à bâillonner les « voix du mal » afin de mieux garantir notre bonheur à venir. Mais « l’enfer n’est-il pas pavé de bonnes intentions ? » Qu’on se souvienne de ces paroles de Diderot, penseur autorisé de notre époque sectaire: « Un des plus grands malheurs qui pût arriver à une nation, ce serait deux ou trois règnes d’une puissance juste, douce, éclairée, mais arbitraire: les peuples seraient conduits, par le bonheur, à l’oubli complet de leurs privilèges, au plus parfait esclavage (…) Malheur aux sujets en qui l’on anéantit tout ombrage sur leur liberté, même par les voies les plus louables en apparence. Ces voies n’en sont que plus funestes pour l’avenir. C’est ainsi que l’on tombe dans un sommeil fort doux, mais dans un sommeil de mort, pendant lequel le sentiment patriotique s’éteint, et que l’on devient étranger au gouvernement de l’Etat. » Ne nous y trompons pas: l’impossibilité de plus en plus radicale d’exprimer, en France, son opinion librement est une tyrannie extrême qui s’attaque à une fonction vitale de notre peuple: sa faculté de penser et donc, ô malheur, de s’opposer! De plus en plus d’idées, légitimes et saines sont décrétées « immorales » par la nouvelle théologie imaginée par certains despotes qui se sont crus autorisés à ériger de nouveaux tabous prétendument supérieurs, après avoir soigneusement et patiemment détruit les anciens qui, seuls, garantissaient l’équilibre et la vitalité de nos sociétés traditionnelles. Peu à peu, des problématiques qui ne concernaient que les seuls domaines sociétal, historique, scientifique, philosophique ou artistique ont été asservies aux préceptes totalitaires de cette néo-morale irrécusable, et détournées vers le domaine judiciaire. Certaines pensées ont été chassées du champ naturel de la discussion et du débat et tenter de les énoncer expose à de lourdes sanctions. D’une manière insidieuse, la dictature de la pensée unique a peu à peu circonvenu notre espace de liberté comme le fait le lierre autour de l’arbre.

Les mises en examen pour « déviationnisme idéologique » se sont multipliées ces dernières années. On ne peut, hélas, en dresser la liste exhaustive et l’on se contentera d’évoquer les affaires les plus récentes: le traitement ainsi réservé à l’école révisionniste, au journal Rivarol pour une fois de plus les propos de Le Pen sur l’occupation allemande; à l’ex-député Christian Vanneste - condamné pour « homophobie » en 2006; à l’une de nos plus emblématiques concitoyennes, Brigitte Bardot - déjà condamnée à quatre reprises à des peines de plus en plus lourdes et au sujet de laquelle le substitut du procureur, Anne de Fontette, qui officiait déjà contre Rivarol et Jean-Marie Le Pen, s’est dite « fatiguée » par un cinquième procès pour « haine raciale »; à Bruno Gollnisch, chassé comme un pestiféré de l’université et condamné très lourdement pour contestation de crime contre l’Humanité; à Renaud Camus et à Dieudonné condamnés pour antisémitisme; à Alain Finkielkraut contempteur de l’équipe de France de football « black-black-black »; à Kemi Seba de la Tribu Ka, emprisonné pour antisionisme; à Pascal Sevran ayant osé critiquer la fécondité exponentielle des Africains et plus récemment, à Bruno Guigue, sous-préfet limogé après des propos contre Israël.

La France croule désormais sous le poids écrasant des lois liberticides. Le carcan intellectuel se resserre dramatiquement. Après la loi du député communiste Gayssot en 1990, les lois Perben I et II, après la loi dite Taubira en 2001 sur l’esclavage, va être entérinée la loi de 2006 relative au génocide arménien… et cela ne fait que commencer car la logique communautariste doit déboucher sur autant de lois dites « mémorielles ». On nous imposera bientôt des commandements sacrés sur l’homoparentalité, l’euthanasie, et nul ne pourra en discuter le bien-fondé sous peine d’être férocement vilipendé puis excommunié du Paradis de la Bien-Pensance.

Il n’appartient ni aux parlementaires ni aux juges et encore moins aux hyènes médiatiques, de réécrire l’Histoire, discipline ô combien complexe et sujette à débats, controverses et révisions! De même, il n’appartient ni aux saltimbanques surmédiatisés ni aux « liseurs » de prompteurs, armés d’oreillettes inquisitrices de définir la morale politique et l’éthique. Les défenseurs ardents de la Liberté ne sont guère indisposés par le simulacre de démocratie dans lequel nous vivons depuis trop longtemps, les électeurs nombreux du Front National étant, par exemple, honteusement privés de toute représentation parlementaire. N’est-ce pas d’ailleurs avec le plus grand fanatisme et le plus grand mépris pour la liberté de pensée et d’opinion qu’ils organisèrent entre les deux tours de l’élection présidentielle de 2002 une formidable chasse à l’homme, au cours de ce qu’il est convenu d’appeler « la quinzaine de la haine »?

De nombreux intellectuels réagissent aujourd’hui face à la montée vertigineuse du sectarisme et du totalitarisme idéologique, craignant de ne plus pouvoir exercer leur fonction ou même leur travail. Certains esprits audacieux et lucides exigent l’abrogation des lois liberticides. La liberté d’expression ne se négocie pas au cas par cas: elle est totale ou elle n’est pas. Le peuple français - existe-t-il encore suffisamment pour s’en souvenir? - passait jadis pour le peuple le plus spirituel et le plus épris de liberté. Ne possède-t-on pas, comme on le dit souvent, l’une des langues les plus fines et les plus riches au monde, réputée pour sa capacité à exprimer les plus subtiles délicatesses de l’esprit, ce qui en fit la langue de la diplomatie? Nous étions hier encore un peuple d’insoumis, de révoltés, de chicaneurs - diront nos détracteurs - un peuple de poètes, de philosophes, d’écrivains, de révolutionnaires, jamais rassasié de liberté et de pensée, passionné de rhétorique et de conversation, l’esprit critique toujours à l’affût.

Deviendrons-nous les moutons que notre nature profonde nous a empêchés d’être depuis toujours? Serons-nous demain des veaux comme les autres? Accepterons-nous la répugnante lobotomie que certains pervers professionnels veulent nous infliger? La France sera-t-elle changée en un poulailler industriel et le reste du monde, en planète des singes, par la politique du nouvel ordre mondial?

Si Le Pen doit aujourd’hui s’arracher la langue comme Zénon d’Elée, ce philosophe grec, disciple de Parménide qui, pour protester contre son tyran, se trancha la langue avec ses dents puis la cracha au visage de son ennemi, alors il nous faudra à tous également offrir notre organe lingual en sacrifice à la liberté de parole et de pensée. Si les premiers de nos dialecticiens ne peuvent plus s’exprimer, nous serons tous réduits à un silence mortifère qui nous mènera tout droit à la pire des servitudes. Peut-être même, un jour, après les condamnations judiciaires, nous fera-t-on taire à coups d’embargos ou de bombardements comme cela se fait déjà dans de nombreuses régions du monde. Car nos bourreaux, ne l’oublions pas, ont des visions et des visées universelles. Ils voudraient bien nous servir la même bouillie idéologique de New-York à Tokyo et du Pôle Nord au Pôle Sud! Qu’ils ne se réjouissent pas trop vite: il y aura toujours un rebelle quelque part, fidèle à ses traditions, pour leur tenir tête: un Breton entêté, un Iranien irréductible ou un Russe obstiné…!

Au-delà des personnes, qu’elles aient nom Le Pen ou Dieudonné, Bardot ou Faurisson, il s’agit de s’élever au-dessus des chapelles, des réticences partisanes des tendances diverses, pour défendre un principe intangible et vitale à notre dignité, et à notre pérennité: la liberté de pensée et de parole sans condition. Affirmons qu’être libre de parole et de pensée n’est pas un délit de droit commun. Pour cela, exigeons l’arrêt de l’Inquisition par l’abrogation de toutes les lois liberticides en France.

Yvan Benedetti.
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10 mai 2008 6 10 /05 /mai /2008 20:28


Deutsche Stimme (DS) : Cher Monsieur Le Pen, les élections législatives et présidentielles n’ont pas donné les résultats espérés pour le Front national. Cependant, tous les commentateurs sont d’accord pour dire que M. Sarkozy n’a eu du succès que « parce qu’il a parlé pendant la campagne électorale comme Le Pen ». Avez-vous, de manière paradoxale, plus changé que tous les autres le paysage politique en France sans pour autant avoir pu maintenant obtenir le succès mérité ?


Jean-Marie Le Pen : Les idées pour lesquelles le Front National se bat depuis 30 ans ont en effet constitué l'enjeu de l'élection présidentielle. Le patriotisme, le rétablissement de l'ordre, la maîtrise de l'immigration, la famille, la revalorisation du travail et du mérite, la baisse des impôts et des charges... Les deux finalistes du 6 mai se sont sentis obligés de reprendre dans leurs discours ces valeurs que jusqu'à cette année j'étais le seul dirigeant politique à défendre. Et madame Royal a été battue parce que les Français ont cru que la candidate socialiste était sur ce programme-là moins crédible que monsieur Sarkozy. Quant aux candidats qui se réclamaient publiquement de l'idéologie soixante-huitarde au pouvoir depuis bientôt 39 ans, ils ont recueilli des scores dérisoires. Malgré des moyens considérables apportés notamment par ses deux groupes parlementaires, (l'un à l'Assemblée nationale et l'autre au Sénat), par ses treize mille élus locaux, par ses dizaines de municipalités, par ses deux conseils généraux et par toutes les collectivités territoriales gérées avec les socialistes, le parti communiste a obtenu moins de 2 %, à peine plus que la candidate des Verts et que le chouchou des médias, le faux paysan, Joseph Bové. La régularisation des immigrés clandestins, le droit de vote des étrangers, la dépénalisation de la drogue, le laxisme à l'école, l'antimilitarisme, le collectivisme, les délinquants présentés comme des victimes de la société..., tous ces mensonges qui nous ont fait tant de mal, les Français les ont rejetés. Tel est le résultat de ce que certains sociologues appellent en France « la lepénisation des esprits ».


DS : Après sa victoire électorale, M. Sarkozy vous a invité à l’Elysée pour vous parler. De quoi avez-vous parlé avec M. Sarkozy et comment jugez-vous sa personne ?


Le Pen : En me recevant à l'Elysée, ainsi qu'il l'a fait pour les dirigeants de tous les grands partis politiques français, le nouveau président de la République renoue avec une tradition républicaine que ses prédécesseurs, notamment monsieur Chirac, avaient rompue à l'égard du courant patriotique que je représente. Si je salue la courtoisie de monsieur Sarkozy, je n'en condamne pas moins sa politique.

Le premier entretien que j'ai eu à l'Elysée portait sur son projet de « mini » traité européen. Le ton courtois de notre conversation ne m'a pas empêché de lui faire part de mon opposition totale. Son projet reprenant les principales dispositions de la Constitution européenne et qui sera soumis, non pas à référendum, mais au vote des parlementaires, bafoue la volonté du peuple français qui, le 29 mai 2005, avait rejeté la Constitution européenne. Notre second entretien a porté sur la réforme des institutions de notre pays. Je lui ai fait part des propositions du Front National qui veut notamment, d'une part, rendre à notre Etat sa souveraineté, de l'autre, accroître le rôle et la représentativité du Parlement. L'Assemblée nationale actuelle n'est guère représentative du peuple français : deux partis, l'UMP et le PS, occupent 90% des sièges ; les communistes, dont la candidate à l'élection présidentielle n'a obtenu que 1,9% des voix, ont cependant un groupe parlementaire ; le Front National avec plus de cinq fois plus d'électeurs n'a aucun député. Cette absence de représentativité empêche le Parlement d'exercer sa fonction : contrôler le gouvernement et faire les lois. Quand elles ne sont pas conçues à Bruxelles, (c'est le cas de 80% de notre législation), nos lois sont faites ou défaites, soit par les lobbies, soit par la rue. L'instauration de la proportionnelle intégrale permettra au Parlement de jouer son rôle.


DS : Dans son premier discours après son succès électoral, M. Sarkozy a dit vouloir protéger l’identité nationale des Français. De tels propos seraient impensables après l’élection d’un chancelier allemand. Comment jugez-vous la différence entre la fierté nationale en France et en Allemagne ?


Le Pen : Monsieur Sarkozy est un homme politique habile qui, pour arriver au pouvoir et s'y maintenir, est à l'écoute des grands mouvements d'opinion. Le retour du patriotisme en est un. Il est le résultat du travail du Front National qui, depuis plus de vingt ans, recueille le soutien de millions d'électeurs.

Il en sera de même en Allemagne quand les patriotes auront installé durablement et solidement leur famille politique.


DS : Pensez-vous qu’une plus grande fierté nationale allemande soit dans l’intérêt de la coopération franco-allemande dans l’avenir pour défendre les intérêts européens communs, ou pensez-vous qu’elle pourrait être un danger ?


Le Pen : Nos deux nations se sont durement combattues au cours de trois guerres entre 1871 et 1945. Aujourd'hui les Français, les Allemands et tous les autres peuples d'Europe sont confrontés aux mêmes menaces : immigration, dénatalité, décadence morale, mise en place d'un super Etat européen constituant le cheval de Troie du mondialisme... Pour y faire face, plutôt que d'additionner leurs faiblesses, comme c'est le cas dans l'Europe de Bruxelles, les nations européennes doivent augmenter chacune leurs forces et bien sûr établir entre elles une coopération.


DS : Le nouveau Président français a dit vouloir imposer le respect des valeurs françaises, c’est-à-dire imposer l’obligation à toute personne qui vit en France de se comporter de manière culturelle comme un Français, ou du moins comme un Européen, faute de quoi il n’y aurait aucune place pour elle en France. Que pensez-vous de cette politique ?


Le Pen : Ne nous faisons pas d'illusions. Un ministère de l'immigration et de l'identité nationale a bien été créé. Mais les quatre objectifs que lui avait assignés dans le Figaro du 1er juin son titulaire, monsieur Hortefeux, accéléreront l'immigration-invasion de la France et la dissolution de son identité.

- « L'immigration zéro n'est pas souhaitable », a-t-il affirmé, alors que la France compte déjà près de dix millions d'immigrés.
- « L'Etat a des devoirs envers les étrangers souhaitant s'installer durablement en France », est-il écrit plus loin. Pour cela, « l'accès au logement, à la formation et au travail doit être facilité ».
- Le ministre veut par ailleurs donner aux immigrés entrés illégalement en France une prime, intitulée « aide au retour proposée à tous les étrangers en situation irrégulière ayant été invités à quitter le territoire ». Celui qui est aussi ministre de l'identité nationale est incapable de la définir. Il se contente de citer l'article premier de la Constitution de 1958 « la France est une république indivisible, laïque, démocratique et sociale ». Outre le fait que cela signifie qu'à ses yeux la France n'existait pas avant 1958, cette définition peut s'appliquer à n'importe quel pays de la planète dont la Constitution reprendrait ce texte. Ces principes, le nouveau pouvoir les met en oeuvre. Ainsi en voulant élever le taux de l'immigration économique à 50% du flux total des entrées en France, le gouvernement multipliera par près de dix les chiffres de l'immigration légale. L'immense majorité des immigrés légaux venant au titre du regroupement familial et seulement 6% pour travailler, il faudra augmenter de façon exponentielle le nombre de nouveaux immigrés pour obtenir le taux de 50%.






DS : A votre avis cette politique de la priorité culturelle française aura-t-elle du succès, vu le grand nombre de jeunes musulmans en France ? Quelles sont vos propres propositions ?


Le Pen : Les velléités gouvernementales n'auront guère d'effet car l'immigration a depuis 30 ans changé de nature. Jusque dans les années 70, elle était une immigration de travail destinée à une économie de plein emploi et d'origine européenne dans sa grande majorité. Aujourd'hui, l'immigration, qui croît au rythme de près de 500 000 entrées chaque année, originaire dans sa quasi-totalité du monde musulman, menace l'identité culturelle de la France.

En réalité, la France voulue par monsieur Sarkozy ne constituerait plus un peuple, mais serait un ensemble de territoires habités par des communautés ethniques, religieuses, voire sexuelles. Dans cet ensemble qui n'aurait plus de français que le nom, les nouveaux arrivants bénéficieraient d'un traitement de faveur destiné à favoriser leur intégration. C'est la discrimination « positive » c'est-à-dire la préférence étrangère, au nom de laquelle le nouveau pouvoir favorise l'Islam aux dépens des autres religions, et notamment aux dépens de celle qui constitue un élément essentiel de l'identité française : le christianisme.

L'arrêt de l'immigration, l'interdiction des pratiques contraires à nos lois et à nos traditions, le démantèlement des associations islamistes voulant imposer la charia, telles sont les principales mesures à prendre pour sauvegarder notre identité. A terme, il est aussi indispensable d'engager une grande politique familiale afin de redresser notre natalité. Sinon, avec un indice de fécondité moyen de 1,7 (pour les femmes françaises), notre peuple disparaîtra, remplacé par d'autres plus prolifiques.


DS : Comment jugez-vous le danger de la progression de l’islam en France et en Europe, d’une part par rapport à la problématique de l’immigration, d’autre part par rapport à l'absence de tradition religieuse européenne de l’islam ?


Le Pen : Je partage l'opinion du secrétaire particulier de Benoît XVI, le Père Georges Gänswein qui, le 26 juillet dernier, déclarait : « Les tentatives pour islamiser les pays occidentaux ne doivent pas être dissimulées. La menace que cela fait peser sur l'identité de l'Europe ne devrait pas être ignorée sous prétexte de respect mal placé. »

L'islamisation de nos sociétés est la conséquence de la politique d'immigration mise en oeuvre dans nos pays par les gouvernements qui se succèdent depuis 30 ans. En France, elle a été notamment encouragée par monsieur Sarkozy qui en 2003, en créant le CFCM, (le conseil français du culte musulman), quand il était ministre de l'intérieur, a fait entrer dans les institutions de la République française des associations islamistes comme l'UOIF. Il est relayé dans nos villes par les maires UMP, comme monsieur Gaudin à Marseille, qui tentent de financer avec l'argent des contribuables locaux la construction de mosquées. Le Front National ayant obtenu dans les municipalités où il a des élus l'annulation de ces procédures qui violent la loi de 1905, le nouveau gouvernement essaiera de changer la loi.


DS : Selon vous, quel est le rapport entre la progression de l’islam en Europe et le danger progressif du terrorisme, et quel rôle y jouent les USA ? Est-ce que les états européens sont trop peu autonomes par rapport aux USA dans leur politique étrangère ?


Le Pen : Prises en main progressivement par des associations islamistes, les communautés musulmanes installées dans nos pays constituent un vivier de recrutement pour les réseaux terroristes. Les attentats qui ont ensanglanté Madrid en 2004 et Londres en 2005 l'illustrent de façon dramatique. Les auteurs de ces attentats, de même que ceux arrêtés le mois dernier en Grande-Bretagne, étaient des immigrés musulmans.

Les Etats-Unis jouent dans le développement de ce terrorisme une politique de gribouille. Ils affirment le combattre, notamment en Afghanistan, mais ils arment l'un des régimes les plus islamistes au Monde, celui de l'Arabie Saoudite, dont est originaire Ben Laden. Par ailleurs, leur opération militaire en Irak a plongé ce pays dans une violence terroriste sans précédent. Enfin, en aidant les islamistes bosniaques et kosovars contre les Serbes, les deux prédécesseurs de l'actuel président des Etats-Unis, ont installé en Europe même des foyers de terrorisme.

Les pays européens n'ont pas les moyens militaires de mener une politique étrangère indépendante de celle des Etats-Unis. Les 500 millions d'habitants des 27 pays membres de l'Union européenne dépensent collectivement et en valeur absolue deux fois moins pour leur défense que 295 millions d'Américains. Les Etats-Unis consacrent 3,4 % de leur produit intérieur brut à leur défense contre 1 % en moyenne pour l'Europe. Telle est la raison principale de l'infériorité militaire de l'Europe, obligée de s'en remettre aux Etats-Unis pour assurer sa sécurité militaire. La politique de sécurité européenne collective aggrave ce phénomène car elle renforce l'illusion selon laquelle, une défense européenne commune dispensera chaque nation de fournir un effort pour assurer sa propre défense. Plutôt que d'additionner leurs faiblesses, les nations européennes devraient augmenter chacune leurs capacités militaires dans un monde de plus en plus dangereux. Cela n'exclut aucunement une coopération, notamment dans le domaine de l'armement.



Jean-Marie Le Pen au XIII Congrès du Front national
(avec Bruno Gollnisch au second plan)



DS : Bien que votre fille ait obtenu au second tour 42 % dans sa circonscription, le Front national n’est toujours pas représenté à l’Assemblée nationale, car en raison du mode de scrutin majoritaire, il existe de fait un système d’apartheid politique. Dans ce contexte, que pourra faire le FN dans l’avenir pour peser sur la scène politique ?


Le Pen : Depuis 1988, à la suite du rétablissement par Chirac du scrutin majoritaire, les millions d'électeurs du Front National n'ont pas de représentation à l'Assemblée nationale. Cela n'a pas empêché notre mouvement de jouer un rôle majeur dans la vie politique française.

Non seulement nous avons imposé nos thèmes dans le débat politique, comme l'a prouvé la campagne présidentielle de cette année, mais nous avons aussi empêché le pire. Ainsi, pourquoi le vote des étrangers n'est-il pas encore entré en vigueur, alors que l'ensemble des partis au pouvoir y est favorable ? C'est parce que la crainte d'une montée du Front National les dissuade de le faire. Monsieur Sarkozy, qui avait déclaré vouloir donner le droit de vote aux immigrés dans un entretien donné au Monde le 24 octobre 2005, a dû ainsi faire marche arrière. Le rejet de la Constitution européenne par le peuple français est une autre illustration du de ce rôle.

Le contexte actuel offre des perspectives immenses à notre famille politique. Monsieur Sarkozy a bien sûr remporté une victoire sur le Front National. Mais cela peut être une victoire à la Pyrrhus. En venant sur nos thèmes, il a légitimé le combat que nous menons depuis 30 ans. D'autre part, en refusant d'appliquer les solutions que nous proposons et qu'attendent les Français qui l'ont porté au pouvoir, il peut conduire ceux-ci à nous accorder leur confiance.

Pour cela nous devons présenter, sans excès ni complexe, en évitant toute caricature, nos idées pour redresser la France et aussi remettre en ordre de bataille notre appareil militant.


DS : Le Front national joue un rôle important au sein du groupe ITS au Parlement Européen et également en France. Il a contribué à préserver les constitutions des pays membres de leur élimination par une soi disante « Constitution Européenne ». Dans ce contexte, comment jugez-vous la nouvelle procédure constitutionnelle européenne, entamée pendant la présidence européenne allemande ?



Le Pen : Le projet de traité européen négocié par les dirigeants de l'Europe de Bruxelles reprend les principales dispositions de la Constitution européenne, rejetée par les électeurs néerlandais et français, et enlève donc aux nations européennes les derniers éléments de leur souveraineté : La reconnaissance à l'Union européenne de la personnalité juridique. L'Europe de Bruxelles ayant alors le statut international à part entière d'un Etat, les pays membres perdront leur statut d'Etat souverain.

La création d'un ministre des affaires étrangères européen.

La suppression de la règle de l'unanimité. Un Etat ne pourra plus opposer son droit de veto à une décision qu'il estime contraire à ses intérêts.

Par ailleurs, les négociations d'adhésion de la Turquie se poursuivent, alors que nos peuples sont de plus en plus opposés à l'entrée dans l'Europe d'un pays asiatique, qui n'a pas plus de raison d'adhérer à l'Union européenne que n'en aurait le Maroc.


DS : Quelle importance aura la coopération entre les droites nationales en Europe et selon quels critères une telle « politique d’alliance » entre les droites nationales devrait-elle être instaurée ?


Le Pen : Les droites nationales en Europe peuvent coopérer en vue de créer une Nouvelle Europe, l'Europe des patries qui sera : une Europe européenne, donc sans la Turquie, fondée sur un héritage commun constitué par sa civilisation chrétienne et humaniste ; une Europe respectueuse de la souveraineté et de l'identité de ses nations membres ; une Europe avec des frontières sûres ; une Europe de la coopération, appliquant le principe de la préférence communautaire européenne.

Associée à la Russie et exploitant avec elle les immenses richesses naturelles de son territoire, Cette Europe aurait les moyens humains et matériels, d'une part, de se libérer de la dépendance économique et politique des Etats-Unis, de l'autre, de répondre à la menace constituée par l'expansionnisme islamiste.


DS : Quelle est, selon vous, la situation de la droite nationale en Europe et plus particulièrement en Allemagne ?


Le Pen : Dans toute l'Europe, le sentiment patriotique, brimé par l'esprit de repentance entretenu par les pouvoirs politique, médiatique et financier en place, se réveille. Les peuples d'Europe prennent conscience que leurs patries constituent la protection la plus efficace contre l'immigration-invasion et contre l'euro-mondialisme qui détruit leurs emplois dans un système économique sans frontières soumettant nos industries à une concurrence internationale déloyale pratiquant le dumping social. L'identité et l'indépendance nationale ainsi que la promotion des valeurs familiales et morales sont approuvées par un nombre croissant d'électeurs, en France et en Allemagne, mais aussi dans tous les autres pays d'Europe.

Les conditions sont réunies pour la renaissance en Europe d'un Printemps des peuples encore plus fécond que celui de 1848.


[Source :
Deutsche Stimme via FN69].
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